L'année dernière, lors de l'étude du PLF 2019, je déplorais déjà le fait que le financement des JOP de Paris 2024 se fasse au détriment des clubs sportifs amateurs. À mon grand regret, je constate que vous persistez cette année encore dans cette voie.
La hausse globale de 9,8 % annoncée pour le ministère des Sports intervient après deux années de baisse successives et elle masque un fléchage des crédits complètement déséquilibré.
La plus grande partie de cette hausse va au programme des JOP 2024 destiné au financement des infrastructures, qui voit son budget presque doubler avec une augmentation de 63 millions d'euros. Mais parallèlement, l'enveloppe destinée à l'ANS, créée avec l'ambition affichée de soutenir les fédérations et les infrastructures sportives dans les territoires, diminue quant à elle de 7 millions d'euros.
De nombreux acteurs du sport s'inquiètent du déploiement trop lent des moyens de cette nouvelle agence dans les territoires et déplorent déjà son caractère éminemment technocratique. Comment voulez-vous que les fédérations s'autonomisent si vous ne leur en donnez pas véritablement les moyens ?
La pratique sportive repose sur des millions de citoyens et de citoyennes qui donnent de leur temps pour faire vivre les clubs. Par vos choix budgétaires, vous faites peser de plus en plus sur leurs épaules la responsabilité d'organiser la vie sportive de la Nation.
Avec l'ANS, vous actez une forme de rupture dans la continuité du service public du sport, qui annonce sans nul doute le déclin du ministère des Sports. Vous souhaitez visiblement mettre fin au rôle prépondérant des pouvoirs publics dans l'organisation et le financement du sport français, au profit de partenariats publics-privés.
L'État ne peut pas simplement se désengager des territoires et attendre qu'une main invisible organise miraculeusement le secteur sportif. Le développement des outils numériques et la multiplication des contrats précaires ne sauraient répondre aux besoins des animations sportives, qui manquent cruellement de moyens humains. Comme à votre habitude, vous privilégiez une vision purement comptable et spéculative du sport. Fini le sport pour tous, vecteur de cohésion sociale ! Place au sport pour certains – en l'occurrence ceux qui peuvent se le payer.
Les moyens accordés pour les JO 2024 et l'amélioration des performances sportives doivent être proportionnés à ceux alloués à la pratique quotidienne et populaire du sport, car l'un ne va pas sans l'autre. En négligeant le sport amateur, vous creusez un fossé artificiel entre l'élite sportive et l'ensemble des pratiquantes et des pratiquants, qui constituent pourtant sa base et son vivier. Renforcer les moyens accordés aux clubs amateurs et développer les infrastructures dans les territoires est indispensable pour susciter des vocations chez nos futurs champions.
Par ailleurs, face au climat délétère qui s'installe dans notre pays, opposant telle catégorie de population à une autre, nous savons que le sport peut être un puissant vecteur pour transmettre les valeurs de fraternité, de tolérance, de coopération et d'entraide qui font malheureusement cruellement défaut aux colporteurs de haine et de rejet de l'autre qui salissent notre République. La pratique du sport a largement démontré son efficacité en tant qu'instrument d'inclusion sociale, de santé publique et d'épanouissement personnel.
Dans ce contexte, la responsabilité de votre Gouvernement est grande, selon que vous négligez cet outil indispensable pour tisser du lien social et favoriser le vivre ensemble, ou bien que vous vous engagez véritablement pour construire une politique sportive ambitieuse au bénéfice de tous les citoyens, quelles que soient leurs conditions sociales et leurs origines culturelles.
En attendant votre réponse, sur la base des éléments que vous proposez aujourd'hui, le groupe La France Insoumise (LFI) votera contre les crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative.