Nous touchons avec cette question de l'identité absolue des deux mères un point assez fondamental : permettez-moi par conséquent d'y revenir. Notre collègue Patrick Hetzel a cité le fameux adage mater semper certa est : la mère est toujours certaine d'être la mère, puisque c'est elle qui accouche.
Je comprends le souci qu'ont les couples homosexuels féminins de chercher une solution visant à ancrer la filiation vis-à-vis de l'autre femme. Loin de moi l'idée de le mépriser, car il est légitime.
Ceci étant dit, vous répondez à ce souci légitime au travers d'une solution qui ne convient pas : elle ne fonctionne pas parce que vous niez la spécificité de la mère qui accouche. Nous parlons beaucoup de droit : permettez-moi une parenthèse du côté de la poésie.
Dans l'édition du journal Le Monde publiée le 9 septembre dernier à 17 heures figurait un article tout à fait formidable intitulé : « Au commencement était le verbe — Retour sur l'épopée de la voix humaine ». Comme ce titre m'intriguait, je l'ai lu. Je vous en cite une phrase : « La voix de la mère se grave dans la matière molle du cerveau à partir du sixième mois de vie utérine : ce sceau indélébile servira d'empreinte à l'enfant. »
Je veux par là mettre en exergue le fait qu'il existe une spécificité de la maternité, de l'enfantement et de l'engendrement : si un tel constat ne conduit pas à une hiérarchie, il exprime la singularité de celle-ci.
Dès lors que vous gommez cette même singularité, vous fondez la filiation sur la volonté : or c'est à partir de là que les choses peuvent partir en vrille, par crainte de la gestation pour autrui. Dès lors en effet que vous fondez la filiation sur la volonté, la volonté d'une femme appellera certainement celle d'un homme.