Je me suis effectivement déjà exprimé à de nombreuses reprises sur ce thème. Les propositions qui sont faites à ce sujet ne sont pas forcément mauvaises, mais j'estime que nous devons nous donner encore une chance avant de devoir procéder ainsi.
Le Gouvernement a accompagné le Sénat dans l'adoption de mesures permettant à un conseil municipal de fonctionner correctement lorsqu'il n'est pas réputé complet. Comme vous le savez, aujourd'hui, en effet, lorsqu'un conseil municipal n'est pas complet, certaines choses ne sont pas possibles, notamment l'élection du maire. Ainsi, une démission peut entraîner des élections partielles importantes.
Après les auditions et réflexions que j'ai menées dans le cadre de la préparation de ce projet de loi j'ai considéré que l'idée consistant à diminuer immédiatement le nombre de conseillers municipaux n'était pas encore mature – je rappelle que le présent projet de loi a surtout vocation à essayer de refaire fonctionner le bloc communal dans de meilleures conditions.
Par ailleurs, quand certains se demandent si le nombre de conseillers municipaux n'est pas trop élevé, d'autres – je dis « d'autres », mais ce sont parfois les mêmes – redoutent qu'une telle diminution puisse être un premier pas vers la suppression des communes. Je comprends très bien cette réaction, car il me semble que c'est une question que je me poserais moi-même si le nombre de conseillers municipaux commençait à diminuer dans les communes rurales. On entend déjà la petite musique à propos des communes nouvelles – qui ne sont cependant constituées que de façon librement consentie –, qui contribue à entretenir le doute sur les intentions du pouvoir central parisien à l'égard des communes rurales.
Dans ce texte qui a essentiellement vocation à remettre un peu d'électricité dans l'engagement dans la vie locale, j'ai donc préféré opter pour deux séries de mesures. Les premières sont celles qui accompagnent l'engagement – nous allons y venir dans un instant. Les secondes partent du principe que, s'il peut arriver au cours d'un mandat qu'il n'y ait pas suffisamment de monde pour constituer un conseil municipal, ce n'est pas une raison pour réduire définitivement le nombre de conseillers, qui pourrait à nouveau être suffisant au cours du mandat suivant – nous avons déjà eu un débat similaire tout à l'heure à propos de la parité et de la proportionnelle.
Je comprends tout à fait que vous ayez envie d'avancer, et c'est tout à votre honneur, mais je souhaite plutôt que vous retiriez ces amendements. Il me semble en effet qu'il vaut mieux pour le moment laisser inchangé le nombre d'élus dans les conseils municipaux. Tentons d'abord de mettre quelques gouttes d'huile dans le fonctionnement du bloc communal, sous la forme d'éléments de simplification – pouvoir fonctionner au tiers, suppression des élections partielles en cas d'incomplétude – pour permettre au conseil municipal de fonctionner à effectifs réduits. Mon souci, c'est de ne prendre aucune mesure de réduction du nombre de conseillers municipaux qui soit irréversible, car il est évident que, si on diminue légalement ce nombre, on ne va pas faire une nouvelle loi quelques mois plus tard pour l'augmenter à nouveau.
Soyons prudents car l'enfer est pavé de bonnes intentions et, à vouloir bien faire en diminuant le nombre de conseillers municipaux, je crains qu'on n'envoie un message négatif aux communes. Laissons un peu de temps aux dispositifs que nous mettons en place dans le cadre de ce projet de loi afin qu'ils aient une chance de prospérer. Si, dans quelque temps, nos successeurs estiment qu'il est vraiment nécessaire de réduire le nombre de conseillers municipaux, il sera toujours temps de le faire.
J'ajoute, enfin, que certains des dispositifs que vous proposez seraient impossibles à mettre en oeuvre, car ils ne sont pas compatibles avec d'autres, déjà adoptés. Je pense par exemple à la réduction du conseil municipal à cinq conseillers, qui ne peut s'accorder avec le système consistant à permettre au conseil de fonctionner au tiers de ses effectifs habituels : c'est non seulement compliqué du point de vue de l'arithmétique, mais également assez douteux au regard des règles constitutionnelles – et il faut bien dire qu'une collégialité limitée à deux ou trois conseillers, ce n'est pas vraiment l'esprit du texte.
J'espère vous avoir convaincus. En tout cas, j'y ai mis du coeur !