Intervention de Laurent Bresson

Réunion du mercredi 23 octobre 2019 à 14h00
Mission d'information sur l'incendie d'un site industriel à rouen

Laurent Bresson, directeur de la DDTM :

Je vais peut-être prendre le relais, mesdames et messieurs les députés, pour répondre à la première question qui a été posée sur la protection de la Seine, et notamment la mobilisation des moyens du plan Polmar. Je vais resituer peut-être très rapidement ce sujet qui est un sujet majeur dans la gestion de cette crise, puisque l'entreprise Lubrizol, comme vous le savez sans doute, est située à peine à quelques centaines de mètres des berges de la Seine. Et naturellement pour éteindre l'incendie, les services du SDIS (service départemental d'incendie et de secours) ont dû déverser des quantités très importantes d'eau sur le site, jusqu'à 25 à 30 000 litres à la minute en période de pointe, ce qui est tout à fait considérable. Cet arrosage massif n'a pas manqué d'entraîner le ruissellement, dans les réseaux d'eau pluviale, de quantités importantes de polluants.

La stratégie qui a été la nôtre est assez simple. Il se trouve que les exutoires de ces réseaux d'eau pluviale aboutissaient tous dans un bassin du port, une darse. Nous avons fait le choix, dès le début de la crise, dans les toutes premières heures, de tout faire pour cantonner la pollution, la traiter et la pomper dans ce bassin, de sorte qu'elle n'atteigne pas le fleuve. Cette stratégie a réussi.

Et comme vous l'avez souligné, monsieur le député, si cette stratégie a réussi, c'est dû à plusieurs facteurs. Premier facteur essentiel, c'est que nous avons pu très rapidement installer un barrage provisoire léger au droit de ces exutoires. C'était effectif dans les toutes premières heures de la crise, avec les moyens du grand port maritime de Rouen. C'est ce qui a permis de limiter la progression de la pollution.

Très vite, vers 7 heures du matin, nous faisons le constat que ces moyens ne seront pas suffisants. Ils sont trop légers et donc insuffisamment adaptés au flux de pollution qui est attendu. Nous décidons donc de faire appel au moyen du plan Polmar, d'ordre national. Ces moyens sont basés au Havre. La commande est immédiatement passée.

Ils partent du Havre à 11 heures du matin. À 14 heures, toujours le 26, un barrage lourd, de 200 mètres de long est posé, qui vient fermer définitivement le bassin. À cette heure, aucune pollution n'est encore passée dans le fleuve. Le fleuve a été totalement préservé, parce que la nappe s'est répandue dans le bassin de six hectares.

Dès le premier jour, des moyens de pompage sont mis en place pour pomper l'eau polluée de ce bassin et la traiter. Au total, ce sont plus de 150 mètres cubes de polluants purs, c'est-à-dire séparés de l'eau, qui seront retirés. Nous avons véritablement traité un volume très significatif de pollution. Et pour compléter l'effet de ce barrage flottant Polmar, un contre-courant de surface a été mis en place, dès le premier jour également, grâce à leur lance à eau des remorqueurs qui étaient présents sur le site. Nous avons fait le choix de créer un contre-courant artificiel de surface pour repousser la pollution flottante vers la partie du bassin où elle était pompée et traitée.

À la question de savoir si finalement, nous aurions pu faire face sans ces moyens lourds du plan Polmar, je vais être très clair, la réponse est non. Les moyens dont on disposait localement n'étaient pas suffisants. Nous avons pompé du polluant jusqu'au 6 octobre. Cela a duré plusieurs jours. C'est bien pour cela que dès 7 heures du matin, le premier jour de la crise, nous avons fait le constat qu'il était nécessaire d'obtenir ces moyens complémentaires. Déclenchés à 11 heures du Havre, ils étaient installés sur place à 14 heures. C'est un délai relativement court. Je pense qu'en l'espèce, c'est le délai qui convenait pour gérer cette crise.

Très clairement, je pense même que dans ce contexte, on peut aussi se poser une question allant un tout petit peu plus loin. Nous avions là une configuration qui était plutôt favorable, des exutoires d'eaux pluviales qui arrivaient dans un bassin. Il est évident que la situation aurait été tout autre à gérer si ces exutoires étaient arrivés directement dans la Seine, sans présence du bassin intermédiaire. Là, nous aurions probablement eu besoin de moyens encore plus importants et encore plus spécifiques.

La mobilisation des moyens du plan Polmar a permis d'éviter toute pollution du fleuve. Je peux le dire aujourd'hui, maintenant que nous en avons terminé avec le traitement des effluents polluants. Vous avez raison, il faut bien avoir cela en tête parce qu'il y a là un enjeu très sensible. Nous n'avons aujourd'hui aucune pollution de la Seine, liée à la crise Lubrizol.

La réponse à la question de la mise en oeuvre du PPRT, dans la phase opérationnelle est : oui. Les prescriptions du PPRT en matière d'urbanisme ont été appliquées. Je peux notamment vous en donner deux exemples, relativement emblématiques. Je pourrais en citer d'autres.

Dans les prescriptions du PPRT était prévue la suppression d'une voie publique, ce n'est pas rien. Le site Lubrizol était traversé par une voie publique nord-sud, la rue Marc Seguin, ce qui posait un problème. Le PPRT prévoyait la suppression de cette voie publique. Cela a été fait. Cette voie est aujourd'hui privatisée. Elle est totalement intégrée au périmètre sécurisé de l'ICPE.

L'autre exemple concerne la délivrance des permis de construire. Tous les permis de construire situés dans la zone couverte par un PPRT font l'objet d'un examen de conformité. Un certain nombre d'autorisations ont été refusées. Je vous en cite une. Il était prévu que soit créé, pour un projet privé, un showroom d'exposition, qui est un établissement recevant du public, dans le périmètre du PPRT. Le permis de construire a été refusé par l'autorité compétente, le maire, en application du PPRT.

Dans un domaine différent, lorsque la Métropole de Rouen, à l'époque je pense que c'était plutôt la Communauté d'agglomération, a mis en place une nouvelle ligne de bus, la ligne 34, le PPRT a fait obstacle à toute création d'arrêts voyageurs sur cette ligne de bus dans l'aire d'application du PPRT. Ceci a été parfaitement respecté.

Les prescriptions du PPRT, pour tout ce que nous avons pu vérifier, ont été très strictement respectées. Nous sommes dans une zone dans laquelle l'habitat est très peu présent. On trouve quelques habitations au nord du site Lubrizol, notamment sur la commune de Petit-Quevilly. Au total, une dizaine de logements sont situés dans l'ère du PPRT. Quatre de ces logements sont en zone d'aléas dite moyen, et huit de ces logements sont en zone d'aléas faible. Voilà pour l'état des lieux de la situation.

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