C'est un honneur pour moi de m'exprimer aujourd'hui, en tant que vice-présidente de la commission des affaires européennes et membre de l'Assemblée parlementaire franco-allemande, sur le projet de loi autorisant la ratification du traité sur la coopération et l'intégration franco-allemandes, le traité d'Aix-la-Chapelle.
Cinquante-six ans après la signature du traité de l'Élysée, et trente-cinq ans après la poignée de main entre le président François Mitterrand et le chancelier Helmut Kohl, l'Assemblée parlementaire franco-allemande tenait, la semaine dernière à Berlin, sa seconde séance publique. À cette occasion, nous avons adopté unanimement son règlement. Notre premier vote a porté sur l'adoption de la résolution relative à la ratification du traité d'Aix-la-Chapelle, sur laquelle nous nous prononçons aujourd'hui.
Par notre vote, nous consacrerons l'aboutissement d'une nouvelle dimension de la coopération tant gouvernementale que parlementaire. Nous mettrons concrètement en oeuvre le partenariat nouveau que le Président de la République a proposé à nos amis allemands dans son discours de la Sorbonne. Cette dynamique, entamée avec la signature du traité d'Aix-la-Chapelle et l'accord parlementaire franco-allemand en début d'année, reflète bien notre volonté de renouveler et de renforcer le fondement de notre coopération. Il s'agit pour nous de rendre l'amitié entre nos peuples toujours plus concrète et plus visible pour nos citoyens.
Cette coopération franco-allemande présentera plusieurs intérêts. D'abord, la coopération sera renforcée sur les sujets qui concernent spécifiquement la France et l'Allemagne. Je donnerai à cet égard quelques exemples concrets.
Premièrement, les deux États institueront un fonds citoyen commun destiné à soutenir les projets conjoints de la société civile – M. Clément vient de l'évoquer. C'est aussi par le renforcement de jumelages et la mise en oeuvre d'initiatives citoyennes que nous réussirons à perpétuer l'amitié des peuples. Nous devons reconnaître, encourager et approfondir la coopération décentralisée entre communes, régions et Länder.
Deuxièmement, la coopération culturelle tiendra une place décisive dans le travail commun à venir. Au-delà de la création d'un espace culturel et médiatique commun, nous développerons davantage encore la mobilité et les programmes d'échange entre nos pays, tout comme l'apprentissage mutuel de la langue de l'autre. Je ne mentionnerai jamais assez les efforts accomplis en ce sens par l'Office franco-allemand pour la jeunesse.
Nous avons aussi à renforcer la capacité à convaincre au-delà du couple franco-allemand. Notre collaboration sera d'abord fondée sur des points de convergence permettant à la France et à l'Allemagne de fédérer et d'entraîner leurs partenaires européens sans leur imposer des projets communs. L'exemple le plus pertinent me paraît être notre initiative commune en matière de concurrence. La France et l'Allemagne appellent depuis l'affaire Alstom-Siemens à la création de champions nationaux et européens : elles insistent ensemble sur la nécessité d'adapter en ce sens le droit européen de la concurrence. La possibilité nous sera offerte, après avoir consolidé de façon bilatérale les liens forts qui nous unissent, d'être à l'origine d'un véritable leadership européen et de créer les conditions d'une concertation plus large entre les vingt-sept États membres de l'Union européenne.
Enfin, notre coopération accrue doit nous permettre de dialoguer davantage et d'avancer, y compris sur les sujets de divergence. Le Président Macron a déclaré, dans son discours de la Sorbonne, à propos de la coopération franco-allemande : « Nous ne serons pas d'accord sur tout, ou pas tout de suite, mais nous discuterons de tout. » La concertation est une force, surtout sur des points sur lesquels nos positions ne sont pas alignées. La France et l'Allemagne peuvent ainsi renforcer leur capacité à travailler ensemble sur des sujets sensibles sur lesquels elles ne partagent pas toujours le même point de vue.
Permettez-moi aussi d'évoquer la question des Balkans occidentaux, qui m'est chère et qui fait l'objet d'une approche différente de la part de nos partenaires : alors que nous reconnaissons tous combien il est important d'offrir une perspective européenne à cette région, pour la préserver de l'influence des États non européens, nous ne sommes pas encore parvenus à nous mettre d'accord pour y arriver. La coopération que nous souhaitons renforcer grâce à la ratification de ce traité doit donc constituer un outil qui nous permettra de nous entendre sur de tels sujets. La coopération parlementaire y trouve d'ailleurs toute sa place, que ce soit par le travail de nos commissions compétentes respectives – les commissions des affaires étrangères du Bundestag et de l'Assemblée nationale – ou par le travail de la nouvelle Assemblée parlementaire franco-allemande.
Ces différentes raisons que j'ai exposées me conduisent naturellement à vous inviter, mes chers collègues, à voter en faveur de l'autorisation de la ratification du traité entre la République française et la République fédérale d'Allemagne sur la coopération et l'intégration franco-allemandes signé à Aix-la-Chapelle le 22 janvier 2019.