Nous avons eu ce débat lors des auditions et au moment de l'examen du texte en commission. Vous parlez, ma chère collègue, du droit au respect de la vie privée du donneur, mais il existe aussi un droit à l'identité pour les enfants issus d'une IAD. Ces sujets ont déjà été longuement débattus devant la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l'homme.
Le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l'homme ont fait converger leurs décisions. Le Conseil constitutionnel, d'abord incertain de la manière de trancher la question, a fait un premier pas au sujet des accouchements dans le secret – dont il a été question tout à l'heure – , consacrant l'idée qu'il était d'un intérêt vital pour un enfant d'avoir accès au récit de ses origines.
Puis la Cour européenne des droits de l'homme, saisie de la question, a affirmé que le droit au respect de la vie privée est un droit fondamental, mais non un droit absolu : c'est un droit relatif, qui peut être concilié avec d'autres intérêts en présence. Or, dans le conflit entre les intérêts du donneur et ceux de l'enfant, c'est exactement le même droit au respect de la vie privée, qui fait l'objet de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, qui est en jeu pour chacune des parties. Il y a donc un équilibre à trouver entre les deux.
Or c'est précisément à cet équilibre que parvient le texte, en distinguant deux situations.
D'une part, à l'avenir, les donneurs consentiront dès l'origine, au moment où ils viennent donner, à permettre l'accès aux informations non identifiantes et identifiantes ; aucune atteinte ne sera donc portée au respect de leur vie privée, puisqu'ils auront choisi, étant libres de ne pas donner s'ils n'acceptent pas ces dispositions.
D'autre part, il y a les situations antérieures. En la matière, et puisque différents régimes coexistaient, l'un antérieur à 1994, l'autre postérieur, il n'y aura pas – la ministre l'a souligné et le texte le dit très clairement – de rappel systématique ni d'accès automatique aux informations. En revanche, des donneurs pourront se manifester volontairement, auquel cas on peut raisonnablement supposer qu'il n'y aura pas non plus atteinte au respect de leur vie privée et familiale. Nous pourrions aussi envisager – nous y reviendrons – que la question leur soit posée dans certains cas, toujours sans porter atteinte à ce principe, qui restera notre ligne rouge.
Il n'y a donc aucun risque d'atteinte au respect de la vie privée avec ce texte, qui ménage un excellent équilibre entre les enjeux en présence.