Intervention de Michel Larive

Réunion du mercredi 20 novembre 2019 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Larive :

Les associations jouent un rôle primordial et croissant dans notre société, puisqu'elles comblent souvent le vide laissé par le désengagement de l'État et l'absence de services publics, surtout en zone rurale. Le 30 octobre 2019, le secrétaire d'État Gabriel Attal a déclaré que si l'État gérait l'activité exercée par les bénévoles des Restos du coeur, il lui en coûterait 200 millions d'euros par an. Prenons garde à ce discours, qui institutionnalise le désengagement de l'État dans le fonctionnement de notre République.

Après ce rappel, venons-en à la trésorerie des associations. Les subventions des collectivités territoriales aux associations sont en constante diminution depuis plusieurs années, conséquence de l'austérité budgétaire imposée à nos villes, nos départements et nos régions par les gouvernements qui se sont succédé depuis au moins trente ans. La suppression de l'impôt sur la fortune a eu un impact sur le monde associatif, qui bénéficiait de défiscalisations provenant de fondations privées. La disparition des contrats aidés, sans aucune solution de remplacement, a eu un effet dévastateur sur leurs actions. Enfin, même si elle était contestée, la suppression de la réserve parlementaire a privé plusieurs structures associatives de financement, et la compensation annoncée par le Gouvernement a disparu dans les limbes du budget général de l'État. Ce texte tendant à améliorer la trésorerie des associations est trop timoré.

Prenons l'exemple de l'Observatoire international des prisons (OIP), association loi 1901 créée en 1990 à Lyon, qui réalise un travail exceptionnel. Elle promeut le respect des personnes incarcérées dans le monde entier et milite pour faire respecter les droits de l'homme dans le traitement réservé aux détenus. Son action lui a permis d'obtenir le statut d'observateur à l'ONU en 1995. Aujourd'hui encore, elle est sollicitée chaque année en France par plus de 4 000 détenus pour faire valoir leurs droits et améliorer leurs conditions d'incarcération. Or l'OIP a vu son financement diminuer drastiquement en cinq ans, passant de 811 565 à 592 146 euros, ce qui met son existence même en danger. Le 28 octobre dernier, le Comité général à l'égalité des territoires, rattaché au Gouvernement, a annoncé qu'il ne renouvelait pas cette subvention. La directrice de l'OIP, Cécile Marcel, alerte sur cette précarisation de l'association, dont la disparition ferait reculer le droit en milieu carcéral.

La situation inquiétante de l'OIP ne trouvera pas de solution dans le texte qui nous occupe aujourd'hui. L'article 1er de la proposition initiale prévoyait que les associations pourraient conserver un excédent raisonnable sur les ressources non consommées affectées à une dépense déterminée. Or les associations ne sont pas des banques, elles n'ont pas vocation à thésauriser. La non-lucrativité les oblige à investir dans leur domaine d'action.

L'article 1er bis, qui impose un délai pour le versement des subventions, est une bonne mesure, même si elle ne règle pas le problème de fond du financement des associations. Or cette mesure a été supprimée par le Sénat. Nous proposerons de la rétablir par voie d'amendement. L'article 1er ter ne concerne que les associations cultuelles ; l'article 1er quater permet simplement de dresser la liste des associations concernées par la réduction d'impôts à 66 % des dons qui leur sont versés ; l'article 2 permet aux associations de se financer entre elles sans augmenter le montant des subventions ; et le reste de la proposition de loi est du même acabit. Ce texte comporte de bonnes intentions, mais il ne répond pas au cri d'alarme lancé par les associations ni à l'urgence d'agir en faveur de leur trésorerie.

Le groupe La France insoumise s'abstiendra donc sur cette proposition de loi.

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