Réduire le coût du foncier, augmenter l'offre de logements accessibles aux Français : ces deux objectifs, nous ne pouvons que les partager. Examinons donc en quoi la proposition de loi peut permettre de les atteindre.
À l'article 1er, l'interdiction de la mise aux enchères des terrains publics va dans le bon sens, du moins en apparence, car les cessions de foncier public ne représentent qu'une minorité – moins de 10 % – des logements produits. Reste que cette mesure semble porter atteinte à la libre administration des collectivités locales et pourrait être censurée par le Conseil constitutionnel. En outre, la cession à l'amiable ne garantit pas la maîtrise du prix du logement, ce qui est pourtant le but recherché. Dans des territoires détendus, on peut peiner à trouver un preneur au prix fixé. Enfin, imaginez enfin les difficultés qui surgiront si une collectivité cherche à céder un atelier : comment choisir entre plusieurs artisans ? Espérons que vous adapterez la proposition aux réalités locales.
À l'article 2, un amendement gouvernemental renvoie à des ordonnances la création des organismes fonciers libres, ce qu'on ne peut que regretter. Il serait bon que le législateur précise l'extension du champ de la dissociation du foncier et du bâti, autorisée depuis la loi ALUR. Cette mesure encore récente doit être évaluée avant que l'on décide d'aller plus loin. Il faudra aussi résoudre la question des garanties bancaires.
J'en viens à l'article 3. La création d'observatoires fonciers locaux a fait ses preuves dans des territoires tendus. Il faut l'inciter – non l'imposer – si les élus la jugent pertinente. De la confiance, de la liberté : voilà ce qu'attendent les élus locaux après les promesses du congrès des maires.
Le Gouvernement va inviter la majorité à supprimer l'article 4. La sagesse va l'emporter.
En ce qui concerne l'article 5, nous partageons votre volonté d'améliorer l'évaluation des biens publics. Essayons ensemble de parfaire ce service public !
L'article 6 a été supprimé en commission. En effet, l'inversion de la logique de dérogation aux règles d'un PLU – plan local d'urbanisme – aurait nécessité une rédaction plus précise et plus solide, retenant peut-être la possibilité d'une dérogation, prévue dans le PLU lui-même.
L'article 7 instaure une obligation de compte rendu annuel de la construction de logements, pour rapporter la production aux objectifs du PLH. Justifiée dans les communes importantes, la mesure ne me le semble pas dans les petites, pour lesquelles le PLH n'envisage pratiquement pas de constructions.
Objectivement, l'impact de ces quelques mesures, certes intéressantes, me semble limité.
Allons plus loin, mes chers collègues, et réfléchissons de manière plus globale. Le coût du foncier n'est pas déterminé par le seul prix du terrain. Plusieurs facteurs le renchérissent : la fiscalité immobilière, les taxes et frais de raccordements, ainsi que les participations destinées à financer les équipements publics.
Par ailleurs, l'abaissement du coût du foncier ne suffira pas à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français. Dans certains cas, même si le coût du foncier est nul, le prix des logements n'est pas pour autant accessible. En effet, les coûts de construction peuvent augmenter à cause des caractéristiques du terrain ou des prescriptions architecturales et urbaines ; s'y ajoute la fiscalité de la construction.
Monsieur le ministre, il faudrait envisager d'instaurer un taux réduit de TVA pour rendre les logements plus abordables. Surtout, des mesures telles que le rétablissement de l'APL accession – l'aide personnalisée au logement – , ou du taux initial de la quotité finançable du PTZ– le prêt à taux zéro – dans les communes où vous l'avez diminué, permettraient de rendre la demande solvable.
Précisons que la hausse du coût du foncier, si elle est importante, ne vaut pas partout. Elle concerne surtout certains centres en France métropolitaine, rendant le prix des logements qui s'y trouvent peu accessible. Dans ces espaces, qui concentrent un nombre croissant d'emplois et de services, la demande de logements augmente, mais l'offre ne peut suivre, même quand le coût du foncier est moindre. Ainsi, l'absence d'aménagement équitable du territoire aggrave la pénurie de foncier, et explique la hausse de son coût.
Monsieur le rapporteur, vous avez le mérite de faire des propositions afin de faciliter l'accession à la propriété, même si elles sont bien insuffisantes. Il nous faut rendre l'ensemble du territoire attractif et accessible, mieux le connecter, répartir de manière pertinente les emplois publics et les filières d'avenir. Cela permettra de rééquilibrer géographiquement la demande de logements et de réduire la pénurie, diminuant ainsi le coût du foncier.
« Construire plus, mieux et moins cher » : que sont devenus les objectifs affichés de la loi ELAN ? Une crise du logement couve. Je tire la sonnette d'alarme et invite le Gouvernement et les députés de la majorité à promouvoir enfin une politique volontariste du logement et une politique d'aménagement équitable de notre pays.