Intervention de Agnès Buzyn

Séance en hémicycle du jeudi 24 octobre 2019 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 — Article 29

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Je vais profiter de cette série d'amendements pour vous présenter mon approche de la question des biosimilaires. Cela me permettra de répondre plus brièvement aux amendements suivants.

D'abord, soyons clair : le Gouvernement soutient sans réserve l'usage des biosimilaires et leur développement. Ces médicaments permettent, lorsqu'ils sont pertinemment prescrits, de diversifier les sources d'approvisionnement, donc de sécuriser la disponibilité de ces médicaments. Cela permet également de garantir l'efficience des dépenses de l'assurance maladie en dégageant des marges de manoeuvre financières.

Nous n'avons pas attendu ce PLFSS pour agir. Plusieurs mesures incitatives ont d'ores et déjà été mises en place, le rapporteur général l'a rappelé, et de nouvelles vous sont proposées aujourd'hui. Je pense notamment à l'expérimentation visée à l'article 51, lancée en octobre 2018 pour inciter à la prescription hospitalière exécutée en ville sur plusieurs médicaments. Chaque service des établissements qui participent à cette expérimentation se voit reverser 30 % des économies réalisées grâce à ces prescriptions. Les résultats sont très encourageants.

Le PLFSS pour 2020 vient également compléter la panoplie existante pour accompagner le développement des biosimilaires, par exemple en encourageant les établissements de santé à acheter ces médicaments de façon à renforcer l'efficience des prescriptions ou en permettant l'utilisation des demandes d'accord préalables à l'arrivée de biosimilaires sur le marché.

Si nous soutenons leur développement, nous ne souhaitons pas le faire à n'importe quel prix, car les biosimilaires ne sont pas des génériques. Si le PLFSS pour 2020 tend à supprimer la possibilité pour le pharmacien de prendre l'initiative de la substitution, qui avait été introduite en 2014, ma motivation est simple : la qualité et la sécurité des soins. Il suffit de voir le nombre de courriers reçus ces derniers jours de la part des associations de patients ou des sociétés savantes pour mesurer combien le sujet inquiète. C'est la raison pour laquelle cette possibilité n'existe dans presque aucun pays.

Je ne dis pas que le pharmacien ne pourra jamais procéder à la substitution dont nous parlons, mais cela me paraît difficile dans les conditions actuelles de traçabilité, que nous travaillons par ailleurs à améliorer.

Pour mettre tout le monde d'accord, il nous semble utile de repartir d'une page blanche et de travailler la question de l'interchangeabilité des biosimilaires avec les pharmaciens, les prescripteurs et les patients. Je dirai même avant tout avec les patients, parce qu'étant des malades chroniques ils connaissent très bien leur pathologie et ses symptômes, dont ils ressentent toutes les variations. Ne reproduisons pas les erreurs que nous avons commises en matière de génériques et qui ont fait naître en France une défiance vis-à-vis de ces médicaments, pourtant, eux, identiques en tous points aux princeps. Notre objectif est le même, je pense : disposer des conditions susceptibles de garantir le bon usage en cas d'alternance entre médicaments interchangeables.

Je vous propose que nous nous laissions une année pour travailler sur cette question de manière sereine, en poursuivant un seul objectif : l'intérêt des patients. En attendant, nous préférons maintenir le prescripteur au coeur du dispositif. Voilà pourquoi, mesdames et messieurs les députés, je pense qu'il faut soutenir la mesure proposée par le Gouvernement.

J'aurais pu recourir à un argument beaucoup plus juridique, et notamment invoquer la nécessité de prévenir le risque de contentieux né de la prise de position d'un grand laboratoire encourageant les pharmaciens à substituer sans attendre le décret. Mais j'ai préféré développé une argumentation plus médicale, plus scientifique, de santé publique, parce que c'est à ce niveau que je souhaite placer le débat.

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