Monsieur le président, madame la présidente, monsieur le ministre d'État, en tant que rapporteur pour avis, je me suis particulièrement arrêté, cette année, sur deux sujets : le contrôle de légalité et la délivrance des titres, d'une part, et l'accueil des publics dans le cadre du PPNG, d'autre part.
Le contrôle par l'État des actes des collectivités locales a été l'objet de travaux d'évaluation de la Cour des comptes, qui l'évoque dans son rapport pour l'année 2016, avant de figurer parmi les priorités du plan « préfectures nouvelle génération » lancé par Bernard Cazeneuve en sa qualité, à l'époque, de ministre de l'intérieur. Le contrôle de légalité et le contrôle budgétaire sont importants. Ils visent à assurer l'application uniforme et tout simplement le respect de la loi dans notre pays, vecteurs très importants de confiance dans l'action publique – le thème est cher au Président de la République et au Gouvernement.
Pourtant, depuis 1982, le contrôle de légalité a souvent souffert de la faiblesse des moyens techniques et humains des préfectures. Depuis dix ans, ceux-ci servent trop souvent de variable d'ajustement. Force est de constater que vous poursuivez sur cette voie et que vous ne saisissez pas forcément l'opportunité que vous offrent notamment les moyens dégagés par la nouvelle organisation de la délivrance des titres pour régler la question. L'action « Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales », qui concerne directement les moyens de ces services, sera dotée de 153 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, soit une progression limitée à 3,4 millions d'euros. C'est une forme de coup d'arrêt aux efforts entrepris en loi de finances l'an dernier. Quelles sont donc, monsieur le ministre d'État, les perspectives de rééquilibrage des effectifs pour 2018 ? Combien d'agents se consacreront effectivement au contrôle de légalité et au contrôle budgétaire dans les préfectures et les sous-préfectures au terme du PPNG ? L'effectif cible de six agents par département sera-t-il atteint ? Dans le rapport que j'ai évoqué, la Cour des comptes dénonçait aussi une réorganisation incomplète, avec, en sous-préfecture, 20 % des moyens qui restent affectés à des tâches qui paraissent parfois mal définies et relèvent sans doute plus de la gestion du personnel que d'une réelle organisation locale du contrôle de légalité. Quel sera l'avenir des sous-préfectures une fois qu'elles ne seront plus chargées ni du contrôle de légalité ni de la délivrance des titres ? Que leur restera-t-il ? Quelle ambition leur assignez-vous ?
Les gouvernements successifs ont réduit le périmètre du contrôle de légalité pour alléger la tâche des services. Avez-vous le projet d'aller plus loin ? Ne croyez-vous pas, au contraire, qu'il faudrait peut-être s'intéresser à un certain nombre d'angles morts du contrôle de légalité ? Je suis surpris de voir que le contrôle des sociétés publiques locales (SPL) et des sociétés d'économie mixte (SEM) ne figure pas parmi les priorités nationales du contrôle de légalité ; elles présentent pourtant des risques importants. Je suis aussi très surpris que quatre ans après l'adoption des lois relatives à la transparence de la vie publique et l'instauration de l'obligation, pour les exécutifs locaux, de remplir des déclarations d'intérêts, lesdites déclarations ne sont toujours pas utilisées par les services du contrôle de légalité lors du contrôle des marchés publics. Ce ne serait pourtant pas totalement inutile.
En deuxième lieu, je veux vous interroger sur cet événement majeur de l'année 2017 qu'est la fermeture des guichets d'accueil dans les préfectures pour les permis de conduire et les cartes grises – la fin de l'accueil du public ! –, avec 47 CERT qui prendront le relais. J'en ai visité un en Ille-et-Vilaine. Les agents sont motivés, prêts à s'adapter et à relever le défi ; je crains plutôt les réactions des usagers qui trouveront rideau baissé dans les préfectures. En fait d'accès équitable, quel sera le sort de ceux qui ne disposent pas d'internet ou d'outil informatique ? Pourquoi n'y a-t-il pas eu de campagne d'information ?
Très concrètement, la situation est assez paradoxale : les citoyens français ne seront plus admis dans les préfectures, où ils trouveront porte close et où ne seront plus admis que les étrangers. Je pense que cela mérite un accompagnement. En Ille-et-Vilaine, par exemple, le préfet de région a décidé de recourir à des vacataires pour continuer à faire un peu d'accueil et d'orientation. Votre intention est-elle de systématiser un tel accueil ? Notre collègue Mansour Kamardine nous expliquait par exemple qu'à Mayotte seuls les Comoriens étaient désormais accueillis à la préfecture ; les Mahorais trouvaient porte close. Le sujet ne laisse visiblement pas indifférent.
Au terme de cette réforme, à la fin de l'année 2018, il n'y aura plus, monsieur le ministre d'État, que 1 300 agents dans les préfectures affectés à la délivrance des titres pour les nationaux, contre 3 200 affectés à l'accueil et à la délivrance des titres aux étrangers. Tout cela souligne quand même que l'accueil des demandeurs d'asile et des étrangers et les tentatives d'éloignement infructueuses sont en train d'emboliser le fonctionnement des préfectures : le nombre de délivrances de titres pour les étrangers a progressé 81 % entre 2014 et 2016 ! Finalement, les reproches faits au préfet du Rhône de ce point de vue devraient en réalité adressés à un système ingérable, avec des solutions d'éloignement devenues introuvables. Dans son rapport, l'inspection générale de l'administration indiquait d'ailleurs que si ces dysfonctionnements ont été constatés dans le Rhône il est certain qu'ils se retrouvent dans d'autres départements et appellent des solutions correctives, certaines locales, d'autres nationales. Cela pose le problème, bien réel, de soutenabilité de votre politique. Qu'en dites-vous, monsieur le ministre d'État ?