Je pense, madame la présidente, qu'il est important de rappeler le contexte de cette discussion. Il y a un an, le Parlement, contre l'avis du Gouvernement, excluait l'huile de palme de la liste des biocarburants. Le Gouvernement lançait alors en grande pompe un plan de lutte contre la déforestation importée. Le 3 juillet 2019, autorisation avait été donnée à Total de transformer sa raffinerie de la Mède en « bioraffinerie », comme malheureusement on l'appelle et en août, devant le G7, Emmanuel Macron administrait au monde de grandes leçons en matière de déforestation. Le 27 août 2019 sur France inter, vous déclariez, madame la ministre de la transition écologique et solidaire : « le sens de l'histoire c'est de réduire les importations d'huile de palme. » Le 1er octobre, Total ayant déposé un recours contre la décision du Parlement, le Gouvernement défendait devant le Conseil constitutionnel l'exclusion de l'huile de palme de la liste des biocarburants.
Mais voilà : le 26 octobre 2019, Patrick Pouyanné, PDG de Total, déclarait souhaiter que le Parlement repousse sa décision de sortir l'huile de palme de la liste des biocarburants à 2026, parce que cela faisait du tort à son business. Bien sûr, il s'est trouvé des députés pour obtempérer, et le Gouvernement aussi apparemment. Après que le Conseil constutionnel eut débouté Total, vous aviez annoncé, madame la ministre, que vous vous en tiendrez à la décision du Conseil : apparemment ce n'est plus le cas.
Je rappelle que la forêt tropicale d'Indonésie, qui produit la moitié de l'huile de palme mondiale, a perdu entre 2012 et 2015 une surface équivalente à 146 terrains de football par heure, soit un terrain de football toutes les 25 secondes ! Et je ne parle pas des espèces en danger d'extinction, comme l'orang-outan, le tigre de Sumatra ou encore l'éléphant des forêts.
Allez-vous, chers collègues, laisser Total écraser ce que nous avons voté l'année dernière ? Allez-vous faire cadeau de 70 millions à une transnationale qui a réalisé en 2018 un bénéfice net de 13,4 milliards de dollars, et de 2,8 milliards de dollars au troisième trimestre 2019, et qui accessoirement détruit nos conditions d'existence ?
J'ai une autre question pour vous, madame la ministre : pourquoi ne pas livrer directement votre ministère à Total ? Au moins ce serait plus clair !