Intervention de élisabeth Borne

Réunion du mercredi 9 octobre 2019 à 16h40
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire :

Monsieur Yannick Haury, la filière maraîchère sous serre fait partie de la sphère agricole : à ce titre, elle bénéficie d'un remboursement partiel de la TICGN. La question du taux ne se pose pas réellement puisque, après application du remboursement – qui sera d'ailleurs augmenté en 2020, passant de 15 000 euros à 20 000 euros par exploitation et par période de trois ans –, le tarif de TICGN sera de 0,119 euro par mégawattheure, contre 8,45 euros par mégawattheure pour l'usage en combustible classique. Certes, nous utilisons un mécanisme de remboursement, mais il n'en demeure pas moins que la filière bénéficie bien, de fait, d'un taux extrêmement réduit. Par ailleurs, comme vous le savez, le Gouvernement a renoncé aux hausses de fiscalité, notamment de fiscalité carbone, qui avaient été envisagées précédemment. Enfin, le secteur peut bénéficier des certificats d'économies d'énergie, et je l'invite à en tirer parti. De fait, les actions destinées à réaliser des économies d'énergie ont déjà eu un important écho dans la filière, puisque 3 millions de mètres carrés de serres sont équipés de systèmes de chauffage performants, et 7 millions de mètres carrés, d'ordinateurs climatiques. Il me paraît donc important de conjuguer les remboursements de TICGN, qui conduisent de fait à un taux très réduit, et le financement, à travers les certificats d'économies d'énergie, des actions renforçant l'efficacité énergétique.

Madame Frédérique Tuffnell, la loi pour la reconquête de la biodiversité a effectivement prévu la remise d'un rapport sur le déploiement des obligations réelles environnementales, dispositif novateur qui lie le droit privé et la protection de l'environnement, et doit favoriser l'engagement citoyen en faveur de la biodiversité. Nous avons été amenés à différer la remise du rapport pour avoir un meilleur recul sur l'utilisation du dispositif. En effet, les premières ORE n'ont été signées qu'en 2018, et on en compte seulement une dizaine pour le moment. Il s'agit toutefois d'un dispositif important, sur lequel nous devons continuer à travailler, comme sur tout autre dispositif susceptible de nous permettre de tenir nos engagements en matière de réduction de l'artificialisation nette et de reconquête de la biodiversité. Pour l'élaboration de mécanismes de ce type, associant les acteurs privés à la protection de l'environnement, je suis convaincue qu'il va falloir faire preuve d'imagination. La Caisse des dépôts et consignations, par exemple, travaille beaucoup sur le financement de la préservation de la biodiversité. Quoi qu'il en soit, nous devons accélérer. L'année 2020 sera d'ailleurs très riche en événements en lien avec la biodiversité ; je pense au congrès de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), mais aussi à la quinzième conférence des parties (COP15) sur la biodiversité. Ce sont là autant d'occasions de faire preuve de créativité et d'avancer.

Monsieur Matthieu Orphelin, le CITE n'était pas ouvert aux propriétaires bailleurs, effectivement, et nous sommes en train de réfléchir à ce qu'il en sera en 2021 dans le cadre du nouveau dispositif, puisque le CITE est transformé en prime. À cet égard, nous laissons pour l'instant l'ANAH monter en régime, mais l'idée me semble intéressante, notamment pour accompagner la sortie des passoires thermiques, ce qui est un enjeu très important – non seulement du point de vue de la consommation énergétique, mais aussi dans la perspective de remédier à la précarité de ceux de nos concitoyens qui y vivent et d'améliorer leur qualité de vie. Pour ce qui est de permettre aux ménages des déciles 9 et 10 de bénéficier à nouveau de crédits d'impôt pour effectuer des rénovations globales, je sais qu'il y aura des débats sur le sujet. Celui-ci doit être envisagé dans le cadre global des dépenses supplémentaires qui pourront être décidées par les députés, sachant que l'enveloppe des ressources prévues dans le projet de loi de finances pour 2020 n'est pas extensible à l'infini. Cela dit, autant on peut penser que les ménages des déciles 9 et 10 sont en mesure d'assumer le coût d'opérations de rénovation assez simples – pour lesquelles ils bénéficient d'ailleurs des certificats d'économies d'énergie –, autant il est vrai que la question se pose pour les travaux plus lourds. Mais, je le répète, les ressources dont nous disposons ne sont pas infinies.

Monsieur Jean-Charles Colas-Roy, nous devons être exemplaires dans l'accompagnement des salariés et des territoires concernés par la fermeture des quatre centrales à charbon. La loi relative à l'énergie et au climat prévoit d'ailleurs des dispositions à cette fin. En outre, un travail important a été engagé, notamment par Mme Emmanuelle Wargon, pour mettre en oeuvre des projets de territoire. Pour ce qui est des ressources financières, 40 millions d'euros d'autorisations d'engagement sont prévus dans le budget 2020 pour l'accompagnement des territoires en question.

Madame Nathalie Bassire, je partage votre avis : c'est un bon choix d'utiliser, quand cela est possible, des STEP à la place de batteries. Il faut effectivement se pencher sur la défiscalisation, et nous allons le faire. L'éolien flottant est, lui aussi, une technologie que nous souhaitons promouvoir. Il faut s'assurer que l'on s'oriente vers des prix satisfaisants. Si c'est bien le cas et si, par ailleurs, les études techniques montrent que l'opération est possible à La Réunion, je pense que ce serait une bonne solution, étant entendu que, de manière générale, dans toutes les zones non interconnectées, il faut accélérer le développement des énergies renouvelables.

En ce qui concerne le rachat du gaz issu de la méthanisation, monsieur Pascal Lavergne, le montant de rachat de 67 euros, qui avait été envisagé dans le projet de PPE soumis à consultation, est effectivement bas. Nous étudions la manière dont on pourrait atténuer la baisse du prix, au moins les premières années. Je partage donc votre préoccupation.

S'agissant de l'hydrogène, je voudrais compléter ce que j'ai dit. Sans revenir de manière détaillée sur les axes du plan Hydrogène qui a été annoncé à l'été 2018, je rappellerai que ses objectifs sont à la fois de créer une filière de production d'hydrogène décarboné, de développer le stockage de l'hydrogène dans les zones non interconnectées et d'utiliser le vecteur hydrogène, notamment dans les transports.

Trois appels à projets ont été lancés pour soutenir la phase d'amorçage du déploiement de l'ensemble de la filière industrielle. Premièrement, il y a eu, en 2018, l'appel à projets « écosystèmes de mobilité hydrogène », destiné à soutenir les flottes captives à hydrogène décarboné. Sur les vingt-quatre dossiers déposés, onze ont été présélectionnés et seront accompagnés. Un nouvel appel à projets est envisagé d'ici à la fin de l'année, compte tenu du succès rencontré par le premier. Deuxièmement, il y a l'appel à projets qui concerne la production et la fourniture d'hydrogène décarboné aux consommateurs industriels : 50 millions d'euros sont prévus à ce titre, dans le cadre du programme d'investissements d'avenir. La sélection des projets est en cours. Troisièmement, en juillet 2019, un appel à projets a été lancé pour la production d'énergie hors réseau, notamment dans les zones non interconnectées. Il s'agit, par exemple, de développer des démonstrateurs de solutions propres pour la production d'énergie hors réseau. Il faut vraiment que nous nous assurions, à travers ces appels à projets et ceux qui les suivront, d'avoir des acteurs français présents sur toute la chaîne de l'hydrogène décarboné, qu'il s'agisse de ses applications ou de la production d'hydrogène vert.

Monsieur Alain Perea, la réduction des dégâts de gibier est une priorité pour le Gouvernement, vous le savez. Plusieurs des mesures figurant dans le rapport de votre mission parlementaire, telle l'interdiction du nourrissage, ont été adoptées dans la loi du 24 juillet 2019 portant création de l'Office français de la biodiversité. Les dégâts de gibier ont un coût de l'ordre de 50 millions d'euros par an à la charge des fédérations de chasseurs. La réforme du permis de chasser, qui a conduit à proposer un permis national à 200 euros, permet de faciliter la mobilité des chasseurs et de responsabiliser les fédérations départementales. La contribution à l'hectare a déjà fait ses preuves dans certains départements. Cette contribution peut être modulée par les fédérations : elles pourront ainsi mettre à contribution plus fortement ceux de ses adhérents qui n'ont pas suffisamment agi pour prévenir les dégâts de gibier.

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