L'avis budgétaire dont nous sommes saisis est indéniablement l'un des plus importants du PLF. Il nous permet de débattre du budget et donc des conditions de fonctionnement d'une institution qui est au fondement de notre démocratie et de notre contrat social : la justice. Le groupe MODEM et apparentés se félicite de l'augmentation de près de 4 % des crédits alloués au ministère de la Justice, bien que cette hausse soit légèrement plus faible que celle qui était prévue initialement – mais vous nous en avez expliqué les raisons, madame la garde des Sceaux.
Le PLF participe ainsi clairement à l'ambition du Gouvernement d'augmenter le budget de la justice de 24 % d'ici à 2022, comme le prévoyait la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. En effet, une telle augmentation est cruciale pour mettre pleinement en oeuvre les dispositifs introduits par la réforme de la justice et, en conséquence, pour faire face aux trop nombreuses carences qui affectent notre appareil judiciaire. Les difficultés sont sérieuses : juridictions sous-dotées et encombrées, vacances de postes, délais de traitement excessifs – je pourrais continuer la liste, hélas. Notre système carcéral est également en proie à de nombreux maux, tels que la surpopulation systémique et l'insalubrité des locaux pénitentiaires, qui ont transformé certains établissements en lieux de déshumanisation.
Dans ce contexte, nous nous réjouissons tout particulièrement des augmentations de crédits alloués à des dispositifs qui nous tiennent à coeur et que nous avions activement soutenus il y a quelques mois lors de l'examen de la réforme. À cet égard, un effort significatif a été consenti pour moderniser l'administration pénitentiaire en prenant en compte les nombreux enjeux auxquels elle est confrontée. Ainsi, 14,6 millions d'euros sont affectés à l'amélioration de la formation professionnelle des personnes détenues. La rémunération horaire des détenus qui travaillent est elle aussi revalorisée. Les revendications des surveillants pénitentiaires grévistes ont également été entendues par le Gouvernement, avec la création de 150 postes supplémentaires destinés à renforcer les équipes de sécurité et 300 emplois permettant de combler les vacances de postes chez les personnels de surveillance.
De plus, en vue d'améliorer sensiblement les conditions de détention, un budget important est consacré à des travaux de maintenance, de rénovation et d'entretien des établissements ; 176 millions d'euros sont affectés à la création de 7 000 places de prison supplémentaires – je laisserai ma collègue Laurence Vichnievsky vous poser une question à ce propos. Le renforcement de l'objectif de réinsertion sociale et celui du principe de l'encellulement individuel me semblent également mériter notre plus vive attention. Je salue en particulier les efforts accrus pour le développement des centres de semi-liberté, ainsi que pour les nouvelles structures d'accompagnement vers la sortie. Ces dispositifs renforcent le respect effectif des droits fondamentaux des détenus à plusieurs égards : ils permettent non seulement de désengorger les maisons d'arrêt surpeuplées, mais également de favoriser la vie après la détention en luttant contre les sorties sèches.
Par ailleurs, l'augmentation de 13 millions d'euros des crédits du ministère consacrés à l'informatique contribuera à mettre utilement en oeuvre le grand plan de numérisation de la justice. Ce dernier contient des avancées essentielles pour assurer de meilleures conditions de travail pour le personnel judiciaire ainsi qu'une proximité accrue de l'accès aux services de la justice pour les citoyens – je pense notamment à la dématérialisation de certaines procédures et à l'ouverture de dossiers en ligne.
Le groupe MODEM salue les augmentations de crédits, qui sont cruciales et à la hauteur de la réforme de la justice particulièrement ambitieuse que nous avons adoptée. Pour continuer à avancer dans le bon sens et moderniser notre système carcéral, je souhaiterais vous interroger sur deux sujets. Le premier est en lien avec la prise de conscience collective de l'urgence qu'il y a à améliorer la protection des femmes victimes de violences conjugales et leur accès à la justice. Quels crédits seront alloués à cet objectif ? En particulier, comment la prise en charge des bracelets électroniques visant à protéger les victimes sera-t-elle assurée ? Le second sujet concerne les modules de respect, qui permettent, entre autres, aux détenus de disposer de la clé de leur cellule. Quels crédits envisagez-vous d'allouer à ces modules, madame la garde des Sceaux ? Les résultats des expérimentations sont très encourageants et il me semblerait pertinent de poursuivre les efforts afin de généraliser ces modules.