Au premier abord, les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » en 2020 semblent bénéficier d'une forte hausse, avec 238 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires pour un total de 1,23 milliard d'euros. Mais, comme pour tout budget, il y a l'affichage et il y a la réalité.
Ainsi, lorsque l'on prend en compte les effets de périmètre, avec le transfert vers le programme 219 de la masse salariale des CTS, et que l'on exclut le programme 350 consacré aux Jeux olympiques, les crédits consacrés au sport n'augmentent que de 1,7 million d'euros : je parlerai donc de stagnation.
Si l'on ajoute qu'au sein des crédits alloués à la SOLIDEO – société de livraison des ouvrages olympiques – 28 millions seulement seront dédiés aux équipements sportifs qui constitueront l'héritage des Jeux olympiques, l'augmentation du budget est plus proche de 4 % que des 10 % affichés par le Gouvernement, sachant que les moyens dévolus au sport ont baissé de 15 % entre 2017 et 2019, c'est-à-dire de presque 80 millions d'euros.
Cette baisse s'est traduite par une forte diminution du soutien apporté aux clubs et aux associations sportives sur les territoires, ainsi qu'aux équipements sportifs. À ce contexte budgétaire très défavorable, s'est ajoutée la suppression des contrats aidés.
De telles évolutions sont en complet décalage avec l'objectif ambitieux fixé par le Gouvernement d'augmenter de 3 millions le nombre de pratiquants sportifs d'ici 2024. Le budget proposé pour 2020 ne redresse pas la barre ; il ne fait que stopper l'hémorragie.
À la suite du Comité national olympique et sportif français – CNOSF – qui s'est exprimé dans une tribune publiée dans le journal L'Équipe cette semaine, je ne peux que déplorer que les amendements visant à déplafonner les taxes affectées aux politiques sportives que moi-même et plusieurs de mes collègues avons défendu lors de l'examen de la première partie du PLF n'aient pas été adoptés. Je pense notamment à ceux déposés par nos collègues Jean-Jacques Gaultier et François Cormier-Bouligeon, qui tendaient à rehausser le plafond de 15 millions d'euros : ils ont été adoptés en séance – vote annulé, parce que le Gouvernement a fait procéder à une seconde délibération à trois heures du matin.
Nous aurions pu avec de telles sommes augmenter les crédits de l'Agence nationale du sport destinés aux clubs et aux équipements sportifs locaux dans le cadre de la part territoriale, qui ont fortement baissé ces deux dernières années. Ce serait d'autant plus nécessaire que le budget de l'Agence s'avère d'ores et déjà insuffisant : ses ressources sont fixées à 278 millions d'euros, alors que ses dépenses en 2020, en incluant ses frais de fonctionnement de 7 millions d'euros, devraient atteindre 291 millions d'euros.
Je voudrais également vous alerter sur la situation des personnels du ministère des sports, en particulier sur celle des CTS : la situation s'enlise et la crise n'a que trop duré ; il faut désormais y mettre un terme. Le statut de fonctionnaire de ces personnels doit être maintenu, tout en déployant une politique moderne de gestion des ressources humaines et de formation continue.
La réforme des services déconcentrés de l'État pour les sports, la jeunesse et la vie associative, suscite également l'inquiétude avec la disparition des DRJSCS – directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale – et des DDCS – directions départementales de la cohésion sociale. Les personnels, qui seront désormais rattachés aux services de l'éducation nationale, craignent que leurs missions ne soient diluées, et que l'accent soit essentiellement mis sur le SNU ; cette réforme risque d'affaiblir encore davantage le ministère des sports.
Les crédits dévolus au programme 163 « Jeunesse et vie associative » augmentent certes de 51,5 millions d'euros, mais cette évolution s'explique très largement par l'inscription de 30 millions d'euros de crédits dédiés au service national universel, au détriment du service civique ; celui-ci ne bénéficie que d'une hausse de 2,6 % de ses moyens, soit 13 millions d'euros, alors que ses crédits avaient augmenté de plus de 60 millions d'euros par an en moyenne ces trois dernières années.
À la suite de nombreux responsables associatifs et élus chargés des politiques pour la jeunesse – deux tribunes sont parues ces dix derniers jours – , je regrette le renoncement à l'ambition d'un large déploiement du service civique. Ce dispositif a atteint un plafond et marque le pas, à cause du ralentissement de la hausse des crédits ; déjà, en 2019, nous avons pu constater sur le terrain que des mesures de régulation en gestion ont dû être prises à cause de contraintes financières, affectant le nombre et la durée des missions.
Ces effets d'accordéon sont préjudiciables à tous les acteurs, les jeunes comme les structures d'accueil. Il faudrait allouer 30 millions d'euros supplémentaires en 2020 pour parvenir à l'objectif de 150 000 volontaires ; les crédits inscrits dans le PLF ne permettent d'atteindre qu'une cible de 145 000 volontaires.
Or les 30 millions d'euros manquants sont justement alloués au SNU – qui ne concerne que 15 000 jeunes, et non pas 20 000. Celui-ci est pourtant redondant avec nombre de dispositifs de l'éducation nationale, avec les journées défense et citoyenneté, et bien sûr avec le service civique. Organiser un parcours de citoyenneté dès le plus jeune âge, en s'appuyant sur les nombreux dispositifs existants, et d'abord sur l'étape clé que constitue le service civique serait beaucoup plus pertinent et efficace.
Malgré les réserves que je viens d'exprimer, la commission des affaires culturelles et de l'éducation a émis un avis favorable aux crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».