Intervention de Sophie Cluzel

Réunion du mercredi 30 octobre 2019 à 17h00
Commission des affaires sociales

Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées :

Madame la rapporteure pour avis, culture, sport et loisirs sont en effet essentiels et font l'objet d'un travail pleinement interministériel. Nous voulons, par exemple, avoir des crèches inclusives, en les faisant bénéficier d'un « bonus inclusif », qui est à l'étude par la CNAF. Il en va de même des centres de loisirs. Nous travaillons sur les fonds de territoires pour aider les communes, singulièrement les plus petites d'entre elles, à mieux accueillir les enfants en situation de handicap. S'agissant du sport, nous appliquons une feuille de route très dense – « Sport et handicap » – avec la ministre des sports, destinée à assurer l'accès au sport pour tous. Elle connaîtra une accélération avec la préparation des Jeux olympiques et paralympiques. Comme vous le savez, mon secrétariat d'État est rattaché au Premier ministre et, dans chaque ministère, un haut fonctionnaire est en charge de la société inclusive et travaille à l'application de toutes ces actions.

Je vous remercie, madame Cloarec-Le Nabour, d'avoir salué le travail engagé et d'avoir rappelé que l'emploi accompagné augmente assez fortement – de fait, plus de 3 millions de personnes en bénéficient. C'est un vrai levier d'insertion professionnelle. Nous devons développer le job coaching, qui accompagne la personne et incite le collectif de travail à ouvrir les portes de l'entreprise à la mesure des demandes qui lui sont adressées – les services offerts étant réactivables et pérennes.

Monsieur Perrut, vous avez relevé l'augmentation de l'AAH tout en regrettant que cette prestation soit toujours conjugalisée. C'est le cas de nombre d'allocations, mais l'AAH est beaucoup plus favorable, puisque le foyer bénéficie tant de l'abattement de droit commun de 10 % sur les revenus d'activité que d'un abattement spécifique de 20 %. On tient donc déjà compte, par ces mesures bénéficiant à l'ensemble du couple, de la situation de handicap.

Je tiens à préciser que personne n'est perdant. Nous fléchons l'allocation en direction de ceux qui en ont le plus besoin. Je rappelle que 90 % de ses bénéficiaires – dont le nombre excède 1,1 million – la perçoivent à taux plein. Son montant se rapproche du seuil de pauvreté. Nous réalisons un accompagnement en matière d'aide personnalisée au logement. Par ailleurs, nous avons développé la complémentaire santé, en offrant un panier de soins beaucoup plus étoffé et en réduisant considérablement le reste à charge pour les personnes en situation de handicap, lesquelles vont voir leur pouvoir d'achat augmenter. Nous nous employons aussi à abaisser le coût des aides techniques en réexaminant la liste de ces dernières, qui ne l'avait pas été depuis vingt ans et qui est totalement obsolète. Nous entendons ainsi parvenir à un juste remboursement des aides techniques dont les personnes ont besoin. Il s'agit, là encore, de réduire le reste à charge, en diminuant les coûts. De la même façon, nous avons lancé un groupe de travail avec les associations pour mieux rembourser les fauteuils roulants et développer l'économie circulaire. Cela permettra, là encore, de réduire les coûts et, partant, de diminuer le reste à charge, ce qui est mon objectif premier.

Je veux dire un mot de la prestation de compensation du handicap (PCH), qui est délivrée au sein des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). L'aide humaine assurée grâce à la PCH est exonérée d'impôt sur le revenu, ce qui contribue aussi au pouvoir d'achat des bénéficiaires.

En outre, l'ONDAM médico-social, augmente de 2,4 % – ce qui représente un effort de 300 millions d'euros – pour atteindre 12,1 milliards, hors congé proche aidant, qui relève du PLFSS 2020. Nous nous efforçons de prendre en considération les besoins des personnes handicapées dans leur globalité. Je sais que vous y êtes extrêmement sensibles.

Enfin, le plan d'accompagnement des aidants, doté de 400 millions d'euros, propose, par exemple, des plateformes de répit – en particulier grâce à un accueil temporaire – et des initiatives de « relayage ». Il s'agit véritablement d'une stratégie globale pour soutenir ces personnes. Par ailleurs, comme vous l'avez souligné, nous entendons valoriser les professionnels, sur la base du rapport El Khomri, sur lequel nous allons travailler avec Agnès Buzyn, dans la perspective du plan grand âge et autonomie.

Monsieur Hammouche, vous avez évoqué la bientraitance, sur laquelle la Haute Autorité de santé (HAS) est en train de travailler. Je veux saluer, à ce propos, l'excellent rapport de Denis Piveteau et Alice Casagrande. Des groupes de travail sont à l'oeuvre. Nous recevons de très nombreuses sollicitations de personnes désireuses d'y participer. Mon objectif est de réaliser une enquête directement auprès des personnes concernées, dans les établissements médico-sociaux, pour connaître leur niveau de satisfaction. L'établissement de ce lien direct constitue un enjeu essentiel, car nous devons construire notre politique publique pour les personnes. Ce ne sera pas simple, car certains résidents des établissements médico-sociaux éprouvent parfois des difficultés à communiquer, mais l'amélioration de la prise en considération des besoins de ces personnes constitue, j'y insiste, un enjeu sociétal essentiel. Nous construisons une très belle feuille de route avec la HAS.

Monsieur Christophe, vous avez souligné la grande avancée que constituait l'accès au droit, les droits à vie, la simplification. De fait, nous devons renforcer la simplification pour les personnes en situation de handicap, qui ne cessent de nous dire combien les politiques menées sont complexes. Il y a là un enjeu primordial. Nous devons y travailler avec les 101 MDPH, et donc avec les départements. C'est une question que vous avez largement évoquée. Pour ma part, je m'appuierai sur la stratégie de contractualisation. On déplore une iniquité en termes d'évaluation, de traitement, de prise en compte des besoins des personnes. Nous nous efforçons d'y remédier avec l'ADF et un grand nombre de départements. J'ai lancé la démarche « territoires 100 % inclusif » avec plusieurs d'entre eux. On perçoit bien la nécessité d'améliorer le parcours des personnes, leur accès au droit et, surtout, de simplifier. Si les droits à vie constituent une avancée considérable, ils ne sont pas encore assez développés. Je fais mon tour de France, en assurant des permanences citoyennes dans les MDPH, pour m'assurer de l'application de ces mesures, discuter avec les personnes et réfléchir aux moyens de simplifier les règles.

Monsieur Perrut, vous avez fait part de vos attentes en matière d'école inclusive. Je tiens à rappeler que l'éducation nationale consacre plus de 2,6 milliards à la scolarisation des élèves handicapés. Je vous donne rendez-vous lundi 4 novembre, date à laquelle nous allons installer le comité de suivi du grand service public de l'école inclusive. Fidèles à notre méthode, nous avons procédé à une concertation avec l'ensemble des parties prenantes avant d'élaborer ce grand service public, de le mettre en place – et, par la suite, d'en assurer le suivi. Lundi prochain, nous allons procéder à une évaluation, qui vous sera communiquée, si vous le souhaitez, pour constater les avancées réalisées. Une vraie dynamique est à l'oeuvre. Plus de 25 000 élèves en situation de handicap ont poussé la porte de l'école ; nous constatons un puissant mouvement en ce sens. L'éducation nationale a bâti une organisation exceptionnelle et, surtout, les professionnels du handicap apportent pleinement leur coopération, entrent dans les écoles, offrent leur concours ; des équipes mobiles, des pôles inclusifs d'accompagnement localisés se développent. Je pourrai vous détailler très précisément ces mesures à l'issue du comité de pilotage du 4 novembre. Nous pourrons reprendre contact à ce sujet.

Beaucoup de questions ont été posées sur le revenu universel d'activité, en relation avec l'AAH. Nous avons engagé une concertation avec les associations. Plusieurs d'entre elles, issues du Conseil national consultatif des personnes handicapées, ont exprimé leurs inquiétudes. Christelle Dubos et moi-même les avons reçues et leur avons exposé les garanties que nous souhaitions mettre en place. D'abord, le versement de l'AAH ne serait pas conditionné à la reprise du travail, puisqu'on sait que près de 80 % des allocataires sont empêchés de travailler, ou peuvent très difficilement le faire. L'ensemble des crédits consacrés au handicap seront préservés : tel était le postulat de base. Cela étant, nous entendons mieux prendre en considération, à travers le RUA, les attentes de ceux qui veulent retravailler. Nous nourrissons, en la matière, une ambition très forte. C'est pourquoi je me suis engagée à réunir un groupe de travail spécifique pour améliorer l'insertion en fonction des parcours professionnels. Il nous faut améliorer la lisibilité du dispositif. On l'a dit complexe, il est aussi, parfois, illisible : comment savoir quel sera son salaire six mois après avoir repris une activité ? En effet, je vous rappelle que l'AAH est maintenue pendant le semestre suivant la reprise de l'activité, puis qu'elle diminue en sifflet. Je le répète, le mécanisme est incompréhensible pour ses bénéficiaires. Le RUA permettra de mettre à plat le dispositif et d'améliorer la reprise du travail, en améliorant la lisibilité de notre politique publique.

Par la sanctuarisation des crédits consacrés au handicap et l'absence de conditionnalité du RUA à la reprise de l'activité, nous montrons que nous tenons compte de la spécificité des personnes en situation de handicap. Nous pourrons développer l'accès à l'emploi accompagné et le service public de l'insertion. Tout se tient, et c'est pourquoi nous travaillons main dans la main, avec Christelle Dubos, pour appliquer cette stratégie.

Comme vous l'avez souligné, les femmes handicapées subissent une double peine, puisqu'elles sont deux fois plus victimes de violences. Nous travaillons avec Marlène Schiappa à ce sujet. Nous avons proposé, dans le cadre du Grenelle contre les violences conjugales, de recenser les centres de ressources existants et de les étendre à toutes les régions, afin que les femmes handicapées, comme les professionnels, aient accès à ces ressources. La formation des professionnels doit être le maître-mot pour libérer la parole des femmes handicapées.

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