Intervention de Cécile Untermaier

Réunion du mardi 22 octobre 2019 à 18h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

Je vais d'ailleurs devoir y retourner.

Le budget 2020 du ministère de la Justice s'élève à 7,5 milliards d'euros hors pensions, en hausse de 2,8 % par rapport à la loi de finances pour 2019. C'est la troisième année consécutive que ce budget connaît une majoration, après des hausses de 4,5 % en 2019 et 3,9 % en 2018, soit une moyenne de 3,7 % en trois ans. Ce chiffre doit être rapproché de ceux qui ont été constatés dans le passé, toutes majorités confondues, de Jacques Toubon, qui avait augmenté le budget de 1,6 % puis de 6,4 %, jusqu'à Christiane Taubira, qui avait obtenu, entre 2013 et 2017, une hausse de 8,5 %. La tendance s'était poursuivie en 2018, marquant ainsi une augmentation de 12,3 % par rapport à 2013. Il me semblait important de rappeler ces éléments dans le cadre de l'examen du présent projet de loi de finances.

Ce budget inscrit les réformes entérinées dans le cadre de la loi de réforme pour la justice : une nouvelle politique des peines et de réinsertion, avec la promotion du prononcé de peines alternatives à l'emprisonnement, une prise en charge des mineurs améliorée en termes de délais et d'accompagnement, la transformation numérique, le plan prison, les centres éducatifs fermés – toutes orientations pour lesquelles nous partageons vos préoccupations.

Je voudrais toutefois faire observer que l'examen du budget et le débat qu'il implique ne peuvent se faire, à mon sens, sans une lecture attentive du rapport de la Cour des comptes, opportunément demandé par certains commissaires aux Finances et remis début 2019. Ce rapport traite de l'organisation et de l'allocation des moyens de la justice. Il met en évidence des dysfonctionnements pendant plusieurs années – dont vous n'êtes évidemment pas la seule responsable, madame la garde des Sceaux – et constate surtout que l'administration du ministère ne dispose pas de tous les outils de connaissance et de pilotage nécessaires pour élaborer le budget. J'en conclus que nous travaillons quelque peu à l'aveugle. De fait, j'avoue que, lorsqu'on m'annonce qu'il y aura 70 magistrats en plus pour la justice des mineurs, je ne sais pas pourquoi ce doit être 70 plutôt que 80 ; je ne sais pas non plus quand ces 70 magistrats seront opérationnels sur le terrain. Toujours selon le même rapport, malgré une augmentation des crédits budgétaires, la situation se dégrade. Le Conseil de l'Europe relève quant à lui que les juridictions françaises bénéficient d'un effort budgétaire moindre, malgré la hausse significative de ces dernières années, par rapport aux États européens comparables au nôtre.

S'agissant de l'absence d'outils de connaissance et de pilotage que j'évoquais, nous avons vu ce qu'il en était à propos de la justice des mineurs : nous n'avions aucun élément statistique nous permettant de connaître, par exemple, les effets d'un passage en centre éducatif fermé sur la réinsertion d'un enfant. Or nous allons programmer l'ouverture de vingt centres. En fait, nous légiférons sans vraiment connaître l'activité judiciaire. Si nous ne nous trompons certainement pas en majorant globalement les crédits – et je vous remercie, bien sûr, de cette augmentation –, reconnaissons que nous allons un peu à l'aveugle pour ce qui est des missions elles-mêmes.

Ma dernière observation porte sur le programme 101 « Accès au droit et à la justice », notamment l'aide juridictionnelle. La politique en matière d'accès au droit et à la justice doit permettre à toute personne qui le souhaite d'avoir connaissance de ses droits et de les faire valoir, quelle que soit sa situation sociale ou le lieu de son domicile. Cette politique doit associer l'État, les collectivités locales et le milieu associatif, mais aussi, madame la garde des Sceaux, tous les professionnels du droit. C'est le sens du travail que nous avons mené dans le cadre de la loi de finances. Les crédits de ce programme s'élèvent à 530,5 millions d'euros en 2020, contre 466,8 millions d'euros en 2019. Il s'agit non pas d'une augmentation, contrairement à ce que j'ai lu dans la presse, mais du transfert vers le budget de l'État de 83 millions d'euros qui étaient affectés au CNB. Or, si l'on fait l'addition, 466,8 millions plus 83 millions, cela donne 549,8 millions et non 530,5. Je ne m'explique pas la différence.

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