Il n'y a pas de divergence, madame la garde des sceaux, entre votre opinion et celle que je tente de défendre. Vous êtes garde des sceaux, vous défendez la jurisprudence et vous tenez un discours légitime pour une ministre de la justice. Vous dites que la jurisprudence couvre toutes les situations et qu'il n'est pas nécessaire d'apporter dans la loi la précision que je suggère. Néanmoins, nous avons également, dans cet hémicycle, un devoir de lisibilité et de pédagogie à accomplir. Votre discours est légitime, mais l'est tout autant le souhait des parlementaires de ne pas se satisfaire de la jurisprudence et de mettre en conformité la loi avec celle-ci. Tel est notre objectif collectif, comme le montre le fait que les amendements qui avaient été déposés provenaient de presque tous les bancs. C'est bien la preuve qu'un problème se pose. Il ne me semble pas illégitime que les parlementaires veuillent clarifier la loi et refusent de se satisfaire de la jurisprudence. Voilà le constat initial.
Pour clarifier la pratique et la loi, nous devons régler le problème de l'ancienneté de la relation, que l'amendement de mon collègue Stéphane Peu résout – d'ailleurs, en donnant un avis favorable à cet amendement, madame la garde des sceaux, vous avez bien considéré que l'intervention du législateur était utile – , et celui, tout aussi important, ayant trait à la nature des relations. Le caractère d'ancienneté, tel qu'il est défini, ne se raccroche qu'au concubinage, qui est la forme la plus légère décrite dans le code civil, car il est question d'une relation « continue et stable ». Mais la petite amie passagère ou le petit ami passager n'entrent pas dans le champ de la loi. Je ne souhaite pas alourdir cette dernière de mots inutiles, mais il faut couvrir à la fois l'ancienneté et la nature de la relation.
Voilà pourquoi j'ai déposé, un peu précipitamment, un sous-amendement qui, me semble-t-il, ne pose pas de problème majeur et dont la rédaction pourra évoluer au cours de la navette parlementaire.
On pourrait imaginer que l'utilisation de cette nouvelle expression de « relation de couple » désorganise d'autres normes juridiques, qui ne mentionneraient que le concubinage. Nous avons vérifié ce point : il se trouve qu'il n'existe aucun problème de coordination avec le sous-amendement no 176 . Les occurrences du terme « couple » dans les autres codes législatifs ressortissent aux cas d'expulsion locative, ainsi qu'aux conséquences de certaines dispositions relatives au droit des étrangers. Sur ces deux sujets, on comprend que le concubinage est un préalable.
Autrement dit, pour être très précis, le sous-amendement ne désorganise aucune disposition majeure de notre droit. Il se contente de clarifier l'amendement no 119 . Je souhaite que nous l'adoptions, afin que nous puissions l'améliorer dans le cadre de la navette parlementaire, plutôt que de rejeter brutalement.