nous avons perdu, en juillet dernier, une collègue exemplaire, et c'est avec tristesse que je prends aujourd'hui la parole pour évoquer sa mémoire.
La pudeur, la dignité sont les premières qualités qui viennent à l'esprit quand on songe à Patricia Gallerneau.
Son mandat n'aura duré que deux ans, mais ces deux années lui ont suffi pour laisser ici, à l'Assemblée nationale, le souvenir d'une femme d'action et de conviction, toujours vive et toujours aimable, tout entière au service de la collectivité.
Oui, Patricia Gallerneau a tout donné à la République. Sa vie professionnelle d'abord, puisqu'elle fit carrière dans la fonction publique. Sa vie personnelle aussi, puisqu'elle s'engagea dans la vie associative et la vie locale, malgré ses mutations administratives.
Née à Paris, d'un père corrézien et d'une mère originaire du Finistère, elle prit fait et cause pour la Bretagne et la culture bretonne.
À Pornichet d'abord, en Loire-Atlantique, elle fut élue conseillère municipale en 1995. Là elle fit l'apprentissage de la démocratie locale, si exigeante, si chronophage, si ingrate parfois.
En désaccord avec la majorité municipale, elle choisit d'interrompre son mandat : modérée dans ses opinions, elle n'était pas modérément investie dans ses combats et, du moment qu'elle choisit de se battre pour l'écologie dans la presqu'île guérandaise, elle le fit sans faux-semblants.
Plusieurs fois battue, aux élections cantonales de 2004 ou aux législatives de 2002 et de 2007, Patricia Gallerneau savait qu'il faut parfois accepter des campagnes difficiles pour rester en cohérence avec ses idées. Ce qui ne l'empêchait pas de chercher des alliés, des appuis, pour pouvoir exercer des responsabilités et passer à l'action.
En 2015, elle devient conseillère régionale des Pays de la Loire, sur une liste d'union de la droite et du centre. Mais le succès électoral n'entame pas non plus l'indépendance et l'esprit d'ouverture de Patricia Gallerneau qui, derrière François Bayrou, soutient Emmanuel Macron en 2017.
Comme elle l'écrit dans sa profession de foi aux élections législatives, elle a prouvé qu'elle était « capable de travailler avec des personnes de toutes les sensibilités, sans esprit de parti, ni sectarisme ». Elle entend « libérer les énergies en protégeant les individus, au coeur d'une Europe qui protège ».
Réaliste, mais aussi soucieuse de justice sociale et d'équilibre territorial, elle veut combattre la désertification médicale, aider les familles monoparentales, alléger les contraintes administratives, engager la transition écologique et protéger le littoral : autant de causes qui méritent d'être défendues, quels que soient les remèdes, parfois différents, que les uns et les autres nous préconisons ici.
Candidate dans la deuxième circonscription de Vendée, elle s'engage à être une élue à temps plein, une élue de proximité et de rassemblement, pour faire réussir la Vendée et la France.
Élue députée avec près de 60 % des voix, Patricia Gallerneau siège successivement à la commission des finances, à celle des affaires sociales, enfin à la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Son action législative est à son image : intense et généreuse. Dans l'hémicycle, elle prend la parole pour encourager le Gouvernement à réduire la fracture numérique, combattre la surpopulation carcérale, renforcer la formation.
Le 15 janvier dernier encore, elle poussait ici même un cri d'indignation, après avoir vécu l'une de ces attaques, inacceptables, contre les élus de la République : un mur de parpaings avait été érigé devant son domicile familial.
« Acte plus ridicule que grave », commentait-elle avec cette retenue qui lui était propre – mais elle avait aussi été menacée de plastiquage, et c'est pourquoi, monsieur le Premier ministre, elle interrogeait le Gouvernement. « Nous sommes nombreux, dans cette assemblée, à subir de tels abus », rappelait-elle, navrée. Elle qui se définissait comme « une femme de dialogue et une élue de proximité depuis toujours », elle réaffirmait avec force que « le dialogue ne peut et ne pourra exister que dans l'ordre, la concertation, le calme et l'écoute ».
Nous ne le savions pas encore, mais ce fut sa dernière prise de parole dans l'hémicycle, son dernier message, que tous ici, nous devons méditer.
Un autre mur, aujourd'hui, s'est érigé entre elle et nous, et ce mur qui sépare la vie de la mort nous rappelle que, parmi ses combats, celui qu'elle livra contre la maladie fut le plus douloureux.
Malgré la fatigue, malgré les épreuves, Patricia Gallerneau a rempli son mandat, avec vaillance et courage.
Quand la force de siéger a fini par se dérober, elle est venue me voir pour me l'annoncer, avec cette même énergie et cette même lucidité que nous lui connaissions dans l'exercice de ses responsabilités parlementaires, qu'elle assuma jusqu'au bout.
Je veux dire ici toute mon admiration, car je sais qu'elle est partagée, sur tous les bancs de cette assemblée.
L'antiparlementarisme et ses raisonnements simplistes semblent bien dérisoires quand on considère l'engagement, la force de caractère et le sens du devoir qui animaient une élue comme Patricia Gallerneau.
Je garderai toujours en mémoire sa ferveur, son dévouement à l'intérêt général, sa passion du débat et de la politique – son amour de la vie, tout simplement.
Je pense à ses amis et à sa famille, à son époux Marc, à ses enfants, Sylvain, Pierre et Philippe, comme à sa maman. Au nom de tous les députés de l'Assemblée nationale et en mon nom personnel, je leur présente mes condoléances attristées.
J'ai dit que Patricia Gallerneau fut une députée exemplaire. Elle était aussi notre amie et, cruellement, elle nous manque.
La parole est à M. le Premier ministre.