Pourquoi ? La réponse est que les êtres humains ne s'adaptent pas mieux que les bois et les forêts à l'argent-roi. L'argent, ici encore, est en train de tout pourrir et de tout détruire. La forêt est fille du temps long ; or elle est actuellement sous la dictature du temps dominant, celui des cycles courts du capital financier.
La recherche de la rentabilité impose une technique aberrante : on plante sur des hectares entiers, en plaine ou en montagne, des résineux, tous de la même espèce et, trente ans plus tard, on coupe à ras. La première conséquence de ce productivisme forestier est une incroyable perte de biodiversité : sols acidifiés, paysages uniformisés, voilà le bilan. Désormais, plus de la moitié des forêts françaises sont composées d'une seule essence. Et, bien sûr, ce sont des écosystèmes entiers, variés et endémiques, qui sont détruits.
La France est une grande nation forestière. Les forêts recouvrent le tiers de notre territoire. C'est donc un bon sujet pour qui s'intéresse à l'avenir du pays. Ma collègue et co-présidente de notre groupe Mathilde Panot a lancé une commission d'enquête citoyenne sur le sujet : on visite les forêts en tous lieux du pays, on rencontre tous ceux qui, par leurs luttes et leur travail savent ce qu'il conviendrait de faire dans ce domaine. Ils savent. Nous savons quoi faire.
Une nouvelle sylviculture est à inventer : celle de la gestion durable des forêts, de la diversité des essences, des paysages de feuillus, des machines adaptées, du temps long et des circuits courts. Nous ne pourrons atteindre ces objectifs qu'à la condition d'affirmer le rôle de l'État, qui a toujours été déterminant dans la gestion de la forêt française. Qui va en forêt de la Joux pourra y voir les sapins plantés par Colbert, il y a trois siècles, pour la marine nationale. Ce n'est pas d'aujourd'hui que, sans l'organisateur suprême, rien ne va. Il faut donc reconstruire l'Office national des forêts, détruit après trente ans de saccage néolibéral.