Mme Panonacle, vous avez évoqué la question du logement intermédiaire, entre l'hébergement d'urgence et le logement pérenne, tout en notant ma volonté d'assumer les deux. Un enquête sur les sorties d'hébergement d'urgence de structures qui accueillaient exclusivement des femmes victimes de violences en 2017 a permis d'établir que 30 % des séjours duraient moins de huit jours ; 48 % entre huit jours et six mois ; et 21 %, plus de six mois. Vous le savez, bien qu'il s'agisse d'un hébergement d'urgence, vous avez parfois la possibilité de rester plusieurs mois dans un CHRS.
Pendant le Grenelle, j'ai pris la décision d'engager mon ministère dans l'action très forte portée par Marlène Schiappa. Avec nos équipes, nous nous sommes demandé quel type d'hébergement nous devions choisir pour les 1 000 places que nous nous engageons à fournir très rapidement. Nous avons finalement décidé d'en consacrer 250 à l'hébergement d'urgence et 750 à l'allocation logement temporaire (ALT). Ce dispositif, en apparence technique, vise à donner une aide pour obtenir un logement durant six mois à un an, voire un peu plus.
Il recouvre donc exactement la vision que vous avez indiquée, celle d'un accompagnement intermédiaire. Nous avons conscience que l'accompagnement prendra davantage de temps que la mise en sécurité, tout en sachant qu'il est très difficile de passer directement de celle-ci au logement durable. Comment trouver la passerelle vers un logement qui ne soit plus un hébergement ? C'est pour répondre à cette question que nous avons fait ce choix de consacrer 250 places à l'hébergement d'urgence et 750 à l'ALT, qui, le plus souvent, concerne en fait des logements du parc social.
S'agissant de votre deuxième point, l'intermédiation locative est, par essence, un logement temporaire, de douze mois en moyenne, bien qu'en réalité, ses bénéficiaires y restent plus longtemps. Quant à l'hébergement dans les pensions de famille, il n'est pas limité dans le temps, ce qui permet d'y accueillir des publics différents.
Vous avez aussi évoqué une initiative dans le bassin d'Arcachon, en vous demandant comment aider les associations à grandir. Nous pourrons en discuter à la suite de cette réunion, avec nos équipes. L'ALT sera-t-elle indiquée, s'agissant de logements sociaux ? L'association pourrait-elle recourir à l'intermédiation locative ou bénéficier du FNAVDL ? Nous devrons étudier la question, car tout dépend des caractéristiques du projet. Comme je le disais précédemment, il faut évidemment partir des initiatives territoriales.
Enfin, vous avez posé une dernière question sur le lien entre intermédiation locative (IML) et garantie Visale. En réalité, si un propriétaire recourt à l'intermédiation locative, il n'a pas besoin d'être contre-garanti par ce dispositif car il traite avec une association qui garantit déjà le paiement des loyers et la remise en état éventuelle du bien. Le système de l'intermédiation assure donc déjà le propriétaire.
M. Gouffier-Cha, vous avez évoqué la dure réalité du quotidien à laquelle nous sommes tous confrontés, pour vous demander comment accélérer l'entrée dans le logement social.
Trois éléments sont nécessaires à mes yeux. D'abord, il faut agir pour passer d'un droit formel à un droit réel. Que le public soit prioritaire depuis 2010 ne suffit pas : il faut mettre en oeuvre la convention signée la semaine dernière avec les bailleurs sociaux, qui vise à identifier les logements pouvant être mis à disposition et à renforcer l'accompagnement.
Deuxièmement, comme je l'évoquais pour l'ALT, il faut donner une réponse de court terme aux difficultés, afin d'établir une passerelle vers une situation plus durable.
Enfin, il faut renforcer le fonds d'accompagnement. Grâce à l'augmentation des financements du FNAVDL, nous nous sommes fixé l'objectif de renforcer le dispositif d'au moins 1 000 accompagnements dans les prochaines années.
Pour répondre à Mme Hai, ce fonds, financé par les bailleurs sociaux et qui réalise non pas un accompagnement des femmes victimes de violences mais un accompagnement général vers et dans le logement social, était doté de 30 millions d'euros jusqu'à présent. Ses crédits seront portés à 45 millions d'euros, soit une augmentation de 50 %. Les bailleurs sociaux continueront de le financer dans le cadre des éléments de négociation que nous avons discutés à l'issue de la clause de revoyure, que certains d'entre vous connaissent bien pour avoir participé aux discussions.
Un dernier point, que j'évoquais à la fin de mon introduction, me semble essentiel. Une coordination totale est absolument nécessaire entre les différentes équipes qui sont les premières au contact des femmes victimes de violences – les associations, évidemment ; les pouvoirs publics, parfois ; les élus locaux ; la police, à coup sûr.
Il y a quelques jours, j'avais délocalisé toutes mes équipes à Clichy-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, pendant une semaine. Nous avons passé la matinée du Grenelle avec les équipes de police du commissariat de la ville, où des travailleurs sociaux réalisent cet accueil des femmes victimes de violences. Parce qu'ils savent trouver les mots justes, ils jouent un rôle essentiel d'accompagnement, dans l'enceinte même du commissariat. Toute une chaîne a été construite de la sorte, avec, notamment, un point de contact au sein du tribunal – un procureur adjoint, le plus souvent. Cette organisation fluidifie énormément le dispositif.
Cet accompagnement doit être réalisé dès le commissariat, pour convaincre, par exemple de ne pas déposer une simple main courante, mais bien une plainte qui donne accès à d'autres droits et permet d'aboutir très rapidement, sinon à un jugement, du moins à un accompagnement. Cette transversalité est essentielle.
Mme Couillard, vous avez rapporté l'initiative de La maison de Simone et le rôle de soutien que pourraient notamment jouer les bailleurs sociaux. C'est le sens de la convention que nous avons signée la semaine dernière. Il faut voir si celle-ci peut trouver à s'appliquer, en étudiant les dossiers au cas par cas, en faisant de la dentelle. C'est avec grand plaisir que nous examinerons avec le bailleur social concerné si des locaux peuvent être identifiés, si la charte que nous avons signée peut être mise en application et si le dispositif d'allocation logement temporaire (ALT) que nous ouvrons à partir de l'année prochaine peut convenir dans ce cas précis.
Mme Hai, j'ai déjà en partie répondu à votre question. Je crois beaucoup en l'efficacité du FNAVDL, géré par les bailleurs sociaux.
La politique du logement ne fait sens vis-à-vis de certains publics que si l'accompagnement est profondément renforcé. C'est toute la valeur ajoutée du système français du logement social que d'assurer cet accompagnement. Les bailleurs sociaux en ont parfaitement conscience ; c'est même inscrit dans leur ADN !
Lors de nos discussions sur la clause de revoyure, nous avons abordé l'accompagnement et nous nous sommes mis d'accord pour renforcer le financement du FNAVDL.
Le cahier des charges que j'évoquais est celui qu'on envoie classiquement aux associations lors de l'ouverture de nouvelles places. Les cahiers des charges de ces appels à manifestation indiquent les critères liés aux ouvertures et le financement associé de l'État. Nous avons encore beaucoup de progrès à faire dans la définition de ces cahiers. Nous en avons encore discuté lundi dernier, dans le cadre des réunions trimestrielles avec toutes les associations d'hébergement d'urgence et de logement. Le cahier des charges est un élément clé qui définit la qualité et parfois la spécificité de l'accueil. Avec l'ouverture de 250 places d'hébergement d'urgence, nous devons nous assurer de son bon calibrage. C'est la responsabilité de mon ministère, notamment de la délégation interministérielle à l'habitat et à l'accès au logement (DIHAL).
Avons-nous les premières conclusions relatives aux contingents ? Non, et je me fais malheureusement peu d'illusions. Même si j'ai conscience du caractère tragique de ce que je dis, avec quatorze publics prioritaires – contre treize avant la promulgation de la loi ELAN, puisque nous avons ajouté les femmes victimes de viols –, il s'agit trop souvent d'un droit formel et non réel… Certes, elles font partie des publics prioritaires mais, malheureusement, il faut parfois des mois, voire des années, pour qu'elles obtiennent un logement. C'est pourquoi j'ai signé une convention avec les bailleurs sociaux, afin que ce droit formel devienne réel.
Mme Le Peih, vous avez évoqué l'expérimentation des maisons d'hôtes dans le Morbihan. Nous devons effectivement partir des expériences territoriales. Nous devons également vérifier si l'intermédiation locative peut être utilisée pour les financer. En effet, l'IML implique une durée moyenne de location de 12 à 18 mois. Est-ce compatible avec une maison d'hôtes ? Cela nécessiterait de les assimiler à des locations de moyenne durée. Si tel est le cas, ce serait un bon moyen de soutenir leurs projets de développement, en partant de l'expérimentation de votre territoire.