Monsieur le ministre, après bien d'autres dans cette séance, cette ultime question dit la gravité de la situation.
Depuis une semaine, l'armée turque frappe, sans relâche et sans retenue, les populations kurdes, nos alliés dans la bataille contre le terrorisme, avec l'assentiment coupable du président Trump, un président inconstant mais coupable, dont la trahison – des combattants kurdes, des Européens, de l'Alliance atlantique, des démocrates turcs – le dispute au cynisme criminel du président Erdogan.
Des villages, des villes ont été frappés par des bombardements faisant des centaines de morts, de nombreux blessés, ainsi que des dizaines de milliers de déplacés, et provoquant l'arrêt total de l'aide humanitaire. Les témoignages d'exactions de milices supplétives se multiplient et les djihadistes s'évadent des prisons kurdes.
De nombreuses voix s'élèvent. Monsieur le ministre, j'ai écouté votre réponse, et je ne doute pas de votre sincérité, mais je déplore l'extrême faiblesse de l'Union européenne dans cette affaire. Je m'interroge, à dire vrai, sur notre détermination : faisons-nous ce que la situation commande, en particulier s'agissant des populations civiles ? Parce qu'il est de notre devoir aujourd'hui de passer de la désapprobation à l'action avant que le massacre complet des populations civiles kurdes n'advienne ; avant un accrochage avec l'armée syrienne dont nous ne mesurons pas les répercussions ; avant que la Turquie, dans son ensemble, ne sombre dans l'abîme, car tous les Turcs, j'y insiste, ne suivent pas le président dans sa folie nationaliste ; avant que notre sécurité ne soit menacée par le retour des djihadistes – voilà ce qu'il advient lorsqu'on délègue à des régimes instables une justice que l'on devrait exercer soi-même dans le respect des droits de la défense et avec la garantie d'une incarcération durable ; avant que les enfants des djihadistes, français pour certains, à qui nous devons protection, ne soient sacrifiés.
Notre sécurité et notre honneur sont aujourd'hui engagés. Ma question est simple, monsieur le ministre : puisque la diplomatie n'est pas la part faible de la force, pourquoi la France ne s'appuie-t-elle pas sur la résolution 377 (V), « Union pour le maintien de la paix », du 3 novembre 1950 pour surmonter le blocage du Conseil de sécurité en transférant à l'Assemblée générale la question syrienne ?