Intervention de Guillaume Vuilletet

Séance en hémicycle du jeudi 10 octobre 2019 à 9h00
Violences au sein de la famille — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Vuilletet :

Comme Sophie Auconie, nous aurions tous voulu être à l'origine de cette proposition de loi, mais ce n'est pas bien grave car, en réalité, nous la défendons tous au côté de notre collègue Aurélien Pradié, dont le travail a été remarquable aussi parce qu'il a su y associer l'ensemble des groupes. Ainsi est-on parvenu, après un examen fructueux en commission, à un texte que nous aurons su doter d'un sens profond et qui, je l'espère, sera voté à l'unanimité.

Peut-être apporterai-je simplement un correctif à l'intervention de notre collègue Pradié. Ce matin, à six heures vingt, j'étais l'invité d'une chaîne de radio et l'animatrice m'a annoncé qu'il y avait non pas cent dix-sept victimes, mais cent dix-huit. Je ne sais pas si c'est le cas. Mais je sais que, malheureusement, ce décès supplémentaire risque fort de survenir bientôt. L'enjeu est bien de mettre un jour fin à ce décompte macabre ; il est aussi de comprendre et de faire comprendre qu'outre ces cent dix-huit féminicides, 220 000 actes de violence sont commis chaque année sur des femmes par leur conjoint, des actes de gravité diverse, mais toujours traumatisants pour les victimes.

Nous sommes dans l'urgence. À chaque moment qui passe, une victime peut succomber. Voilà pourquoi nous examinons aujourd'hui le présent texte – qui aurait pu en être un autre : j'avais moi-même déposé une proposition de loi sur le sujet ; mais peu importe – , pour agir très vite et de façon consensuelle, dans le cadre qui nous est désormais donné, celui du Grenelle des violences conjugales. Il faut accentuer la prise de conscience déjà entamée : nos concitoyens doivent non pas simplement se dire que les violences conjugales, bien sûr, existent, mais aussi considérer que c'est leur affaire, l'affaire de chacun d'entre nous – l'affaire, aussi, de la représentation nationale, car, comme l'a rappelé très justement l'un des orateurs, la loi doit d'abord protéger le faible.

Tout n'est naturellement pas dans la loi, madame la garde des sceaux. À cet égard, vous avez signalé les efforts que vous faites en matière de formation et de « défragmentation » des services – pour reprendre votre terme. Je relève également l'engagement à mener un audit dans les commissariats et les gendarmeries pour mieux comprendre ce qui s'y passe, mieux former, mieux expliquer.

Je veux aussi souligner ce qui existe déjà à titre expérimental. Je pense à une toute petite gendarmerie d'Asnières-sur-Oise – ce n'est pas une grande métropole – où un parcours particulier a été prévu pour que les femmes qui viennent exposer leur malheur ne soient plus obligées de croiser quelqu'un en arrivant ; cela me paraît important.

Le travail de coconstruction et d'élaboration du consensus auquel nous avons participé n'a pu prendre fin que tard hier soir, tant le diable est dans les détails. Mais il va être prolongé par le travail accompli avec le Gouvernement et avec nos collègues du Sénat, lesquels vont achever d'enrichir le texte. Je sais que les mesures qui en sortiront seront utiles et même précieuses.

Je songe évidemment à la simplification de l'ordonnance de protection, qui devrait permettre à celle-ci de trouver un nouvel essor.

Je pense aussi aux mesures relatives au logement, qui sont fondamentales. Dans ce domaine, beaucoup a déjà été fait : la création de 1 000 places d'hébergement pour assurer la mise à l'abri ; l'accès des femmes victimes de violences à la garantie Visale ; les conventions avec le monde HLM ; et, grâce à la loi ELAN – portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique – , la fin de l'absurdité qui voulait qu'une femme continue de payer le logement dont elle était chassée par des violences.

Je pense encore au téléphone grave danger, à l'interdiction future du port d'armes pour les compagnons violents et à la sollicitation des parties au sujet de la garde des enfants.

Je pense bien sûr également au dispositif du bracelet anti-rapprochement. Je manque de temps pour en expliquer toute la pertinence ; disons simplement que, même s'il n'est pas magique, là où il a été mis en oeuvre, en Espagne, il n'y a eu aucun cas de récidive de la part de ceux qui l'ont porté – un peu plus de 1 100 personnes à ce jour. Vous rendez-vous compte qu'aujourd'hui, des femmes sont assassinées alors même que les procédures sont en cours, que leur conjoint a déjà été puni ?

L'effort à accomplir reste considérable. Le Grenelle va continuer de produire ses effets. Je salue à cet égard le travail du groupe La République en marche, qui a aussi lieu sur le terrain, à la rencontre des associations.

Un journaliste m'a demandé un jour si j'étais concerné par le problème, si je l'avais vécu. Je lui ai répondu que là n'était pas la question : l'enjeu est que notre nation dans son ensemble se sente concernée, que chacun de nous éprouve profondément ce sentiment. Nous n'avons pas besoin de l'avoir vécu pour savoir ce que cela veut dire, seulement de regarder autour de nous et d'apporter le soutien de la nation à ceux qui en ont besoin.

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