Notre collègue Éric Ciotti a déposé une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la Préfecture de police le jeudi 3 octobre 2019.
Lors de la Conférence des Présidents du 8 octobre dernier, M. Christian Jacob, président du groupe Les Républicains, a indiqué qu'il faisait usage, pour cette proposition, du « droit de tirage » que le deuxième alinéa de l'article 141 du Règlement de l'Assemblée nationale reconnaît à chaque président de groupe d'opposition ou de groupe minoritaire, une fois par session ordinaire.
Par conséquent, et conformément au second alinéa de l'article 140 du Règlement, il revient à la commission des Lois, à laquelle a été renvoyée la présente proposition de résolution, de vérifier si les conditions requises pour la création de la commission d'enquête sont réunies. Il ne nous appartient pas de nous prononcer sur l'opportunité d'une telle création.
De même, la proposition de résolution ne sera pas soumise au vote de l'Assemblée nationale : en effet, en application du deuxième alinéa de l'article 141 précité, la Conférence des Présidents « prend acte de la création de la commission d'enquête » dès lors que cette création répond aux exigences fixées par l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et au chapitre IV de la première partie du titre III du Règlement.
Mon rapport s'est donc concentré sur l'examen des conditions de recevabilité.
En premier lieu, les propositions de résolution tendant à la création de commissions d'enquête « doivent déterminer avec précision soit les faits qui donnent lieu à enquête, soit les services ou entreprises publics dont la commission doit examiner la gestion », en application de l'article 137 du Règlement de l'Assemblée nationale.
En l'occurrence, les faits sur lesquels la commission d'enquête devra se pencher me semblent définis avec une précision suffisante puisqu'elle serait chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de Paris le 3 octobre 2019.
En second lieu, les propositions de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sont recevables sauf si, dans l'année qui précède leur discussion, a eu lieu une mission d'information ayant fait usage des pouvoirs dévolus aux rapporteurs des commissions d'enquête demandés dans le cadre de l'article 145-1 du Règlement ou une commission d'enquête ayant le même objet.
Or ce n'est pas le cas ici, la proposition de résolution visant un évènement dramatique s'étant malheureusement déroulé au cours des derniers jours. La proposition de résolution remplit donc le deuxième critère de recevabilité.
Enfin, en application de l'article 139 du Règlement de l'Assemblée nationale, la proposition de résolution ne peut être mise en discussion si le garde des Sceaux « fait connaître que des poursuites judiciaires sont en cours sur les faits ayant motivé le dépôt de la proposition ». Le troisième alinéa du I de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 prévoit, quant à lui, que la mission d'une commission d'enquête déjà créée « prend fin dès l'ouverture d'une information judiciaire relative aux faits sur lesquels elle est chargée d'enquêter ».
Interrogée par le Président de l'Assemblée nationale conformément au premier alinéa de l'article 139 précité, Mme Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ministre de la Justice, lui a fait savoir, dans un courrier en date du 14 octobre 2019, que le périmètre de la commission d'enquête envisagée était « susceptible de recouvrir pour partie l'enquête judiciaire en cours ». La commission devra donc veiller, tout au long de ses travaux, à ne pas faire porter ses investigations sur des questions relevant de la compétence exclusive de l'autorité judiciaire.
Sous cette réserve, il me semble, mes chers collègues, que la création d'une commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la Préfecture de police le jeudi 3 octobre 2019 est juridiquement recevable.