Dans le rapport de Mme Boyer, je ne peux que regretter l'étude partielle et partiale du sujet et un mélange odieux de l'immigration régulière, de l'immigration irrégulière et de l'asile. Faut-il ici, en commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale française, comme l'a dit Jean-Michel Clément, faire le distinguo entre un migrant et un réfugié ? L'asile ne peut pas être une variable d'ajustement de la politique migratoire en France. Cela ne répond qu'à nos engagements internationaux de la convention de Genève.
Le rapport traite de sujets importants mais essentiellement sous l'angle financier, qu'il s'agisse des flux, de la santé ou des mineurs isolés étrangers. Je partage certains constats, tels que la non-sincérité du budget de l'asile, la nécessité de revoir le dispositif d'accueil des MNA, qui ne peut être laissé à la responsabilité des départements et souffrir d'une grande différence de traitement selon territoires, et la nécessité de revoir le règlement de Dublin, même si ce n'est pas pour les mêmes raisons que notre rapporteure. En revanche, je déplore le traitement fait de l'étranger malade, toujours considéré comme un imposteur ; je déplore le discours tenu sur un afflux plus massif en France qu'ailleurs, alors que les chiffres démontrent notre accueil bien timoré ; je déplore la proposition de fixation de quotas, qui méconnaîtrait les conventions internationales qui nous lient et la dignité des personnes ; je déplore l'orientation souhaitée de l'aide publique au développement, c'est-à-dire un tarissement des flux par des mesures sécuritaires et non des actions sur les causes de l'immigration, sujet dont nous discuterons la semaine prochaine. Je déplore aussi la proposition visant rétablir le délit de séjour irrégulier, dont l'abrogation découle, je le rappelle, de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) et de la Cour de cassation. Je déplore enfin l'absence totale de prise en compte de la situation des étrangers actuellement en situation régulière sur notre territoire, qui par l'action des services de l'État et des délais de traitement, se retrouvent en situation irrégulière.
J'en arrive au projet de budget. On ne peut que regretter qu'il soit fondé sur l'hypothèse d'une stabilisation de la demande d'asile et d'une baisse de 10 % du nombre de demandeurs placés sous procédure Dublin, hypothèse qui avait déjà sous-tendu le budget pour 2019 et qui a rapidement été dépassée. La sous-estimation systématique des montants dédiés à l'allocation aux demandeurs d'asile ne permet pas l'établissement sincère du budget, puisque 444 millions d'euros y sont aujourd'hui dédiés, soit une hausse de 32 % par rapport à la loi de finances initiale.
Concernant l'immigration, le projet de budget ne pointe pas les moyens dédiés à l'accueil et au traitement de la situation des étrangers en situation régulière et irrégulière sur le territoire français par les préfectures. Il serait nécessaire d'étudier le programme 354 Administration territoriale de l'État, qui prévoit les moyens des préfectures en matière de délivrance des titres. Pour 2020, le budget qu'il est prévu d'allouer à ce programme est en baisse de plus de 16 % et de 471 équivalents temps plein. Les associations d'accompagnement des étrangers ont récemment manifesté pour dénoncer les conditions d'accueil et de traitement de ces dossiers. En effet, aujourd'hui, en France, des personnes en situation régulière ayant un emploi et un logement se retrouvent précarisées et sans papiers, uniquement en raison des délais de traitement de leur dossier par les préfectures. Je ne compte plus dans ma circonscription, et je ne dois pas être la seule, le nombre de personnes dont la situation bascule uniquement en raison de ces délais de traitement, ce qui est absolument inacceptable.
En résumé, nous donnerons un avis défavorable aux crédits de cette mission.