Monsieur le ministre, ma première remarque porte sur la forme, mais elle n'est pas de pure forme. Vous nous avez transmis ce PLFR de 150 pages à quatorze heures trente et vous nous le présentez à dix-sept heures : le moins que l'on puisse dire, c'est que cela nous laisse peu de temps pour préparer nos questions. Par ailleurs, tous les amendements doivent être déposés avant le vendredi 8 novembre à quinze heures. C'est pire que l'an dernier ! Or, à l'époque, je vous rappelle que tous les groupes d'opposition avaient signé un communiqué pour protester contre ces délais extrêmement contraints. À force, on examinera le PLFR en cinq minutes !
Sur le fond, ce PLFR prévoit une réduction de un milliard des dépenses pilotables. Une fois de plus, ce sont les Français qui paient les mesures que vous avez adoptées en leur faveur au moment de la crise des « gilets jaunes ». Vous avez amorcé cette politique en refusant de compenser à la sécurité sociale certaines exonérations de cotisations décidées par l'État et vous continuez ici, en réduisant les dépenses de l'État, souvent au détriment des Français les plus modestes.
Je citerai quelques-unes de ces baisses de dépenses, qui me paraissent particulièrement choquantes. Comment pouvez-vous diminuer de 212 millions les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables ? L'annulation de 19,2 millions de crédits dans le programme Prévention des risques est particulièrement difficile à comprendre après la catastrophe de Lubrizol. Tout cela est assez délirant.
De la même manière, vous réduisez de près de 159 millions les autorisations d'engagement et les crédits de paiement de la mission Enseignement scolaire. Or, on s'aperçoit que cette baisse est notamment due au recrutement de contractuels enseignants à la place de statutaires. Ce n'est pas l'idée que je me fais de la fonction publique. Il est clair que si vous généralisez cette pratique, vous allez économiser beaucoup d'argent, mais je ne suis pas sûr que vous allez améliorer la qualité du service rendu par l'État.
Je souhaite par ailleurs rappeler que les réserves de précaution n'ont pas été conçues comme un moyen d'ajustement budgétaire et d'austérité, mais qu'elles ont vocation à faire face aux aléas exceptionnels. Or, on change progressivement de philosophie à leur égard. J'observe également que les baisses de dépenses publiques servent moins à réduire l'endettement de l'État qu'à contrebalancer la baisse d'impôt que vous avez décidée, et dont nous avons déjà dénoncé le caractère inégalitaire et non-redistributif.
Enfin, vous dites que vous comptez sur une conjoncture française meilleure et sur une croissance pour 2019 supérieure à vos prévisions. Or, pour que ce niveau soit atteint, il faudrait qu'une accélération très nette de la croissance se produise au quatrième trimestre, et rien dans votre politique ne la laisse espérer. Vous pourriez, en dernier recours, mettre 10 milliards pour encourager la consommation populaire, mais je doute fort que vous le fassiez si vous n'y êtes pas contraint par un mouvement social.