Je souhaite saluer le travail de Valérie Boyer sur les violences au sein des couples et leurs incidences sur les enfants. En effet, il s'agit d'un combat qui nous tient tous à coeur : protéger nos enfants dans le cas de violences intrafamiliales. Un enfant qui assiste à des violences conjugales est toujours une victime. De plus, nous savons à quel point l'enfant peut être instrumentalisé par un des parents. L'enfant est témoin à chaque étape de la violence, non seulement lorsqu'elle intervient, mais aussi ultérieurement. Au-delà même d'une décision de justice, l'organisation de la vie de l'enfant demeure parfois pendant des années un nouvel espace d'emprise et de violence.
Il est démontré qu'un enfant traumatisé par des violences conjugales présente davantage de problèmes de santé : retards de croissance, maladies ORL, troubles du sommeil et du comportement. C'est pourquoi des dispositifs judiciaires forts sont nécessaires pour protéger la victime des violences mais aussi l'enfant. Toutefois, les mesures proposées en commission ne semblent pas répondre totalement aux difficultés formulées, notamment en matière de méthode.
S'agissant des articles 1er et 2, est-ce nécessairement en précisant la rédaction de la législation que l'on pourra mieux l'appliquer ? Ce n'est pas sûr. Au contraire, cela peut parfois être contreproductif. Notre code pénal dispose, à propos des violences conjugales : « les violences prévues [… ] sont réprimées quelle que soit leur nature, y compris s'il s'agit de violences psychologiques ». Si l'on peut considérer que cette définition est trop large comparée à celle de l'OMS – l'Organisation mondiale de la santé – ou encore à celle de la convention du Conseil de l'Europe, n'est-elle pas justement gage d'une liberté d'action vertueuse du juge ? Préciser la notion de violence, comme il est proposé aux articles 1er et 2, me paraît donc aventureux : cela revient à enfermer le juge dans sa décision.
Ensuite, je m'accorde avec vous, madame Boyer, pour considérer qu'un conjoint violent est un mauvais parent. Vous l'avez rappelé à juste titre, en 2018, onze enfants sont décédés concomitamment à l'homicide de leur père ou de leur mère, et quatorze enfants ont été tués dans le cadre de violences conjugales sans qu'un parent ne soit tué. Ainsi, retirer l'autorité parentale au parent condamné semble relever du bon sens. Autrement dit, un conjoint violent ne devrait plus avoir le droit de s'approcher de son enfant puisqu'il représente une menace. Mais dans les faits, quelles seraient les conséquences du retrait de l'autorité parentale ? Le parent condamné ne serait plus contraint à aucune obligation financière à l'égard de l'enfant. Ainsi le conjoint victime serait-il doublement pénalisé, de même que l'enfant, puisque le parent violent ne devrait plus verser de pension pour subvenir aux besoins de son enfant. C'est pourquoi il faut veiller à ne pas confondre autorité parentale et droit de visite et d'hébergement. Il me paraîtrait bien plus opportun que le parent condamné se voie enlever ce droit de visite tout en conservant l'obligation légale de subvenir aux besoins de son enfant.
En outre, je partage la volonté d'un suivi plus systématique des auteurs de violences conjugales. En revanche, le fichier évoqué dans la proposition de loi ne semble pas être le bon moyen pour prévenir le renouvellement des infractions et pour ainsi faciliter l'identification des auteurs.
Je n'en salue pas moins, madame la rapporteure, le fait que vous ayez, en commission, largement tenu compte de nos considérations et que vous proposiez donc des amendements allant, selon moi, dans le bon sens. L'objectif est louable et c'est pourquoi je prendrai position à la suite… de prochains débats !