Intervention de Franck Riester

Réunion du jeudi 24 octobre 2019 à 9h35
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Franck Riester, ministre de la Culture :

Je vous remercie pour l'ensemble de vos remarques. Concernant la presse, je souhaiterais remettre vos questions en perspective. La réforme de la loi Bichet pour la modernisation de la distribution de la presse implique une nouvelle régulation, plus de temps accordé aux opérateurs de messagerie actuels, pour qu'ils puissent s'adapter aux nouvelles règles, et des moyens de gestion complémentaires pour les marchands de journaux. Je suis très attaché à soutenir les marchands de journaux dans leur activité. Cette loi permettra de les accompagner. Ils sont des têtes de pont de la culture et de l'information dans les territoires et représentent un maillage essentiel. Dans le plan de filière, nous examinerons si nous pouvons les aider encore davantage, pour qu'ils puissent moderniser leurs locaux.

Par ailleurs, une loi récente a créé les droits voisins au droit d'auteur pour les éditeurs et les agences de presse. La France était à la pointe des négociations sur la directive sur les droits d'auteur. Dans le cadre d'un excellent partenariat entre le Sénat, l'Assemblée nationale et le Gouvernement, la France est le premier pays à la transposer. Le Président de la République est très attentif à ce que les spécificités du droit d'auteur soient au coeur de nos priorités, tant dans les politiques nationales qu'européennes.

Aujourd'hui, alors que la loi Assouline est entrée en vigueur, nous ne pouvons que dire avec force que nous trouvons inacceptable que Google refuse de l'appliquer. Nous soutenons la décision des éditeurs de presse de porter plainte auprès de l'Autorité de la concurrence. Le Président de la République et la Chancelière allemande, lors du conseil des ministres franco-allemands, ont indiqué très clairement qu'ils soutenaient toutes les initiatives qui visaient, au niveau tant national qu'européen, à s'assurer que la loi soit appliquée. Le vote de cette loi a pour origine la notion de partage de la valeur entre ceux qui créent les contenus – les éditeurs et agences de presse et les journalistes – et ceux qui diffusent ces contenus sur internet, en l'occurrence Google et d'autres GAFA. Ces derniers doivent appliquer la règle et partager cette valeur pour permettre la continuité de production des contenus, si essentiels à nos démocraties. Le Gouvernement est totalement mobilisé, tant en France qu'en Europe, pour que la loi soit respectée. J'aurai l'occasion, le 21 novembre prochain, lors du conseil des ministres de la Culture de l'Union européenne, d'inscrire ce sujet à l'ordre du jour, afin de définir au niveau européen un plan d'action très strict en la matière.

Madame Magne, les maquettes budgétaires doivent évoluer, nous regarderons ce point en détail. Avec mon collègue Bruno Le Maire, nous avons la volonté d'accompagner la presse. Nous travaillons ensemble, avec nos services, à la mise en oeuvre d'un plan de filière pour la presse, sur les propositions, entre autres, de l'Alliance de la presse. Nous aurons l'occasion, dans les semaines et les mois qui viennent, de revenir vers vous pour vous présenter nos décisions en matière d'aide à la presse et de plan filière presse.

Quant à la question du livre, nous sommes déterminés à aller loin pour l'année 2020 de la bande dessinée. C'est une discipline qui compte un très grand nombre de passionnés en France, nous devons l'accompagner. Beaucoup d'opérations sont prévues dans les territoires au cours de l'année à venir. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Je vous remercie, madame Calvez, d'avoir abordé cette question.

Concernant la BNF, nous travaillons avec ses équipes. Nous leur avons demandé des efforts, car chaque administration et institution doit contribuer à l'effort de maîtrise de nos comptes publics. La BNF va en ce sens. Nous espérons que ces efforts seront soutenables, nous pensons qu'ils le sont, mais restons à l'écoute des équipes et de la direction.

À propos du théâtre privé, nous disposons de temps pour examiner avec l'association qui gère cette taxe affectée les modalités de transformation du fonds de soutien. Je souligne que nous avons en premier lieu décidé la suppression d'une taxe. Ceux qui payaient cette taxe et en retour bénéficiait du fonds n'auront plus à la payer. Monsieur Bournazel, je ne vous suis pas complètement. Alléger la fiscalité de ces opérateurs est une bonne chose. Je comprends toutefois les interrogations et les inquiétudes sur la façon dont les moyens seront pérennisés pour ces théâtres privés, puisqu'il s'agit bien de compenser et de maintenir les budgets. Nous avons deux ans pour travailler avec les différents acteurs à l'évolution du dispositif d'aide au théâtre privé, notamment parisien.

Je vous remercie tous et toutes d'avoir été les acteurs de la création du centre national de la musique (CNM), et d'avoir reconnu qu'un effort important de 7,5 millions d'euros est réalisé dès l'année prochaine, pour abonder les différentes institutions qui fusionneront au sein de cette structure. Au regard des 8,6 millions d'euros que l'État consacrait à ces différentes institutions, nous constatons que le budget double quasiment dès cette année. Nous sommes tout à fait d'accord avec M. Bois et Mme Cariou concernant le budget à terme pour le CNM, à l'horizon de deux ou trois ans, qui s'élèvera à environ 20 millions. Madame Magne, nous aurons l'occasion de le démontrer, avec votre soutien, mesdames et messieurs les députés, ainsi qu'avec celui des sénateurs et sénatrices, pour les années suivantes. L'État est volontaire pour conforter le CNM à l'avenir, avec un budget de 20 millions d'euros.

Je vois des réactions, j'entends des soupirs… Saluons déjà les 7,5 millions nouveaux pour la musique ! Il en va toujours ainsi, il en faudrait toujours plus ! Reconnaissons que, dès 2020, ce sont 7,5 millions qui viendront abonder le fonctionnement du CNM. Nous atteindrons ensuite les 20 millions. La volonté très nette de ce Gouvernement d'accompagner la musique ne peut être niée.

Concernant le fonctionnement du CNM, nous travaillons avec force et détermination avec les différents acteurs.

Quant au CNC, il s'agit de rendre équitable la fiscalité entre les acteurs historiques et les nouveaux entrants. Nous ne créons pas de nouveaux contribuables, et la taxe sera à hauteur de 5,15 % l'année prochaine. Le taux sera stable a priori pour les années suivantes.

Pour l'assiette de la taxe, Madame Calvez, il nous faut être prudents. Mais les informations dont nous disposons nous permettront de l'ajuster. Nous travaillerons aussi sur la question des abattements. Les acteurs historiques voient baisser la pression fiscale, puisque nous augmentons la fiscalité des acteurs nouveaux et nous la réduisons pour les acteurs historiques, selon des modalités différentes en fonction de chaque situation. Nous verrons ensuite si les abattements sont pertinents ou non.

Je terminerai sur la question de l'audiovisuel. Un projet vous sera prochainement présenté de création, pour ce qui concerne l'audiovisuel public, d'un groupe public. Nous aurons l'occasion d'y revenir. Le président de la République et le Premier ministre se sont engagés à maintenir une fiscalité spécifique pour l'audiovisuel public. Il n'empêche que cette fiscalité doit pouvoir s'adapter en fonction de la trajectoire financière qui est demandée à l'audiovisuel public. Nous demandons effectivement un effort, qui – contrairement à ce qui a été dit – n'a pas fait l'objet d'arbitrages de dernière minute. Tout le monde est au courant de ce plan 2018-2022, chacun sait ce qu'il en est et nous l'appliquons avec constance. Voilà un élément de sécurité et de sérénité pour les entreprises de l'audiovisuel public, qui savent exactement quelles seront leurs ressources financières futures. Certes, nous demandons un effort – j'en conviens –, mais nous estimons qu'il est soutenable. En fonction du rendement de la CAP, nous l'ajusterons, afin qu'elle corresponde aux besoins financiers prévus par la trajectoire financière pluriannuelle.

En 2020, France Ô et France 4 arrêteront leurs activités. Nous sommes cependant déterminés à ce que l'offre jeunesse et l'offre Outre-mer soient très présentes à l'avenir dans l'offre de France Télévisions. Nous avons pris la décision de signer un pacte pour la visibilité des Outre-mer avec France Télévisions, pacte qui inclut des engagements très clairs et des objectifs chiffrés, et un contrôle de ces objectifs et engagements, pour permettre à tous les programmes, animateurs et producteurs de l'Outre-mer de pouvoir être toujours au coeur des enjeux de l'audiovisuel public.

Concernant France 3 et France Bleu, l'offre de proximité fait partie des missions et objectifs majeurs de l'audiovisuel public. Nous continuerons à faire en sorte de l'améliorer. Cela ne signifie pas que nous ne pouvons opter pour une organisation différente, pour être plus près des territoires. Souvent les entreprises sont centralisées au coeur des métropoles régionales, alors que des besoins se font sentir dans les territoires.

L'offre numérique fait partie de nos priorités. Les usages de nos compatriotes évoluent, du fait de la révolution numérique. Nous devons être plus présents dans le domaine des offres numériques, tout en étant – et je le reconnais bien volontiers – mieux coordonnés et plus lisibles afin de rendre plus visible auprès de nos compatriotes l'amélioration des contenus de l'audiovisuel public. Nos objectifs sont ceux d'une offre plus diversifiée, d'une offre internet riche, d'une meilleure protection des publics – ce qui va bien au-delà du domaine de l'audiovisuel public.

Nous avons oeuvré, grâce à une loi récente, pour la lutte contre la désinformation. La proposition de loi de votre collègue Laetitia Avia contribue à lutter contre les contenus haineux et à protéger les publics. Nous menons un travail important dans la lutte contre les contenus pédopornographiques. Cette protection des publics est un élément important de ce que nous souhaitons faire en matière d'audiovisuel. Lors de la présentation du projet de loi, nous pourrons aussi évoquer les mesures possibles en matière d'accès au cinéma, puisque nous allons supprimer un certain nombre de jours interdits.

Si nous revenons spécifiquement à la question de l'audiovisuel public, nous voyons bien que notre ambition est forte : création d'un groupe public, réaffirmation des missions de service public et demande d'efforts de réorganisation, comme nous le demandons à chacun des acteurs de la sphère publique dans notre pays. Le rétablissement des comptes publics est une priorité.

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