… journaliste, chef d'entreprise ou citoyen beaucoup plus anonyme, peut être identifié et retrouvé. Et je ne vois pas ce que cela a de drôle, mon cher collègue, parce que cet article, dans sa rédaction actuelle, préempte l'avenir de quelqu'un qui a décidé, à un moment de sa vie, d'être généreux, mais qui peut très bien, par la suite, ne plus être en situation d'assumer les conséquences de son don.
Deuxièmement, est-on sûr que cette confrontation, qui peut ne pas être souhaitée par le donneur ou la donneuse mais ne pourra être évitée si l'enfant la souhaite, va bien se passer ? Est-on sûr qu'elle fera du bien, d'une part à l'enfant, d'autre part au donneur ? Je pense que l'on est imprudent.
Mme la rapporteure évoquait le parfait équilibre de l'article 3, mais une disposition vraiment équilibrée exigerait que les deux soient consentants. Ce serait mieux pour l'équilibre psychologique de l'enfant né du don comme pour celui de la personne qui a donné. Je ne comprends pas pourquoi vous n'acceptez pas cet équilibre-là.
Il est discutable que l'on demande le consentement du donneur a priori, mais pourquoi pas. En revanche, il me paraît évident qu'il faut demander la confirmation du consentement initial, en fonction de ce que le donneur est devenu. Ce serait respectueux des deux parties, y compris de l'enfant devenu adulte qui veut retrouver ses origines et peut avoir une mauvaise surprise si le donneur ou la donneuse lui dit : « Tu n'es absolument rien pour moi. » Cet amendement rétablirait l'équilibre en faisant en sorte que l'on demande au donneur, avant qu'il se retrouve éventuellement en face de l'enfant né de son don, de confirmer qu'il est toujours prêt à assumer la rencontre.
Sinon, madame la ministre, trouvez un dispositif qui permette d'empêcher une rencontre non voulue. Car une telle rencontre peut être terriblement destructrice, pour l'un comme pour l'autre, quand bien même aucun des deux ne le souhaiterait. Or le dispositif que nous nous apprêtons à créer ne permettra pas d'éviter cela.
Vous supposez que, d'ici vingt ans, beaucoup de choses se seront passées. Certes, plusieurs législatures auront eu l'occasion de changer la loi, mais ce n'est pas une raison pour ne pas s'inquiéter des conséquences, éventuellement graves, de ce texte.
Madame la rapporteure, vous dites que ceux qui auront fait un don avant l'application du présent texte auront la faculté de donner leur consentement. Cette faculté devenant une obligation pour les donneurs suivants, soit le nombre de dons diminuera – assumons-en alors les conséquences – , soit les donneurs seront exposés au risque que j'ai évoqué.
En tout cas, pourquoi assurer une protection aux donneurs d'hier et d'aujourd'hui, en leur demandant leur accord vingt ou trente ans plus tard, et refuser cette même protection aux donneurs de demain ? Pourquoi ces derniers n'auraient-ils pas, eux aussi, le droit de dire « oui, je suis d'accord pour révéler mon identité » ou « non, je ne suis plus d'accord, parce que ma vie a changé » ?