Personne n'accepterait de travailler de longues journées, de longues semaines, sans pouvoir vivre de son travail. Or c'est aujourd'hui la situation de trop nombreux agriculteurs. Aussi faut-il redistribuer la valeur de manière plus juste tout au long de la chaîne qui unit les producteurs aux consommateurs. En même temps, il faut entendre cette demande légitime des consommateurs-concitoyens, d'une alimentation saine, sûre, durable. Elle l'est et, contrairement à ce que j'ai entendu tout à l'heure, le secteur agro-alimentaire français n'empoisonne pas nos jeunes concitoyens.
C'est pourquoi la martingale gagnante inscrite dans ce budget, c'est tout simplement : compétitivité, innovation, recherche et transition. Sans compétitivité, pas d'agriculture résiliente. Sans recherche, sans innovation, pas de transition, et sans transition, le lien sera rompu entre les citoyens et les agriculteurs. Aussi ce budget nous donne-t-il les moyens de nos ambitions. Toutes les actions que nous voulons mener y figurent et sont le moyen de la transition économique, sociale, environnementale ou agroécologique, le moyen aussi de former plus, mieux et partout avec « l'aventure du vivant ».
Les grands enjeux de ce budget pour 2020 évoquent les grands travaux d'Hercule. J'en citerai donc douze et j'espère qu'avec vous, mesdames et messieurs les députés, nous ferons avancer l'agriculture.
Il faut en premier lieu lutter inlassablement contre le dénigrement incessant.
Il faut ensuite soutenir et augmenter les revenus des paysans et assurer la durabilité des entreprises – je salue Grégory Besson-Moreau pour son rapport d'enquête ; mais il faudra aller plus loin, car il faudra bien que « ça paie ».
Dans le contexte du changement climatique, nombreux sont ceux qui m'ont interpellé pour que nous instaurions une assurance : ce ne sont plus les impôts des Français qui doivent payer les aléas climatiques mais la solidarité assurantielle. Dès l'année prochaine, soixante retenues d'eau devront être créées pour peu que les dossiers soient déposés.
Transformer notre agriculture, c'est aussi transformer nos pratiques. Je pense au plan Écophyto. Quant au budget de la recherche, non seulement il n'est pas en baisse – il a encore moins disparu – , mais, encore cette année, il augmente parce que c'est par la recherche que nous avancerons. L'un d'entre vous a évoqué l'INRA : il faut savoir qu'il s'agit du premier institut de recherche agronomique du monde ; sa fusion avec l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture – IRSTEA – va en faire le mastodonte de la recherche qui permettra la transition agroécologique.
Le budget préserve l'excellence de notre alimentation, et je suis au regret de vous rappeler que l'augmentation du diabète et de l'obésité des jeunes, ce n'est pas l'agriculture qui en est responsable, mais tout simplement des habitudes alimentaires qu'il faut changer. Ce ne sont certainement pas les circuits courts à la ferme qui font grossir les jeunes.
En ce qui concerne la formation des jeunes, cette année encore, plus de 37 millions d'euros seront mobilisés. En outre, disons-le clairement : aujourd'hui, le renouvellement des générations est presque assuré. Il part en effet à la retraite environ 15 000 agriculteurs par an et, cette année, 12 000 se sont installés – on n'est donc pas loin du renouvellement.
J'en viens à la PAC, que vous avez évoquée. Bien sûr, elle doit être maintenue : cessons de répéter que la France accepterait que le budget de la PAC baisse. Certes, il diminuera mécaniquement du fait du Brexit, mais la volonté de la France est qu'il se maintienne, en euros constants, au niveau des accords de Madrid. Or ce sont plutôt vos amis politiques qui, au sein de l'Union européenne, sont favorables à la baisse du budget de la PAC pour en transférer une partie vers les fonds de soutien aux réfugiés. La France, je le répète, ne laissera pas les crédits de la PAC baisser.
Pour ce qui est du Brexit et de la pêche, plus de 340 postes ont été créés.
On déplore par ailleurs que rien n'avance en matière d'agriculture biologique. Mais aidez-nous à avancer ! On a compté quelque 6 000 conversions l'année dernière et 10 % des agriculteurs produisent du bio. Le fonds avenir bio est crédité de 8 millions d'euros, qui s'ajoutent aux crédits versés par la PAC et à ceux provenant des mesures agro-environnementales et climatiques.
Il s'agit de transformer les filières ultramarines. Nous allons augmenter les crédits de 179 millions d'euros en la matière. N'oublions jamais les territoires d'outre-mer qui ont une agriculture très importante.
Enfin, dernier des douze travaux, nous devons assurer la résilience de la forêt. J'ai pris de fortes mesures concernant la gouvernance de l'ONF : un directeur va être nommé ; j'ai engagé des sommes sonnantes et trébuchantes pour faire face aux scolytes ; et nous allons travailler sur les essences.
J'évoquerai d'autres questions à l'occasion de la discussion des amendements. Je réponds toutefois à la question essentielle posée par M. de Courson. L'agriculture française bénéficie de 21 milliards d'euros d'aides et le budget français y contribue directement à hauteur de 3 milliards d'euros – nous pourrons vous remettre un tableau à ce sujet. C'est dire l'importance du budget consolidé de la PAC, c'est dire l'importance des fonds européens, l'importance des dépenses fiscales, des réductions de cotisations. En effet, l'exonération totale de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques– TICPE – sur le gazole non routier est maintenue, l'épargne de précaution encouragée, le dispositif concernant les travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi – TO-DE – rétabli, le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » – CASDAR – ne bouge pas.