Intervention de Christelle Dubos

Réunion du jeudi 10 octobre 2019 à 16h00
Commission des affaires sociales

Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé :

Je vous prie, tout d'abord d'excuser le retard de Mme Agnès Buzyn, pour les raisons précédemment évoquées par Mme la présidente.

Je suis très heureuse de vous présenter les grands axes et l'esprit général de ce PLFSS pour 2020. Je remercie tous ceux qui ont participé à sa construction et qui n'ont ménagé ni leur temps ni leur énergie.

Gérald Darmanin l'ayant déjà évoqué, je ne dirai qu'un mot de la hausse du déficit de la sécurité sociale, qui a déjà fait couler de l'encre. Cette hausse est au premier chef imputable à la baisse des recettes sous l'effet d'hypothèses économiques moins favorables que prévu, mais également de mesures de baisse de prélèvements obligatoires, baisse qui correspondait à une attente forte et légitime des Français et qui faisait partie intégrante de notre programme politique.

En un mot, avec ce PLFSS, et sans négliger un seul instant la maîtrise de nos dépenses publiques, nous nous adaptons au réel. Je ne sais pas si c'est un PLFSS du réel, mais une chose est sûre, c'est un PLFSS de responsabilité. Il répond à l'ambition du Gouvernement de couvrir mieux les risques d'aujourd'hui en tenant compte de leurs caractéristiques propres.

De nouveaux risques exigent de nouvelles protections et de ce point de vue, la sécurité sociale poursuivra toujours, et sans relâche, sa vocation de « protéger les Français de la peur du lendemain ». Ces risques, l'actualité nous le rappelle d'ailleurs brusquement, ce sont les risques technologiques, industriels ou phytosanitaires.

À ce titre, la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de produits phytosanitaires illustre notre volonté de protéger tous ceux qui ont été exposés à des substances dangereuses et en ont été affectés. À cet égard, je remercie le groupe Socialistes et apparentés d'avoir inscrit ce texte dans sa journée réservée en janvier dernier, car cela nous permet aujourd'hui d'avancer sur ce sujet.

Ce sont aussi les risques liés aux évolutions démographiques qu'il est impératif de regarder en face. Le PLFSS engage ainsi le premier volet de la réforme de la dépendance, en attendant une loi de grande envergure, une loi fondatrice, qui permettra à la France de relever un défi immense.

La société française de 2050, dans laquelle près de cinq millions de Français auront plus de 85 ans et dans laquelle le nombre d'aînés en perte d'autonomie aura presque doublé, se construit aujourd'hui. Ce PLFSS pose donc la première pierre de notre réforme, avec le congé proche aidant, qui permettra d'indemniser pour une durée de trois mois toutes celles et tous ceux qui, à un moment donné, doivent aider un proche malade ou en perte d'autonomie. Cette mesure était, je le sais, attendue et portée par plusieurs groupes.

S'adapter aux nouveaux risques et tenir compte de ce qu'ils sont aujourd'hui et de ce qu'ils seront demain, c'est ce que chacun attend d'un État social moderne, capable d'intégrer des parcours de vie et des trajectoires individuelles moins linéaires que par le passé. Nous ne construisons pas autre chose.

La protection sociale du XXIe siècle est une protection sociale qui connaît les vertus de la prévention et qui développe l'approche préventive à l'ensemble des risques, bien au-delà de la seule prévention en santé.

Prévenir, c'est voir venir et c'est intervenir avant que les risques ne se manifestent. Prévenir les risques sociaux, c'est donc agir en amont des difficultés et éviter les courants défavorables. Je pense ici aux familles monoparentales et au scandale des pensions alimentaires non versées. Il était temps d'en finir avec un système qui faisait de la négligence des uns la détresse des autres. La vie des parents isolés est suffisamment difficile. Une pension alimentaire qui n'est pas versée, c'est un caddie que l'on ne peut pas remplir, ce sont des loisirs auxquels on doit renoncer et c'est toujours un pas de plus vers la pauvreté. Telle est la conviction qui nous a guidés depuis le premier jour dans la mise en place d'une garantie de versement des pensions alimentaires, appelée de ses voeux par le Président de la République lors du Grand débat national. Avec Agnès Buzyn, nous sommes fières d'avoir créé un dispositif qui sécurise efficacement les familles monoparentales et plus largement toutes les familles, y compris celles recomposées.

Prévenir l'apparition des risques sociaux, c'est aussi, évidemment, démultiplier nos efforts auprès des plus fragiles. Je pense ici aux enfants entrant à l'aide sociale à l'enfance (ASE). Avec Adrien Taquet, nous allons systématiser un bilan de santé et si besoin, l'orientation dans un parcours de soin.

Notre protection sociale doit aussi s'attacher toujours plus aux individus, aux parcours et aux transitions. Dire cela n'est pas moderniser un discours, c'est moderniser un système, dont la complexité ne doit plus être subie par nos concitoyens ; les ruptures de droits sont un fléau qui est la conséquence directe de cette complexité. Simplifier le système, c'est ce que nous avons voulu faire en procédant au « versement en temps réel » des crédits d'impôt et des aides sociales dans le cadre de l'emploi à domicile, notamment pour les personnes dépendantes, de façon que l'assuré ne paye plus que son reste à charge et n'avance plus de trésorerie.

Un autre exemple de cette simplification consiste à rendre moins contraignante l'obligation en matière de certificats médicaux de non contre-indication à la pratique sportive pour les mineurs.

Nous portons aussi nos efforts sur l'articulation entre les aides sociales, ainsi que sur le passage d'une aide à une autre. C'est par exemple l'automatisation de la bascule du revenu de solidarité active (RSA) ou de l'allocation aux adultes handicapés vers les droits à la retraite.

Nous tenons compte, parce que c'est indispensable, des parcours de soins en sortie de cancers, adaptés à chacun et pris en charge par l'assurance maladie, qu'il s'agisse de la nutrition, de l'aide psychologique ou encore de l'activité physique adaptée.

Nous regardons aussi en face les inégalités territoriales, avec la mise en place d'un nouveau droit pour les femmes enceintes habitant loin d'une maternité, incluant le transport et l'hébergement en amont du terme.

Ces inégalités territoriales, qui ont très largement inspiré la loi sur l'organisation et la transformation du système de santé, nous ne les esquivons pas dans le PLFSS. Notre ambition consiste à aller vers les populations fragiles et à ne laisser personne de côté. Tel est le sens de la réforme du financement de la psychiatrie, afin de mieux répartir les ressources en fonction des besoins évalués au niveau du territoire. Tel est également le sens de la poursuite des mesures de lutte contre les déserts médicaux, avec les contrats d'installation et les exonérations de cotisations. C'est enfin, et je ne peux citer toutes les mesures, le financement et le déploiement des hôpitaux de proximité.

Le PLFSS n'est pas seulement un acte de responsabilité budgétaire. En faire une lecture strictement comptable, c'est passer à côté de ce qu'il est vraiment. Il est avant tout un instrument politique. Nous sommes en train de repenser la protection sociale dans son ensemble : dans sa méthode comme dans ses finalités, pour la rendre plus universelle, plus juste et plus efficace.

Notre objectif consiste à réaffirmer la présence de l'État social à chaque étape de la vie, de la petite enfance au grand âge en passant par la parentalité, la vie professionnelle, la maladie et tout ce qui compose une existence, dans ses joies, dans ses épreuves et dans ses espoirs.

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