Intervention de François Héran

Réunion du mardi 17 septembre 2019 à 17h00
Commission des affaires étrangères

François Héran, professeur au Collège de France, titulaire de la chaire migrations et sociétés :

Je suis très honoré par cette invitation et très heureux de voir que la commission juge utile de s'adresser aux chercheurs pour nourrir sa réflexion. Je vous ai communiqué une version imprimée du diaporama que je vais commenter et qui est très nourri. Mon exposé sera forcément cursif, mais les données resteront en votre possession et je serai toujours à votre disposition pour les éclairer par la suite, si elles vous intriguent.

Je vais commencer par un très bref panorama mondial de la migration internationale dans le monde. Il y a à peu près 260 millions de personnes qui, nées dans un pays, vivent durablement dans un autre pays, au moins pour une durée d'un an. Les chiffres portent sur l'année 2015-2016. 260 millions de personnes, ce sont 3,5 % de la population mondiale. C'est peu, mais cela s'explique de deux façons. D'abord, les géants démographiques (la Chine, l'Inde, les États-Unis, le Nigéria, le Brésil) émigrent très peu. Nous sommes frappés par la diaspora chinoise, évidemment, mais en réalité, ce n'est même pas 1 % de la population chinoise qui vit à l'étranger. Les géants démographiques font baisser la moyenne mondiale, mais vous avez également des pays de petite taille, en pleine croissance démographique, qui migrent peu. Ce sont des pays enclavés comme le Niger, le Tchad, le Mali qui émigrent en réalité très peu, comptent une très faible proportion d'émigrants, parce qu'il ne suffit pas d'avoir des aspirations à migrer, il faut avoir les moyens de ses aspirations et ces pays sont trop pauvres pour que la migration puisse vraiment décoller. Une comparaison est assez intéressante à faire. Si vous prenez les pays des Balkans ex-communistes comme la Roumanie, la Bulgarie, le Kosovo, la Serbie, etc., 22 % de la population de ces pays vit à l'étranger. C'est un taux d'immigration énorme, l'un des plus élevés au monde. En Afrique subsaharienne, ce sont environ 2 %. Évidemment, nous parlons beaucoup plus du second cas que du premier.

Je ne vais pas détailler cette diapositive, mais vous voyez le chiffre de 42 millions. Il y a beaucoup de migrations à l'intérieur de l'Europe, d'un pays à l'autre au sein de l'Europe, de l'Europe du Sud à l'Europe du Nord, de l'Europe de l'Est à l'Europe de l'Ouest. Tout cela est connu. Là, vous avez la péninsule indienne d'où l'on migre vers les pays du Golfe et qui pèse lourd. L'Afrique a également une forte migration interne. Songez par exemple qu'un million et demi de Burkinabés sont en Côte d'Ivoire. Lorsque vous regardez les migrations intercontinentales, les plus importantes sont celles des Latinos en Amérique du Nord et des Africains en Europe. Le Maghreb pèse beaucoup là-dedans, avec 10 millions de migrants. Finalement, il y a très peu de migrations allant du Nord vers le Sud. On dit souvent que les migrations du Sud vers le Nord sont très importantes, mais il faut bien voir que dans ce mouvement, vous avez beaucoup de migrations asiatiques vers les pays du Golfe.

Ce schéma est un peu compliqué, je m'en excuse, mais il illustre une réalité assez fondamentale. Contrairement à ce que l'on imagine, ce ne sont pas les pays les plus pauvres qui migrent vers les pays les plus riches, ce ne sont pas les pays les plus féconds qui migrent vers les pays les moins féconds, ce ne sont pas les pays les plus frappés par les difficultés climatiques et la sécheresse qui migrent vers les pays tempérés, etc. Toutes ces images naturelles, ces métaphores du déversement naturel d'une classe de pays vers une autre sont complétement démenties par la structure de l'immigration mondiale, lorsque l'on prend la peine de les étudier. Je citais les Balkans et c'est l'une des zones du monde les moins fécondes, ce qui ne l'empêche pas de migrer vers des pays plus féconds que les Balkans. C'est donc une inversion du schéma classique.

Cette nouvelle diapositive concerne l'indicateur du développement humain, que j'ai résumé en une échelle à dix barreaux. À gauche, ce sont les pays d'origine et, à droite, les pays de destination. En bas du graphique, vous avez les pays pauvres qui migrent vers d'autres pays pauvres, ceux qui sont au plus bas de l'échelle du développement. Évidemment, il y a beaucoup de pays d'Afrique subsaharienne. Leurs principales destinations migratoires sont d'autres pays en développement. Si les pays les plus pauvres devaient migrer vers les pays les plus riches, ils devraient se retrouver dans la partie droite. Si les pays les plus pauvres devaient migrer vers les pays les plus riches, c'est toute cette zone qui devrait être surchargée, mais ce n'est pas le cas. En réalité, les zones les plus chargées sont les pays les plus riches qui sont au niveau dix du développement. La France est au niveau neuf, mais, dans cet ensemble, vous avez l'Allemagne, la Grande-Bretagne, les États-Unis, etc. Ils attirent essentiellement des ressortissants de pays qui sont dans un niveau de développement moyen. Les pays qui migrent le plus au monde, ce ne sont pas le Tchad, le Niger, etc., ce sont le Mexique, la Turquie, les pays des Balkans. Ce sont des pays situés au niveau cinq ou six de l'échelle du développement. Vous avez également des pays qui sont au niveau quatre, ceux de la péninsule indienne qui vont vers les pays du Golfe qui sont au niveau huit ou neuf. Il y a énormément de mouvements dont on parle très peu, mais qui sont considérables, par exemple les républiques d'Asie centrale qui migrent vers la Russie, etc.

Tout à fait en haut du schéma, vous voyez que beaucoup de migrations vont d'un pays riche à un pays riche, d'un pays développé à un pays développé. Ce sont des mouvements extrêmement importants. On entend parfois dire que les hautes pressions démographiques vont nécessairement susciter des mouvements vers les basses pressions démographiques. Cela n'a pas plus de valeur que les métaphores que j'ai déjà utilisées. Tout cela est contredit par les faits. Ce n'est pas la misère du monde qui migre fondamentalement, c'est une sorte de développement émergeant de richesses émergentes.

Regardons l'évolution de la migration en France depuis les années 1920. À chaque guerre ou grande crise, la migration recule. Pour être résolues, les crises et les guerres ont besoin de faire appel à la migration. Nous retrouvons donc une reprise après chaque guerre, mais il y a une tendance générale à l'augmentation liée à une tendance à pousser la migration à laquelle vous avez fait allusion tout à l'heure. Ce qui est très frappant est que l'augmentation très nette du pourcentage et du nombre absolu depuis les années 2000 n'a absolument rien à voir avec les tournants politiques. Tout cela est relativement indépendant des changements politiques. Je suis désolé de devoir vous le dire ici, mais il y a une surestimation formidable par le politique de son pouvoir à contrôler, organiser ou freiner des lames de fond d'une telle ampleur. Je crois qu'il faut en avoir conscience.

Enfin, je termine ce panorama avec la composition par origine des migrants. Nous recensons les nationalités depuis 1951. Nous avons sauté 1956, mais, depuis, à tous les recensements, la nationalité est identifiée. Nous avons également des données sur les personnes naturalisées. Ici, c'est l'ensemble de ce que l'on appelle la première génération. Ce sont les personnes qui sont vraiment nées à l'étranger, ont franchi la frontière et se sont installées chez nous. Bien sûr, la composition change. Au début, nous faisions appel aux voisins, c'est-à-dire aux Belges et aux Italiens. Après la première guerre mondiale, pour la première fois, nous avons fait appel à des personnes beaucoup plus lointaines : les Polonais, que nous avons essentiellement recrutés pour nos mines. Ensuite, viennent les Maghrébins, que nous avons essayé de compenser par des Portugais et des Espagnols. C'est ce qui s'est passé. Bien sûr, cela s'est diversifié, avec l'apparition des Asiatiques et des Subsahariens. Évidemment, cela frappe les esprits. Quand vous regardez ce qui se passe au bilan 2014, ce sont environ 43 % ou 44 % de la migration qui sont d'origine de pays asiatiques ou africains, alors qu'en 1975, c'était la migration ibérique qui dominait. Depuis qu'elle s'est tarie, la part des populations d'origine africaine a augmenté. Cela frappe les esprits, parce que c'est visible.

Je vais essayer de dresser un bilan national de la politique migratoire, en l'étendant à des comparaisons internationales. Pour cela, je vais partir de l'analyse des titres de séjour. Depuis 2005, année après année, voilà l'évolution des différents titres de séjour, tels qu'ils sont connus par le fichier application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF). Je rappelle que ce fichier AGDREF n'est exploitable que depuis 1995 ou 1998. Ce qui augmente le plus, ce sont les étudiants. Les étudiants sont-ils vraiment des immigrés ? Selon la dernière source disponible, à savoir une enquête du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS), un tiers des étudiants envisage de repartir dans son pays, un tiers envisage de rester et le tiers restant ne sait pas. En gros, c'est la situation de l'immigration estudiantine. À partir du moment où ils ont un titre de séjour d'au moins un an, les démographes les enregistrent dans cette rubrique. Je voudrais signaler que c'est de loin la plus forte augmentation observée en France, mais c'est également vrai au niveau mondial. Le courant qui a le plus augmenté dans le monde depuis vingt-cinq ans est la migration des étudiants internationaux. Nous accueillons en ce moment 80 000 étudiants chaque année, ce qui paraît beaucoup, mais la Grande-Bretagne en accueille quatre fois plus. Environ 250 000 nouveaux étudiants y arrivent ainsi chaque année Bretagne. Nous essayons d'être dans la compétition internationale, mais il faut rivaliser avec les universités britanniques extrêmement réputées et ce n'est pas facile. L'offensive menée récemment pour limiter leur nombre grâce à la hausse des frais d'inscription va surtout retentir sur les étudiants de la francophonie.

Il faut que j'en parle, puisque nous sommes à la commission des affaires étrangères. Je sais que l'agence Campus France s'inquiète de cette évolution, parce que ce sont les universités chinoises, saoudiennes ou du Golfe qui essaient en ce moment de recruter des étudiants africains, la France étant de plus en plus réticente à les retenir. C'est un problème. Est-ce le résultat recherché ? Voulons-nous que les étudiants francophones aillent faire leurs études en Arabie saoudite ? La francophonie et Campus France sont des acteurs de notre politique d'influence et c'est inscrit dans leurs missions. C'est la formulation utilisée. Si la politique migratoire a pour effet d'empêcher les étudiants francophones de venir étudier dans les universités françaises, elle est alors en pleine contradiction avec la politique d'influence, sauf à imaginer une influence à distance, une francophonie de massive open online courses (MOOC) et de Skype. Il y a cette idée de dire : « Ils n'ont qu'à apprendre le français à distance, tout en restant chez eux. » Que veut dire une francophonie qui empêche les francophones de venir en France ?

Regardons maintenant les deux composantes de la migration familiale. Il y a les familles de Français et les familles d'étrangers. C'est extraordinairement stable. Toute une série de lois a essayé de la contrôler, de la contenir et y est parvenue. Tout a été fait et essayé pour accroître les seuils de ressources, les surfaces des logements, les conditions réelles de la vie maritale, etc. C'est donc extraordinairement stable. Là aussi, si j'occultais la chronologie politique indiquée tout à fait en bas du graphique, vous seriez incapables de dire en quoi les différents politiques sont intervenus. Par exemple, il est impossible de tenir un discours consistant à dire que les prédécesseurs du pouvoir en place ont été laxistes sur le sujet, comme je l'ai souvent entendu dire. Cela est complétement démenti par les données. Pourtant, ce discours est extrêmement répandu.

La migration de travail – dont j'ai retiré ici les saisonniers qui reviennent chaque année – est extrêmement réduite en France. C'est l'une des plus basses en Europe. Elle était quasiment interdite depuis 1974 et a été relancée à petites doses par la « loi Sarkozy » de 2006. Je rappelle que l'objectif de l'immigration choisie versus l'immigration subie était de faire en sorte que l'immigration choisie soit au moins aussi importante quantitativement que l'immigration subie. J'ai cité toute une série de textes extrêmement clairs là-dessus. Nous ne nous sommes jamais rapprochés de cet objectif qui était tout simplement inatteignable. Nous le savions déjà à l'époque. Les chercheurs l'ont dit, je l'ai écrit, mais on ne nous écoutait pas. Cela signifie que les politiques sont parfois beaucoup plus irréalistes et angéliques que les chercheurs. Les chercheurs ont un réalisme que l'on sous-estime parfois.

Enfin, dans la catégorie « autres », il y a les migrations de retraite, les visiteurs non autorisés à travailler, une partie seulement de cartes « vie privée et familiale » (VPF), etc. Je n'insiste pas.

Regardons maintenant la décomposition des titres humanitaires. Vous voyez que le nombre d'étrangers malades qui était déjà faible a été réduit par les dispositifs désormais mis en oeuvre par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Bien sûr, les réfugiés, les apatrides et l'asile territorial ont un peu augmenté. C'est la moindre des choses, avec la crise récente, mais nous allons voir qu'en réalité, c'est très faible par rapport à d'autres pays.

Nous en venons au plus compliqué et plus mal compris, à savoir la décomposition de la migration familiale. Sur les 90 000 personnes concernées, le recouvrement familial stricto sensu, ce sont 11 000 ou 12 000 personnes. C'est l'application directe des conventions européennes, mais il y a d'autres catégories et un alignement de l'étranger ou de l'étrangère sur la situation du conjoint, qu'il s'agisse d'un citoyen de l'Union européenne, d'une personne hautement qualifiée ou d'un étranger en situation irrégulière. Le nombre de parents d'enfants scolarisés est très faible. Il y a la fameuse catégorie « vie privée et familiale ». Vous le savez mieux que moi, lorsque les personnes se constituent suffisamment d'attaches avec la France, le texte dit qu'il serait disproportionné de leur refuser un titre de séjour, sauf à contrevenir aux conventions européennes. Nous avons des observations suivies des personnes se trouvant dans ces situations. Les personnes que l'on qualifie de sans-papier passent leur temps à accumuler des papiers. Comme le dit Fellag : « Je suis un clandestin officiel. » Ce sont des preuves de présence professionnelles, éducatives, résidentielles, médicales, associatives, etc. Certains chercheurs ont suivi ces personnes pendant une dizaine d'années et montrent exactement comment tel ou tel article de loi qui a été voté retentit sur leur vie quotidienne. Le résultat est que ces titres, que l'on pourrait croire être attribués en 2015, 2016, 2017, 2018, sont attribués à des personnes qui sont en réalité là depuis fort longtemps. Finalement, on les a fait attendre, patienter. Elles sont passées d'un guichet à l'autre. Deux pays au monde utilisent cette technique de faire du regroupement familial une modalité de la régularisation, ce sont les États-Unis et la France. Les autres pays accordent beaucoup plus directement et rapidement des visas de travail, humanitaires, etc., sans passer par la cascade possible des regroupements familiaux.

Je passe à un tableau très important, que nous devons à l'OCDE, mais que j'ai mis en graphique. C'est la façon dont se répartissent les titres de séjour à travers les pays de l'OCDE. C'est le résultat des politiques migratoires. Il existe plusieurs systèmes.

Tout à fait en haut, c'est le système d'immigration choisie, avec des pays ultrapériphériques : Canada, Australie et Nouvelle-Zélande. Ils sélectionnent directement leurs travailleurs, prennent aussitôt la famille qui va avec et cette migration choisie représente plus de la moitié du total. Ils utilisent le regroupement familial et il y a un peu de migration humanitaire.

En Suède, c'est une migration de type fortement humanitaire. Le pays est la championne du monde de l'accueil humanitaire pour les titres délivrés en 2015.

L'un des intérêts de ce schéma est d'avoir intégré le nombre de personnes résidant dans un pays au titre de la libre circulation. Vous voyez que, dans les pays germanophones, à savoir l'Allemagne, l'Autriche, mais également le Royaume-Uni avant le Brexit, deux tiers des nouveaux résidents étrangers viennent d'autres pays de l'Union européenne. Cela montre l'attractivité de ces pays pour les autres citoyens de l'Union. En regard, la France est deux fois moins attractive. Un seul tiers de nos nouveaux résidents vient des autres pays européens. C'est une grande question politique qui n'est jamais abordée : pourquoi sommes-nous deux fois moins attractifs que l'Allemagne ? Bien sûr, il y a la position géographique, mais la Grande-Bretagne est encore plus périphérique que nous par rapport à l'Europe centrale. C'est une vraie question et je crois qu'elle peut vous intéresser. Bien sûr, il y a l'économie, mais pas seulement.

Le problème est que tous ces pays ont des tailles très différentes. Regardons exactement les mêmes données, mais en donnant à chaque bande une épaisseur proportionnelle au nombre de migrants. Nous aurons ainsi une idée beaucoup plus nette et les surfaces vont devenir significatives. Dans la seule année 2015, 680 000 personnes de par le monde sont entrées aux États-Unis au titre du regroupement familial. En France, ce sont 104 000 personnes. Nous sommes champions d'Europe du regroupement familial, mais à cause des techniques juridiques que nous utilisons, dont j'ai parlé tout à l'heure. Vous voyez que, dès 2015, l'Allemagne accorde une importance déjà très forte à l'humanitaire. Quand vous regardez ce qui s'est passé en 2016, avec la crise, vous voyez qu'il y a un changement de comportement très important de certains pays, comme les Pays-Bas ou l'Allemagne. Nous pouvons faire une comparaison directe et voir que les chiffres de la France, eux, n'ont quasiment pas bougé pendant la crise. Nous avons réussi à passer à côté. C'est ce qui s'est passé et je crois qu'il est important de le dire.

Je voudrais insister sur ce diagramme qui rend compte de la situation actuelle : les dernières données portent sur le deuxième trimestre 2019. Depuis janvier 2017, ce sont moins 50 % de demandeurs d'asile pour l'Allemagne et plus 25 % pour la France. À juste titre, les directions de l'OFII et de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) s'inquiètent de cette évolution et tirent la sonnette d'alarme. Il faut replacer cette conjoncture toute récente dans l'évolution des cinq dernières années. Vous voyez ce qui s'est passé dans les dernières années. Ce sont des chiffres absolus, mais ce qui est très important est d'aller vers des chiffres relatifs, de regarder le nombre de migrants par million d'habitants, en tenant compte de la capacité d'accueil qu'est la taille d'un pays. Par million d'habitants, que s'est-il passé pendant la crise de 2015, 2016 et les années suivantes ? Par rapport à sa population, l'Allemagne a porté la plus forte charge, de très loin, mais, par exemple, un pays comme la Grèce est très au-dessus de la France. Dans la dernière période, la France se situe au niveau de l'Allemagne. À un moment, l'Italie a porté une charge importante, mais c'est retombé à zéro. Le Royaume-Uni a réussi à rester au plancher pendant toute la période.

En introduisant d'autres pays, nous voyons mieux ce qui s'est passé. La Suède, l'Autriche, les Pays-Bas avaient répondu aux appels du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) avant août 2015. Je signale au passage que la fameuse déclaration d'Angela Merkel en août 2015 n'a pas ouvert les vannes ni créé un soudain mouvement d'entrée d'émigrants. Le mouvement avait déjà commencé bien avant elle. Le mouvement a commencé et s'est poursuivi avec la même intensité. Elle a simplement validé et conforté un mouvement qui existait déjà. On voit que l'accord de l'Allemagne et de l'Union européenne avec la Turquie fait chuter tout cela. Actuellement, proportionnellement, le plus lourd fardeau retombe sur les pays exposés à l'est de la Méditerranée, à savoir Chypre, Malte ou la Grèce.

Voici les mêmes comparaisons pour les décisions positives d'asile. Ce que je vous ai montré était la demande d'asile. J'introduis maintenant les décisions positives en première et seconde instances. En faisant l'effort de rapporter cela au nombre d'habitants, en prenant l'ensemble des années, la France se situe à peu près au onzième rang. Elle était au dix-septième rang en 2016 et est remontée un peu à cause de l'évolution récente. Je signale avec des croix rouges tous les pays anciennement communistes qui restent totalement à l'écart. Ce n'est pas seulement la Hongrie, dont nous parlons beaucoup. Tous les autres font pareil, excepté la Bulgarie qui est exposée et se trouve en première ligne.

Pour terminer, je prends en compte non seulement la population du pays, mais également sa richesse, le produit intérieur brut (PIB) réel par habitant. Évidemment, au sommet du tableau, il y a la Norvège, l'Allemagne, l'Autriche, des pays riches. C'est la façon dont se classent tous les pays compte tenu de leur richesse, mais également de leur population. La France est au seizième ou dix-septième rang en Europe. Nous ne sommes pas parmi les pays les plus généreux d'Europe en matière d'asile, contrairement à ce que j'entends très régulièrement. Il y a un décalage total entre les perceptions, les déclarations, les discours et la réalité.

La réalité est que tous ces chiffres sont le résultat des décisions prises par les ministres des affaires étrangères qui ont demandé à tous les pays européens, il y a déjà une douzaine d'années, de livrer le plus tôt possible les meilleures statistiques sur ces données. C'est un décret de 2007. J'applique ce décret, je n'ai rien inventé. Je n'ai fait que vous livrer des données publiées, en rapportant cela à la population et à la richesse, ce qui est un exercice assez facile.

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