Intervention de Pierre-Henri Dumont

Séance en hémicycle du lundi 7 octobre 2019 à 16h00
Déclaration du gouvernement suivie d'un débat sur la politique migratoire de la france et de l'europe

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Henri Dumont :

Plus de deux ans après son élection, le Président de la République n'a toujours pas répondu à cette simple question : veut-il plus ou moins d'immigration en France ? Il n'y répond pas, et son gouvernement non plus, tout simplement car ils sont incapables de définir une politique migratoire efficace pour notre pays. Ils ne le veulent pas, car imposer le débat migratoire à la société, d'une part, et ne rien faire pour diminuer l'immigration en France, d'autre part, demeure la seule garantie pour la majorité d'affronter l'extrême droite au second tour de la prochaine élection, et donc de se maintenir au pouvoir.

Ce détestable cynisme politique a un coût. Celui-ci est payé par les citoyens de Calais, de Paris, de Nantes et de Mayotte – tous ceux qui subissent au quotidien les affres de votre impuissance. Par manque de courage politique, vous avez réussi l'exploit de remettre en cause le caractère sacré de l'asile politique, forgé par les siècles d'histoire de France, gravé dans le marbre de la Constitution, en en faisant le seul paravent de votre incurie migratoire. Oubliés l'explosion du nombre de clandestins, les dérives de l'AME, le regroupement familial, la haine de certains immigrés de deuxième ou troisième génération pour notre pays. Pour vous, le problème migratoire se résumait à l'asile. Vous en avez d'ailleurs fait une loi, qui n'a rien changé puisque les délais d'instruction des demandes restent les mêmes. Pire, pendant trois mois, vous avez laissé l'OFPRA sans direction.

Même si je réfute la thèse du petit bout de la lorgnette migratoire, je vais venir sur votre terrain. Dès 2017, je vous interrogeais sur le détournement du droit d'asile. L'année dernière, 123 625 étrangers ont enregistré une demande d'asile en France – une hausse de 22 % par rapport à l'année précédente. L'année 2019 verra une augmentation de 10 % de ces demandes par rapport au plus haut historique de 2018, alors même que, partout ailleurs en Europe, les arrivées et les demandes diminuent. Oui, le système d'asile français est malade, non à cause de l'explosion des demandes, mais en raison de votre incapacité à le réformer, vous qui préférez subir plutôt qu'agir. De façon constante, deux tiers des demandeurs d'asile sont déboutés de leur demande, c'est-à-dire que la protection de la France leur est refusée. Sur ces 90 000 déboutés, 90 % se maintiennent en France, transformant l'asile en voie d'entrée dans la clandestinité.

La réalité, c'est que vous avez renoncé à renvoyer les déboutés du droit d'asile dans leur pays. En 2018, les éloignements furent en diminution de 20 % par rapport à 2012, et les obligations de quitter le territoire français, exécutées à hauteur de 12 % des mesures prononcées. Pire encore, le nombre d'éloignements forcés baisse de 30 % entre 2018 et 2019. Votre renoncement à expulser les déboutés est tel que vous avez amputé le budget 2020 de lutte contre l'immigration irrégulière de 10 %, soit 14 millions d'euros en moins. Comme vous n'expulsez pas, les étrangers qui n'ont pas été protégés continuent de squatter les places des vrais demandeurs d'asile dans les centres gérés par l'État, poussant les demandeurs d'asile sous les ponts et les tentes, les jetant dans les mains des passeurs et des réseaux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.