Intervention de Joaquim Pueyo

Séance en hémicycle du mercredi 30 octobre 2019 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Défense ; anciens combattants mémoire et liens avec la nation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoaquim Pueyo :

Je veux vous livrer quelques observations concernant les missions « Défense » et « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

Au sujet de la mission « Défense », je tiens à être objectif et à saluer une augmentation des crédits de 1,6 milliard d'euros, ce qui porte ce budget à plus de 37 milliards hors pensions pour 2020, comme l'indique le document budgétaire. Même si l'on pourrait l'imaginer plus important, l'effort de défense de notre pays est réel : il atteint 1,86 % du PIB, ce qui nous rapproche de l'objectif de 2 % en 2025 fixé par la loi de programmation militaire.

Je veux également souligner des évolutions positives : des efforts en matière d'innovation, avec l'augmentation des crédits alloués aux études ; et la livraison de matériels promis depuis des années à nos soldats, notamment 128 blindés Griffon, qui concrétisent le programme Scorpion, et des hélicoptères NH90, très attendus, car la fonction stratégique de protection pâtit des tensions que connaît le parc d'aéronefs. Il en va de même pour les A400M Atlas et la commande de C-130 rénovés, qui viendront soulager le transport aérien.

L'évolution positive des budgets consacrés à l'entretien programmé des matériels et au maintien en condition opérationnelle – MCO – est également appréciable. Nous devons nous assurer que les personnels déployés disposent des matériels nécessaires à l'accomplissement de leurs missions, alors même que ces derniers sont massivement employés dans des zones de combat qui les mettent à rude épreuve. Dans les mois à venir, une attention particulière devra toutefois être portée à la réforme du MCO aéronautique.

La création de 300 emplois pour renforcer les services de renseignement et le cyber mérite également d'être saluée. Face à l'importance de la menace dans le domaine numérique, notre pays doit pouvoir répondre aux agressions, de plus en plus fréquentes, de certains États ou entités proches de ceux-ci. Il sera probablement nécessaire de revenir sur les conclusions de la revue stratégique de défense, car cette menace, loin de s'estomper, s'accroît actuellement.

Cependant, madame la ministre, je souhaite souligner certains sujets d'inquiétude. La question de la fidélisation reste centrale. Nous reconnaissons vos efforts sur ce point, puisque 40 millions d'euros sont prévus pour la fidélisation et l'attractivité des métiers de l'armée. Un budget de 12,5 millions permettra d'accorder une prime de lien au service allant de 5 000 à 25 000 euros aux personnels militaires opérant dans des spécialités sous tension face au privé. Néanmoins, ce problème concerne l'ensemble des militaires, notamment les hommes du rang : si l'on veut attirer de plus en plus de jeunes dans nos armées, il est donc temps de songer sérieusement à étendre ces primes ou, de manière plus ambitieuse, à réévaluer le point d'indice.

L'immobilier constitue un autre point important. L'effort de 120 millions d'euros sur l'action soutenant la politique immobilière permettra la création et l'adaptation de logements, mais on assiste à une baisse du budget fléché vers les aides au logement, notamment celles visant à soutenir les familles dans des zones de forte tension locative comme la région parisienne. Le groupe Socialistes et apparentés proposera un amendement afin de renforcer cette politique immobilière, qui touche à la vie quotidienne des militaires.

Par ailleurs, certains matériels font toujours défaut et entament les contrats opérationnels. Il s'agit notamment des avions ravitailleurs MRTT ou des nouveaux patrouilleurs d'outre-mer, dont les premières livraisons ne sont prévues qu'après 2022, comme l'indique le bleu budgétaire.

Il faudra également surveiller certains points dans les années à venir. Les retours d'expérience des opérations au Sahel et au Levant doivent orienter les choix budgétaires. Or l'opération Chammal a fait ressortir des lacunes déjà connues, comme notre dépendance en matière de ravitaillement en vol ou le manque de drones. Elle a également révélé des insuffisances concernant les stocks de munitions, leur puissance inappropriée à certaines zones de combat, ou les armes anti-drones.

Pour finir, je souhaite faire part de nos inquiétudes concernant certains points de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

Tout d'abord, l'action « Politique de mémoire » du programme no 167, « Liens entre la nation et son armée », diminue de 30 %. Les années à venir ne seront certes pas marquées par autant de célébrations que celles du centenaire de la première guerre mondiale, mais ce budget sert à faire vivre une mémoire. En outre, cette baisse doit être en partie compensée par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, mais nous doutons que les moyens de celui-ci suffisent.

Nous avons également réitéré notre demande que la limite d'âge pour que les titulaires d'une carte du combattant ou d'une pension d'invalidité ou de victime de guerre disposent d'une demi-part fiscale supplémentaire soit ramenée à 70 ans, et qu'elle soit supprimée pour les veuves. Actuellement, pour que celles-ci bénéficient de cette demi-part, il faut que leur conjoint soit décédé après son soixante-quatorzième anniversaire et qu'elles-mêmes soient âgées de plus de 74 ans. Nous pensons qu'exclure de ce dispositif les veuves dont le mari est mort avant ses 74 ans constitue une injustice qu'il faudrait réparer.

En bref, mon impression générale au sujet de la mission « Défense » est très positive, mais je me pose des questions au sujet de la mission « Anciens combattants ». J'espère donc, madame la ministre, que vous pourrez répondre à nos amendements.

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