Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du mardi 22 octobre 2019 à 21h50
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des comptes publics :

Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je vous présenterai l'essentiel du programme 148, consacré à la fonction publique.

Le programme 148 géré par la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) regroupe plusieurs sortes de crédits. Les premiers sont destinés à la formation initiale et continue des agents publics, notamment dans le cadre des actions mises en oeuvre par les opérateurs de formation interministérielle que sont l'École nationale d'administration (ÉNA) et les cinq instituts régionaux d'administration (IRA), pour laquelle 79,2 millions d'euros sont inscrits au projet de loi de finances (PLF) pour 2020. Le deuxième type de crédits relève de l'action sociale interministérielle, au bénéfice des agents des ministères et établissements publics de l'État, en complément des actions dont ils peuvent bénéficier dans leur service, pour 126 millions d'euros. Enfin, les crédits visant à appuyer l'innovation en matière de ressources humaines sont destinés à l'action de trois fonds interministériels, à savoir le fonds d'innovation pour les ressources humaines (FIRH), le fonds du système d'information de gestion des ressources humaines (SIRH) et le fonds interministériel d'amélioration des conditions de travail (FIACT), auquel s'ajoute le fonds en faveur de l'égalité professionnelle, créé en 2019, traduction concrète du protocole d'accord pour l'égalité entre les femmes et les hommes conclu le 30 novembre 2018, pour un montant total de 5,6 millions d'euros.

En comparaison de celui de l'année 2019, j'appellerai l'attention de votre Commission sur quatre points du PLF pour 2020.

Premièrement, les crédits du programme 148 sont en augmentation, passant de 205,6 à 211 millions d'euros, principalement du fait de la revalorisation du programme d'action sociale, notamment des crédits affectés au chèque emploi service universel (CESU). Afin de faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, l'État employeur a mis en place au bénéfice de ses agents une prestation unique versée sous forme de chèques emploi service universel préfinancés, destinée à prendre en charge une partie des frais engagés par les agents pour la garde de leurs enfants de moins de 6 ans. Jusqu'à fin 2019, le barème d'attribution, en fonction du revenu fiscal de référence, du nombre de parts du foyer et de la situation familiale, comprenait deux tranches d'aide dont le montant s'établit à 400 et 700 euros pour douze mois de droits, pour les agents vivant en couple. À la suite du rendez-vous salarial de juillet dernier, une circulaire que je signerai prochainement prévoira à la fois une revalorisation des barèmes de 5 %, la création d'une tranche d'aide supplémentaire à 200 euros et, pour les agents en situation monoparentale, une aide délivrée sans plafond de ressources d'un montant en année pleine variant entre 265, 480 ou 840 euros.

Deuxièmement, le programme 148 continue de tirer bénéfice d'une profonde réforme du concours et de la scolarité des attachés d'administration de l'État dans le cadre des IRA, puisque cette réforme connaîtra en 2020 sa première année de pleine mise en oeuvre. La réforme correspond au besoin d'évolution exprimé par les employeurs publics, les fonctionnaires stagiaires, les directions d'école et les intervenants. Elle permet d'augmenter les recrutements pour répondre pleinement aux besoins des employeurs publics. Ainsi, 820 personnes seront formées chaque année en deux promotions annuelles, contre 730 actuellement. Cela permet en outre de renouveler en profondeur le concours et la formation délivrée en institut par une plus grande individualisation des enseignements, pour tenir compte des compétences déjà acquises, un accompagnement à la prise de poste pendant six mois et une modernisation des processus d'affectation et de titularisation. Cela nous permet aussi de réduire le montant de la subvention pour charge de service public versée aux IRA à l'horizon 2020.

En pratique, le nouveau modèle de formation s'articulera autour de deux phases : une période en institut de six mois permettant de définir un parcours de formation et de développement des compétences individualisées, une période en service de six mois donnant lieu à un accompagnement en formation continue, avant le processus de titularisation qui relèvera désormais de l'employeur et non plus d'un jury désigné par le ministère en charge de la fonction publique. Cette nouvelle formation est opérationnelle depuis le 1er septembre dernier. Cette réforme s'inscrit dans le schéma directeur de la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de l'État et constitue un modèle pour les autres écoles de service public de l'État, puisque nous souhaitons revoir en profondeur l'appareil de formation pour gagner en qualité et en efficacité en ce qui concerne les actions de formation.

Je dois préciser que, dans le cadre du schéma directeur de la formation continue des agents de l'État, une enveloppe de 300 millions d'euros par an est réservée au financement des actions prioritaires, soit 1,5 milliard d'euros à l'échelle du quinquennat, en lien avec le déploiement du grand plan d'investissement. Nous visons plusieurs objectifs, dont le principal, faisant écho à notre débat lors de l'examen du projet de loi, est la constitution, notamment à l'initiative de Mme la rapporteure, d'une culture managériale au sein de l'État, qui constitue l'un des cinq axes de travail du schéma directeur. Je confirme la volonté du Gouvernement de poursuivre et d'amplifier les actions de formation à destination de ce public d'encadrants, quelle que soit leur catégorie hiérarchique. Le programme 148 sera mobilisé à cette fin. Il mobilise aussi les crédits inscrits au titre du grand plan d'investissement.

Le programme 148 vise aussi à accompagner le redressement de la situation budgétaire de l'ÉNA, pour un retour à l'équilibre en 2020, puisque nous avons constaté une importante fragilité financière de l'école. Dès 2017, nous avons demandé à M. Patrick Gérard, directeur de l'ÉNA, de nous faire des propositions en vue d'un redressement durable de ses comptes. Cette demande a donné lieu à un travail d'analyse et au recours à un audit externe. Le plan de retour à l'équilibre a été présenté au conseil d'administration de l'école le 10 octobre 2018. En 2020, une économie de 870 000 euros est attendue grâce au réaménagement de la scolarité. Cela permettra de financer des mesures nouvelles, tel que le recrutement de trois élèves docteurs sur la promotion 2020-2021, pour un coût de 170 000 euros, qui répond notamment à la préoccupation exprimée par Mme la rapporteure – c'est sa première proposition - de doubler dès 2020 le nombre de places ouvertes dans le cadre du quatrième concours d'entrée à l'ÉNA réservé aux titulaires d'un doctorat. Par ailleurs, nous allons créer une classe préparatoire intégrée à l'ÉNA de Strasbourg, pour un coût de 150 000 euros en 2020, également en harmonie avec plusieurs propositions sur les classes préparatoires intégrées visant à développer la diversité tant géographique que sociale, en nous appuyant sur les autres dispositifs de préparation. Nous allons aussi mettre en place un mois de rémunération supplémentaire accordé aux stagiaires admissibles dès le cycle préparatoire, et la mise en place de la CP'ÉNA de Paris sera confortée par une augmentation des effectifs, pour un montant total de 350 000 euros.

Enfin, le programme 148 prévoit le maintien du transfert des crédits relatifs à l'apprentissage vers les programmes ministériels concernés. Depuis 2015, dans le cadre du programme de développement de l'apprentissage dans la fonction publique de l'État, le programme 148 intervenait en appui des ministères et établissements publics pour financer une partie des coûts de rémunération et de formation des apprentis. En 2018, 29,8 millions d'euros étaient répartis entre 49 programmes ministériels pour faciliter la prise en charge financière des 9 800 apprentis recrutés. Nous avons ainsi voulu responsabiliser les différents ministères, puisque le programme ancien reposait sur une procédure de gestion très lourde avant d'aboutir à la publication du décret de transfert. Cela s'accompagnait de délais de remboursement de plus en plus tardifs pour les employeurs. Depuis le PLF pour 2018, le ministère de l'Éducation nationale, qui est le principal employeur d'apprentis au sein de l'État, a bénéficié en avance de phase de crédits inscrits directement sur ses programmes budgétaires pour le financement de la rémunération de ses apprentis. Au regard de la demande analogue formulée par d'autres ministères importants, notamment le ministère des Armées, le Gouvernement a fait le choix d'un transfert des crédits pour l'ensemble des ministères dans le PLF pour 2019, et nous le confirmons dans le PLF pour 2020.

Le principe selon lequel le recrutement d'apprentis n'est pas pris en compte au titre des schémas d'emplois ministériels demeure, afin de maintenir l'attractivité de ces recrutements. L'objectif du Gouvernement pour l'année scolaire 2019-2020 est de parvenir à 11 130 personnes en apprentissage au sein de l'État et de faciliter le recrutement d'apprentis dans les trois versants de la fonction publique. Il convient de noter que les apprentis bénéficient, depuis la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté du 27 janvier 2017, de la possibilité de candidater au troisième concours de la fonction publique en valorisant leurs années d'apprentissage dans le cadre de la durée d'expérience professionnelle requise pour l'accès aux concours.

Par ailleurs, l'article 15 de la loi de la transformation de la fonction publique du 6 août 2019 crée une procédure de recrutement des agents contractuels, qui facilite l'intégration des apprentis. Cet engagement du Gouvernement en matière d'apprentissage satisfait notamment les propositions n°s 2 et 10 exprimées par Mme la rapporteure en 2019 et la proposition n° 11 de 2020 visant à favoriser l'accompagnement individualisé d'étudiants méritants de condition modeste dès le début de leurs études supérieures, dans le cadre d'une préparation pluriannuelle des candidats aux concours administratifs.

Si vous me le permettez, Madame la présidente, j'indiquerai pour conclure qu'au-delà du programme 148, de nombreux crédits transversaux de l'État vont être consacrés à la mise en oeuvre de la loi du 6 août 2019. Un tiers des articles du projet de loi devenu loi sont applicables immédiatement. Nous veillons à ce que les délais d'application prévus par la loi soient scrupuleusement tenus. Cela signifie que tous les décrets nécessaires à l'application des dispositions qui doivent entrer en vigueur au 1er janvier seront pris avant cette date, que tous les décrets nécessaires pour une entrée en vigueur ultérieure seront évidemment pris et que le premier semestre sera consacré à la discussion des ordonnances. D'ailleurs, les premiers projets de décrets d'application ont été examinés par le conseil commun de la fonction publique (CCFP) le 17 octobre, notamment sur le contenu des lignes directrices de gestion, la réforme des compétences des commissions administratives paritaires (CAP) ou encore la portabilité et les mécanismes de conversion publicprivé du compte personnel de formation.

Je précise que nous allons accompagner ce processus de crédits qui ne relèvent pas directement du programme 148 mais qui sont importants. Je pense au fonds d'accompagnement en matière de ressources humaines, pilotées par la DGAFP mais de portée interministérielle. Doté de 50 millions d'euros, il vise à cofinancer les opérations de réorganisation, de modernisation et de restructuration des différents ministères et, à compter du 1er janvier, il pourra aussi cofinancer, là où ce sera nécessaire, les indemnités dues en cas de recours à la rupture conventionnelle dans le secteur public, conformément à ce que nous avons prévu dans la loi du 6 août. Nous allons mettre en place, et nous avons recruté une préfiguratrice pour ce faire, une agence d'appui à la mobilité et aux transitions professionnelles à un niveau interministériel, pour accompagner les mobilités géographiques et fonctionnelles des agents, mobilités interministérielles ou inter-versants de la fonction publique ou vers le secteur privé, en mobilisant les outils dont nous disposons. La mise en place du dispositif de rupture conventionnelle précédemment évoqué sera accompagnée de deux mesures soumises, pour l'une, au PLF, qui a été adoptée en première partie, pour l'autre, au projet de financement de la sécurité sociale (PLFSS), à l'article 9, visant respectivement à défiscaliser l'indemnité versée en cas de rupture conventionnelle et à l'exonérer de cotisation sociale, comme c'est le cas dans le secteur privé. Par ailleurs, les différents leviers statutaires nous permettront aussi d'accélérer et de faciliter les mobilités.

Enfin, je confirmerai que l'ensemble des engagements que j'ai pris devant les organisations syndicales et les employeurs publics lors du rendez-vous salarial du mois de juillet dernier sont tenus par le PLF, qu'il s'agisse de la reconduction de la garantie individuelle de pouvoir d'achat, de la mise en oeuvre du « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), de la réévaluation de l'indemnité compensatoire en matière de CSG ou d'un certain nombre de revalorisations de régimes indemnitaires. Je pense notamment au régime indemnitaire de la filière sociale. S'agissant des agents qui ont bénéficié d'un passage de B en A ou de C en B avec PPCR pour leur traitement indiciaire et leur carrière, les plafonds indemnitaires étaient restés arrêtés sur les grilles précédentes et il fallait les adapter sur la grille supérieure. Je pensais également évoquer sur d'autres aspects comme la réforme indemnitaire temporaire de mobilité, le forfait de mobilité durable et la revalorisation des frais de repas.

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