Intervention de Aurélien Pradié

Réunion du mercredi 2 octobre 2019 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélien Pradié, rapporteur :

Vous abordez un sujet capital. Nous sommes les héritiers de la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. Elle a confié au juge aux affaires familiales, un juge civil, les ordonnances de protection. Nous avons réfléchi à cette question au moment de l'élaboration de notre proposition de loi et nous avons envisagé deux solutions. Soit nous faisions fi de la loi de 2010 et nous remettions le juge pénal au centre du jeu, soit nous renforcions les pouvoirs du juge aux affaires familiales en étoffant l'ordonnance de protection. Nous avons fait le second choix pour deux raisons. Tout d'abord, il nous semble que c'est la meilleure façon d'avancer sur le sujet. Ensuite, le juge aux affaires familiales a aujourd'hui un certain nombre de prérogatives au sein desquelles peut s'inscrire le bracelet anti-rapprochement. Et cela n'exclut pas, en pré-sentenciel et en sentenciel, l'intervention du parquet.

Vous avez raison de dire qu'il faut créer des ponts entre le juge aux affaires familiales et le parquet et nous le faisons à travers deux mesures.

Premièrement, nous faisons sauter un verrou important. Aujourd'hui, le ministère public n'est informé de la délivrance d'une ordonnance de protection que lorsque le couple a des enfants. Or, nous systématisons cette transmission : toutes les ordonnances devront désormais être transmises. Nous n'avons pas réussi à avoir des statistiques sur ce point, mais il semble que les affaires qui ont fait l'objet d'une ordonnance de protection ne soient pas forcément suivies d'une procédure pénale, ce qui est tout de même problématique.

Deuxièmement, le juge civil ne pourra appliquer le bracelet anti-rapprochement qu'avec le consentement de l'auteur présumé des violences. S'il refuse, le dossier sera transmis au parquet qui, lui, est doté des pouvoirs coercitifs que vous évoquiez, pour garantir la protection de la victime. Je veux insister sur l'importance de ce deuxième pont entre civil et pénal.

Nous prenons appui sur l'architecture de 2010 qui, selon moi, peut être opérationnelle. Mais si vous voulez le fond de ma pensée, les législateurs à notre place dans quelques années créeront des tribunaux spécialisés, ce qui réglera à la fois la question de la porte d'entrée et celle du cloisonnement. Ce sera une autre étape. À titre personnel, j'y suis intellectuellement prêt, mais je ne suis pas certain que ce soit le cas des Français et de la Chancellerie.

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