Comment comprendre vos nouveaux cadeaux aux entreprises sous la forme d'une baisse du taux de l'impôt sur les sociétés qui pèsera 30 milliards d'euros sur la durée du quinquennat, quand vous luttez si timidement contre la fraude fiscale ?
Comment interpréter le fait que vous ne touchiez qu'à la marge aux niches fiscales, qui coûtent chaque année 100 milliards, et que vous alliez jusqu'à préserver les niches anti-écologiques comme celles applicables au kérosène aérien ou aux transports routiers, qui coûtent 11 milliards, alors qu'il manque 18 milliards d'investissements favorables au climat ?
Ces coupes claires dans les recettes de l'État, ce sont bien évidemment les plus modestes – voire les plus pauvres, dont le nombre augmente de 0,6 % – qui en supporteront les conséquences : moins de services publics et de nouvelles baisses de prestations sociales. Sans parler des fonctionnaires, déjà sous-payés et au bord de la rupture. Pendant ce temps, les 20 % les plus riches se voient offrir la perspective d'une suppression de la taxe d'habitation, pour 8 milliards d'euros, dont la compensation pour les collectivités territoriales reste éminemment incertaine à moyen et à long terme.
Injustes socialement et écologiquement irresponsables, ces coupes sont, de surcroît, un non-sens économique. C'est vous-même, monsieur le ministre, qui l'avouez, en prévoyant une moindre croissance alors que la demande extérieure va augmenter ; vous-même encore qui anticipez la diminution de la croissance des investissements des entreprises. Mais tout cela est bien logique : ce ne sont pas les plus riches qui vont relancer la consommation, préférant accroître leur épargne ; sans parler du ruissellement que l'on attend toujours… comme Godot !
Pourtant, des solutions réalistes et équilibrées existent.
Instaurer quatorze tranches du barème de l'impôt sur le revenu, par exemple, assurerait une progressivité plus douce et plus juste, et rapporterait 10 milliards d'euros.
Abaisser la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux produits de première nécessité et la relever s'agissant des produits de luxe permettrait de mieux répartir cet impôt des plus injustes.
Enfin, renforcer la fiscalité environnementale équivaudrait à mettre en oeuvre le principe du pollueur-payeur de manière véritablement incitative.
Mais, à votre habitude, vous avez écarté ces propositions avec désinvolture, voire avec mépris, nous renvoyant ici à la Constitution, là à des directives européennes douteuses, là encore au prétexte de la concurrence.
Pour toutes ces raisons, le groupe de La France insoumise ne votera pas ce projet de loi de finances, qui ne mène bel et bien nulle part.