Intervention de Caroline Fiat

Séance en hémicycle du mardi 22 octobre 2019 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Fiat :

Qui dit mauvaise prise en charge de la santé, dit maladies chroniques et accidents plus fréquents. Qui dit fermetures d'hôpitaux, dit plus longues distances pour les patients et donc plus de frais de transport. Qui dit économies sur les urgences, dit aggravation de l'état de santé des Français. En poursuivant ainsi la destruction de l'assurance maladie, vous faites que seuls les plus fortunés seront en mesure de conserver un accès aux soins digne de ce nom. La rigueur pour la rigueur n'a aucun sens : c'est une absurdité.

Si les économies étaient faites sur la maîtrise du prix des médicaments, donc sur Big Pharma et ses dividendes colossaux, nous aurions pu vous suivre. Mais vos mesures sont beaucoup trop timides. Pour sûr, les intérêts des magnats de l'industrie pharmaceutique sont préservés.

À défaut d'être soignés correctement tout au long de la vie, peut-être pourrions-nous espérer être bien pris en charge lorsqu'arrivent les vieux jours. N'avez-vous pas promis aux Français, madame la ministre, un plan grand âge et autonomie pour 2020 ? Or, si ce plan voit le jour en 2020, nous devrions voter dès ce projet de loi les financements qui l'accompagnent. Où sont-ils ? Où sont les financements censés servir au plan grand âge et autonomie de l'an prochain ? Rien ! Zéro ! Nada !

Il n'y a que 210 millions d'euros pour les EHPAD et 50 millions pour l'accompagnement à domicile, des crédits qui couvrent à peine le vieillissement de la population. C'est se moquer du monde ! Nous savons d'ores et déjà que votre plan ne sera que de la poudre aux yeux, puisqu'il ne sera pas financé. Comment pouvez-vous maltraiter, ne serait-ce qu'une journée de plus, nos aînés, en acceptant qu'ils restent des heures durant dans leurs excréments faute de soignants ? Comment pouvez-vous continuer plus longtemps à culpabiliser les familles qui placent leurs parents dans des EHPAD ? Comment pouvez-vous mépriser des professions qui connaissent les taux d'accidents du travail et de suicides les plus élevés de France ?

Alors que le système craque de partout, l'ensemble des fédérations représentant les usagers, l'ensemble des syndicats, l'Union nationale des associations familiales et les fédérations hospitalières ont tous appelé à une revalorisation immédiate de l'ONDAM, afin de répondre aux enjeux actuels et futurs de nos hôpitaux. Ils ont tous appelé à des mesures à la hauteur des attentes de la population en matière de prise en charge du grand âge et de l'autonomie. Si vous ne nous écoutez pas, au moins, eux, écoutez-les !

Enfin, ce projet de loi gèle à nouveau, pour 2020, les prestations familiales, les prestations versées pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, ainsi que certaines pensions de retraite. Comment pouvez-vous ?

Les 23 et 24 août derniers, lors du G7, Emmanuel Macron s'entretenait avec des dirigeants de multinationales puis avec des chefs d'État pour évoquer la réduction des inégalités. On y aurait presque cru. Les inégalités ont connu une progression inédite en 2018, dès que les premiers effets de la politique du président Macron se sont fait ressentir ; dans le même temps, le taux de pauvreté a bondi. C'est ce qu'annonçait l'INSEE la semaine dernière. D'ordinaire, ces inégalités croissantes s'observent dans des moments de crise. Ce fut le cas en 1998, au moment de l'éclatement de la bulle internet, et en 2010, en conséquence de la grande crise financière. Or, cette fois, nulle crise, nulle perturbation extérieure, mais des choix politiques pleinement assumés : suppression de l'ISF, flat tax, réforme de l'assurance chômage, et j'en passe. Dans ce projet de loi, comme si cela ne suffisait pas, vous désindexez les prestations sociales. Chaque année, vos économies sur la sécurité sociale aggravent les inégalités. En 2020, elles s'élèveront à 4 milliards d'euros.

Je le dis avec gravité : la politique que vous conduisez n'est pas anodine, elle n'est pas le fruit d'un simple calcul comptable sur le coin d'une table. Vous créez une véritable bombe à retardement. Vous créez une ambiance explosive et, par-dessus le marché, vous faites porter l'ensemble de ces réformes aux gilets jaunes, affirmant que c'est à cause des mesures qu'il a fallu leur consentir que la sécurité sociale se porte si mal.

Il est donc inutile de vous préciser que nous voterons contre ce PLFSS, un plan qui liquide plus la sécurité sociale qu'il ne la sauve.

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