Madame la garde des sceaux, il est très peu probable, à la vérité, que nous tombions d'accord sur cet article, qui cristallise tout ce que nous réprouvons dans ce texte.
Ce que nous essayons simplement de vous expliquer, c'est qu'un enfant ne se construit pas sur ce que vous avez appelé « une certitude juridique » quant à l'identité de ses parents, dont on aura décidé artificiellement. Il est, dans la construction d'un enfant, des choses plus importantes que la dimension juridique. Nous ne saurions les occulter dans cet hémicycle, où nous ne pouvons pas nous contenter de voter la loi sur la base de considérations législatives et juridiques.
Dans la construction de son identité, l'enfant cherchera à savoir qui est son père. Le fait de l'en avoir complètement coupé pourrait même, dans le futur, le pousser à rechercher qui il est. Dès lors que ces cas ne seront plus entre nos mains mais entre celles des juges, notamment de ceux de la CEDH – la Cour européenne des droits de l'homme – , à quelles situations nous trouverons-nous confrontés ? À des familles triparentales. Peut-être à des conflits de succession sans fin. On ouvre là une boîte de Pandore, et on crée davantage de problèmes que l'on apporte de solutions.
Vous comprendrez donc que, si nous nous opposons résolument sur ce sujet, c'est non pas parce que nous sommes attachés à un modèle de société qui n'aurait plus lieu d'être, selon ceux qui aimeraient en effacer tous les repères, mais parce que l'enfant a des droits, lesquels doivent prévaloir sur les désirs d'enfant des parents.