Intervention de Annick Girardin

Réunion du mardi 5 novembre 2019 à 17h30
Délégation aux outre-mer

Annick Girardin, ministre des outre-mer :

Madame Sage, mon premier déplacement en Polynésie avait pour objet le centre de mémoire que nous avons porté avec le pays. Lors des échanges avec les représentants du pays, il a été décidé que l'État apporterait à titre gracieux le terrain, dont le prix était a été évalué à 5 millions d'euros, que le pays construirait le centre de mémoire et que nous interviendrions ensemble sur son contenu. Cela ne veut pas dire que le centre de mémoire construit par le pays ne peut pas bénéficier d'autres crédits et d'autres lignes budgétaires. Mais, par cet amendement, le ministre des comptes publics a voulu marquer la part de chacun, après que nous l'avions indiqué dans l'accord conclu en Polynésie. Cet amendement n'est que le résultat d'une discussion avec le comité de pilotage du centre de mémoire que j'ai présidé et installé avec le président Fritch. Je comprends votre questionnement et je peux vous dire que, sur ce sujet, l'État sera au rendez-vous. Le Président de la République aura sans doute l'occasion de le rappeler lors de sa prochaine visite.

Le fonds vert concerne deux types de projets, les uns finançables à taux zéro et les autres à taux bonifié. Je n'en ai pas le détail ici mais, puisque vous m'interrogez, je vais demander combien de projets sont super-bonifiés jusqu'à zéro et combien le sont moins, ainsi que les critères définis par l'agence française de développement lors de l'ouverture du fonds vert à toutes les collectivités.

Le fonds d'adaptation ne concerne pas seulement le ministère des outre-mer. L'idée est d'avoir un fonds d'adaptation Pacifique pour travailler avec l'ensemble des États du Pacifique et de mener une politique de développement portée par l'agence française de développement. C'est la partie « aide publique au développement » (APD) portée par l'AFD. La partie outre-mer vient s'y ajouter avec 3 millions d'euros, car figurez-vous que ce fonds international ouvert à l'ensemble des États insulaires du Pacifique n'était pas ouvert aux collectivités françaises. L'AFD regrettait donc l'absence d'un fonds abondé par le ministère des outre-mer, permettant de porter des projets à la fois pour la Polynésie et les États insulaires voisins. C'est ainsi qu'est née l'idée du fonds d'adaptation Pacifique avec une participation de 3 millions d'euros du ministère des outre-mer, laquelle pourrait évoluer en fonction des projets. Puisqu'il n'est pas complètement en action, regardons comment il va fonctionner et nous verrons s'il faut le réévaluer.

Comme vous l'avez dit, la conférence du logement en outre-mer a représenté un travail important. J'en remercie tous les participants. Plusieurs parlementaires s'y sont impliqués, ce qui me conforte dans l'idée que la ligne budgétaire unique doit rester sacralisée. Elle ne descendra jamais au-dessous de 200 millions d'euros et elle sera de 215 millions d'euros pour 2020. Sachez aussi qu'en 2020, le produit des sociétés immobilières d'outre-mer (SIDOM), soit 18,5 millions d'euros, sera réinscrit. L'allocation logement accession (ALA) a été spécifiquement rétablie pour les outre-mer. Là encore, merci du travail que vous avez réalisé les uns et les autres, parce que le combat collectif a permis d'acter la spécificité des territoires d'outre-mer en la matière. Vous avez raison de dire qu'un certain nombre de projets avaient été ralentis. Les inquiétudes et les interrogations avaient provoqué un flottement, même si, pour La Réunion, la région avait proposé de prendre le relais, ce qui n'a pas été nécessaire puisqu'un dispositif intermédiaire avait déjà été voté.

La réhabilitation du parc social dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville sera prise en compte sur les dispositifs financés sur le budget du ministère de la cohésion des territoires, comme les extensions du crédit d'impôt. Nous souhaitons aussi travailler sur les démolitions-reconstructions du parc social, sources de difficultés dans les territoires d'outre-mer. J'ajouterai le plan d'investissement volontaire d'action logement, dont 1,5 milliard d'euros réservé aux collectivités territoriales, sachant que l'ensemble des mesures portées par Action logement sont également au service des territoires d'outre-mer. Un certain nombre d'outils ont été proposés dont nous devons parler.

Plusieurs opérations ont dû être annulées dans les territoires d'outre-mer, ce qui répond aussi à la question de M. Claireaux. Au total, 1,6 milliard d'euros d'autorisations d'engagement en faveur des territoires d'outre-mer n'ont pas encore appelé de crédits de paiement. Des éléments nous permettent de dire que sur ce montant, 600 millions d'euros de crédits de paiement ne seront jamais appelés : les projets ne se feront pas, soit que les opérateurs ne les réaliseront pas, soit que les collectivités ou les porteurs de projet n'ont pas récupéré auprès de la région ou du département le complément inscrit au projet initial, soit que le projet bute sur une difficulté liée au foncier. Nous avons avancé sur ces sujets, car on voit bien qu'il y a une difficulté. Faut-il que le ministère des outre-mer décide de ne plus attribuer de crédits aux projets de logements sans garantie du foncier ni permis de construire, dans la mesure où tout cela n'apparaît qu'une fois le projet validé ?

Parmi les opérations qui ne se réaliseront jamais figure, à la Réunion, le projet Quadrilatère Océan. Deux années de suite, l'opération a été déprogrammée et La Réunion a renvoyé 20 millions d'euros. La première année, c'est le porteur qui n'avait pas la capacité juridique de recevoir la LBU. Je n'excuse pas non plus les services de l'État pour toutes les difficultés de l'opération, mais je leur demande d'être plus vigilants et plus accompagnateurs de la démarche. La deuxième année, c'est une défaillance de gestion de l'opération qui s'est produite.

Sans doute dans le passé, parce que les enveloppes étaient moins importantes, avait-on réussi à opérer des régularisations. Peut-être aussi les collectivités sont-elles en plus grande difficulté budgétaire. Par exemple, on a financé des opérations à 100 % avec le FEI, parce qu'on avait bien vu qu'elles ne seraient jamais réalisées par les communes qui en avaient vraiment besoin. Doit-on continuer à aller aussi loin ? Si oui, il y aura un nombre moindre de projets mais plus de projets financés à 100 %. Ce sont des choix que nous devons faire ensemble. J'essaie de les faire le plus justement possible depuis deux années.

Monsieur Claireaux, l'ingénierie fait bien partie de nos difficultés. Mais je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas, dans les territoires d'outre-mer, de jeunes ou de moins jeunes capables de prendre toute leur part dans les projets. J'ai dit que les collectivités n'y faisaient pas appel. Dans sa réorganisation, l'État a perdu son ingénierie. Nous sommes aujourd'hui à un tournant où l'État se devait de réinvestir dans l'ingénierie. Nous passons de 3 millions d'euros en 2019 à 7 millions d'euros pour 2020 dédiés au financement des missions d'ingénierie. Ce sont des crédits auxquels les collectivités peuvent faire appel pour réaliser de l'ingénierie. Je le répète, dans les territoires, il y a certainement l'ingénierie qui convient. Je n'ai jamais dit qu'on manquait d'ingénierie dans les territoires.

En outre, nous renforçons les services de l'État, qui le nécessitent. À La Réunion, un maire me disait que 80 % de ses projets étaient refusés par l'État. Nous avons un problème que nous allons traiter ainsi.

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