Intervention de Yves le Breton

Réunion du mercredi 6 novembre 2019 à 15h05
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Yves le Breton :

C'est évidemment un grand honneur de me présenter devant vous, en tant que candidat aux fonctions de directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires.

Deux mots de présentation pour vous dire que je suis en poste au Commissariat général à l'égalité des territoires depuis le lundi 28 octobre, et que j'étais précédemment préfet des Côtes-d'Armor. Vous m'avez invité à prendre la parole au travers de quelques questions, madame la présidente, et je vous propose de décliner quelques éléments de réponse, avant de répondre aux questions du rapporteur et à celles de la commission.

Je suis conscient des attentes nombreuses, multiples, qui s'expriment à l'égard de l'ANCT. Ces attentes sont très convergentes entre les élus locaux, les parlementaires et les plus hautes autorités de l'État. C'est cette volonté convergente qui a conduit à la promulgation de la loi du 22 juillet 2019 qu'il nous revient maintenant de mettre en oeuvre.

Comme vous m'y avez invité, je vous dirai quelques mots de l'état d'avancement du chantier de création de l'ANCT, mais peut-être puis-je auparavant vous expliquer pourquoi je me suis porté candidat à ce poste de directeur général. Car évidemment, j'ai bien conscience qu'au travers de l'examen en commission, c'est aussi l'examen de la motivation du candidat qui est posée.

Cette création est un défi, et un défi passionnant, sur plusieurs plans. D'abord, vous l'avez dit en filigrane, il s'agit de modifier en profondeur la méthodologie de travail de l'État au profit des territoires, par une approche sans doute plus ascendante, plus issue du terrain et qui tienne mieux compte des forces et des contraintes spécifiques de chaque territoire, notamment des territoires les plus fragiles. Je pense que nous aurons l'occasion de discuter de cette notion de territoires les plus fragiles… Un autre enjeu également très important dans la création de l'agence est de créer de la simplicité au profit des collectivités territoriales en décloisonnant, par une approche territoriale, l'action des services de l'État. Je pense qu'un certain nombre de grandes agences peuvent avoir la tentation d'agir de manière assez verticale et cloisonnée les unes par rapport aux autres. Il s'agit donc de reprendre une méthode de travail qui fasse partir l'approche du territoire, avec le souci de produire des solutions clés en main et sur mesure au profit des collectivités qui en ont besoin.

Autre défi, et qui n'est pas le moindre, c'est le défi managérial, puisqu'il s'agit de créer une structure nouvelle, un établissement public à partir de trois entités de statuts différents : une direction d'administration centrale, qui est le Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), et deux établissements publics, l'EPARECA (Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux) et l'Agence du numérique. Au-delà de la fusion des structures, il s'agit surtout de créer une osmose entre les différents personnels qui auront des statuts divers – puisque vous trouverez des fonctionnaires, des agents publics, des agents de droit privé – et de leur donner cet « appétit des territoires » que l'ANCT représente.

C'est bien la diversité de ces enjeux qui me conduit à présenter ma candidature aux fonctions de directeur général de l'ANCT. Sans revenir en détail sur mon curriculum vitae, j'ajoute que ces fonctions de directeur général s'inscrivent dans la logique d'une carrière consacrée en grande partie aux territoires et au service de l'État, dans le cadre de fonctions du corps préfectoral et de fonctions opérationnelles au sein de différentes administrations de l'État. L'ANCT représente en quelque sorte une continuation de ces différents engagements de carrière : c'est un établissement public de l'État qui va travailler essentiellement en tant que tête de réseau avec le réseau territorial des préfets de département, dont je suis fraîchement issu. Cet établissement public se caractérise aussi par une très forte présence des élus, aussi bien au sein du conseil d'administration qu'au niveau territorial selon la logique de fonctionnement de l'ANCT. Ce dialogue avec les élus, je l'ai entrepris depuis le tout début de ma carrière. C'est aussi l'occasion de renverser l'approche de l'État, en faisant véritablement des territoires les lieux de construction et de validation des projets… Ce sont donc autant de raisons qui m'ont conduit à présenter ma candidature, que je vous remercie encore une fois de bien vouloir examiner.

Concernant l'état d'avancement du sujet, j'ai conscience qu'au bout d'à peine dix jours de présence dans mes fonctions, les réponses ou éléments d'information que je vais pouvoir vous donner seront forcément lacunaires. J'ai néanmoins pu, depuis lundi dernier, travailler intensément le sujet avec toute la ressource des services, et j'ai trouvé des équipes extrêmement motivées. Je voudrais aussi rappeler et saluer le travail de mes prédécesseurs : je pense au préfet M. Serge Morvan qui a été préfigurateur et l'auteur du rapport de 2018, qui a lancé la création de l'agence en parallèle avec des initiatives parlementaires. Je voudrais aussi remercier mon adjoint, M. François-Antoine Mariani, qui a été pendant trois mois, depuis le départ de M. Serge Morvan, le Commissaire général à l'égalité des territoires par intérim et qui a lui aussi conduit la démarche de transformation en vue de créer l'ANCT.

Où en sommes-nous à ce stade du chantier de création de l'ANCT ? Premier aspect, le droit : le principal décret d'application est actuellement au Conseil d'État, et sera très certainement examiné par la section de l'administration la semaine prochaine. Les différents sujets ont été traités en lien avec la rapporteure du Conseil d'État, et on peut raisonnablement espérer que le décret soit signé rapidement après son examen. À partir de cette création par le décret, on pourra enclencher la mécanique de désignation du conseil d'administration et donc de sa première réunion avant la fin de l'année. Je voudrais vous indiquer aussi qu'à ma connaissance, Madame la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales s'apprêtait – ou peut-être même l'a-t-elle déjà fait, aujourd'hui – à saisir les associations d'élus pour qu'elles puissent désigner leurs représentants au sein du conseil d'administration.

Un autre aspect important est l'organisation de l'agence : un organigramme fonctionnel a été présenté aux agents, qui a permis d'élaborer un certain nombre de fiches de postes qui vont être diffusées dès aujourd'hui. C'est un sujet sur lequel, très honnêtement, il faut que les agents puissent recevoir l'information nécessaire ; c'est en cours. Cet organigramme est clé, non pas par sa forme, mais parce qu'il doit représenter ce qui va faire l'originalité de l'ANCT, c'est-à-dire une méthode de travail inspirée notamment de la démarche-projet qui a pu être conduite par l'EPARECA, par l'Agence du numérique ainsi que, si l'on parle du CGET actuel, par les commissariats de massif. C'est une expérience de la démarche-projet qui me semble importante.

Dernier élément : je suis allé à la rencontre des personnels – il est important de le faire lorsqu'on prend ses fonctions. Ils ont incontestablement des préoccupations ; surtout, ils attendent de savoir quels postes ils pourront occuper, comment et où. Cette préoccupation, il faut que nous la prenions en compte rapidement.

Voilà en quelques mots, l'état d'avancement du dossier. J'insiste sur la problématique de la nouvelle culture d'entreprise. Ce sera l'un des enjeux majeurs du directeur général dans la période de démarrage de l'ANCT.

Vous ne manquerez pas de m'interroger aussi sur les moyens prévus pour que l'ANCT puisse répondre aux attentes placées en elle. J'insiste sur l'importance des conventions qui vont être passées entre l'ANCT et les grands opérateurs de l'État qui sont compris dans le champ de coordination de l'ANCT. Ces conventions sont clé parce que c'est là que l'ANCT pourra trouver ses ressources. Le travail a d'ores et déjà commencé. Je vais aller très vite à la rencontre des directeurs généraux des agences concernées. L'enjeu est évidemment de pouvoir coordonner l'action des agences, de façon transparente pour le niveau local. L'idée n'est évidemment pas de créer une complexité supplémentaire, mais au contraire de la simplicité, et c'est bien autour de cette idée de simplicité qu'il faut organiser le travail au niveau local.

C'est un enjeu essentiel : faire savoir, faire connaître l'existence de l'ANCT. De ce point de vue, je veux remercier Mme Yolaine de Courson pour son initiative de réunions de présentation de l'ANCT. Mais ce sera aussi le travail du directeur général d'aller très vite auprès des différents réseaux qui seront les réseaux partenaires ou acteurs de l'ANCT – par exemple les préfets de département. Et dans cet effort de porter la connaissance et l'information, la ministre chargée de la cohésion des territoires, comme elle s'y était engagée lors de la discussion parlementaire, aura l'occasion de saisir également les élus, notamment les maires, pour leur présenter la nouvelle agence.

Un autre aspect que je souhaite mettre en avant, c'est le caractère complètement déconcentré de l'organisation à mettre en place. L'ANCT n'est pas une structure supplémentaire : elle n'aura pas de directions régionales ou départementales en propre, elle s'appuiera sur le réseau d'État autour du préfet de département. C'est ce réseau qui, naturellement, est en contact permanent et quotidien avec les élus, qui pourra conduire une première approche et un premier examen des dossiers. La question de l'articulation entre l'ANCT et le préfet du département, et autour de lui les différents services de l'État – notamment les directions départementales des territoires –, est fondamentale. Cela a été dit plusieurs fois pendant la discussion parlementaire : on ne crée pas une structure de plus ; on est bien dans une logique de mise en réseau.

Dernier enjeu très important au niveau local, auquel il faudra répondre au plus vite : c'est évidemment le travail de concertation avec les élus, au travers notamment du comité de cohésion territoriale. Il s'agit de viser la simplicité pour les porteurs de projets, en mettant autour de la table l'ensemble des structures qui peuvent les aider.

Voilà ce que je pouvais vous dire très rapidement en introduction, en ayant conscience que je me présente devant vous avec une expérience limitée du dossier. Elle est en tout cas beaucoup moins experte que celle d'un certain nombre d'entre vous, puisque ce dossier est lancé depuis plus de deux ans et que je ne suis candidat que depuis le 8 octobre dernier, date du communiqué du Président de la République. En tout état de cause, j'espère vous avoir donné, même maladroitement, la conviction que je suis déterminé à réussir l'installation de l'ANCT, et à mettre sur pied ce nouvel outil que vous attendez et qu'attendent aussi de nombreux acteurs au sein de l'appareil d'État.

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