Je voudrais aborder le sujet qui nous occupe ce matin sous l'angle de notre propre commission, c'est-à-dire les affaires étrangères. Sans reprendre les arguments qui ont été développés par mon camarade Bastien Lachaud à la commission de la défense, j'estime que l'on aurait dû commencer par parler de l'usage qui est fait de nos moyens. Que va-t-il se passer au Mali ? Que faisons-nous ? Comment allons-nous y rester ou en sortir ? Que dit le projet de budget à ce sujet ? De même, pour pratiquement toutes les interventions françaises, on aurait dû en faire le tour pour savoir de quelle manière on y affecte ou on y récupère des moyens.
J'ajoute qu'une grande modification s'est opérée dans l'ordre international sans que l'on semble sans émouvoir. Jusqu'à présent, un traité international de démilitarisation de l'espace était en vigueur. Les Nord-Américains ont décidé que c'était fini et nous, Français, avons emboîté le pas. Pourquoi pas ? Pour ma part, j'en suis assez d'accord, compte tenu des conditions créées par les Américains. Nous créons un état-major de l'espace. Quelle en est la stratégie ? Qu'est-ce qui l'accompagne ? Quels en sont les moyens au-delà du financement de l'état-major ? Que va-t-on faire ? Que programme-t-on ? Nous n'en saurons rien.
Cela revêt tout de même une grande importance. On peut se réjouir d'acheter des arcs, des flèches et même des arbalètes, mais c'est assez vain quand d'autres ont des fusils. Or, depuis l'espace, on peut interrompre toutes les communications terrestres. Par conséquent, les neuf dixièmes du matériel militaire français ne serviront strictement plus à rien, à rien du tout !
La même remarque peut être faite à propos de la cyber-armée. Nous n'en entendons plus parler. Nous savons que des moyens y sont affectés, mais lesquels ? Pour quelle stratégie ? Dans quel délai ? C'est pourtant là le coeur des guerres du futur.
J'ai apprécié les euphémismes de mon collègue Guy Teissier à propos de l'OTAN. Il nous a dit d'une manière élégante et à sa manière que l'on ne savait plus très bien à quoi cela servait mais qu'on voyait bien que cela aggravait les problèmes plutôt que cela les réduisait. Il m'amuse de me réclamer de lui pour vous dire qu'à mon avis, l'OTAN ne sert strictement à rien. Si mes informations sont bonnes, nous venons d'essuyer en Turquie un tir d'une armée de l'OTAN auquel nous avons riposté. Nous avons là-bas 300 membres des forces spéciales, qui ne sont pas des boy-scouts et donc en état de faire un maximum de ravages pour faire payer ceux qui nous ont agressés et qui sont censés être nos alliés.
L'OTAN, c'est une machine à faire fonctionner les 2 % de notre budget, dont personne ne nous dit pourquoi 2 %, pourquoi pas 3 %, 4 % ou 1 % ? Si c'est la guerre, c'est 10 %. Une proportion ne veut rien dire, sinon qu'elle nous oblige à monter en puissance dans un budget. Pour quoi faire ? Pour acheter du matériel qui soit interopérationnel avec celui des Nord-Américains et rien d'autre. Autrement dit, ces 2 % sont une machine à relancer l'économie d'armement des Américains et pas la nôtre.
La preuve en est donnée par ce qui est en train de se passer à Alstom. Les turbines qui sont fabriquées là-bas et qui sont maintenant dans la main des Nord-Américains équipent la plupart de nos matériels militaires pourvus de turbine. Que ceux qui croient que les Américains sont nos amis et toujours prêts à nous faire des sourires se souviennent de ce qui s'est passé quand nous avons décidé de ne pas les accompagner en Irak. Ils ont mis un embargo sur le matériel militaire pendant six mois. Pendant six mois, les catapultes du porte-avions Charles de Gaule ne pouvaient plus obtenir de pièces de rechange. Ce seul exemple résume ce que j'en pense. Évidemment, il n'y a pas de montée en puissance à 2 % sans une industrie d'armement française indépendante. Sinon on achète le matériel des autres et on n'est pas en état de décider ce qu'on fait quand il y a besoin d'agir.