Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du jeudi 28 novembre 2019 à 15h00
Points d'accueil pour soins immédiats — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

Les mobilisations de ces derniers mois ont confirmé le constat que nous faisons depuis plusieurs années : celui d'urgences saturées et de services qui peinent à remplir leur mission initiale. Presque toutes les catégories de personnels hospitaliers – médecins, infirmiers ou encore internes – sont unis pour nous alerter sur leurs conditions de travail, sur le manque de moyens, sur leur épuisement et sur les risques que cela fait ou ferait courir aux patients. La situation est devenue plus que critique. Elle a d'ailleurs obligé le Gouvernement à nous présenter en catastrophe un plan pour l'hôpital public qui, s'il devrait permettre de soulager un peu nos hôpitaux, ne réglera malheureusement pas la crise. Voilà le contexte dans lequel nous examinons cette proposition de loi de notre collègue Cyrille Isaac-Sibille.

Elle met en évidence un aspect essentiel de la crise des urgences et, plus largement, de la désertification médicale : celui du temps médical qui doit être repensé et réorganisé. Il doit l'être en matière de proximité physique et géographique, c'est vrai – l'inégale répartition de l'offre médicale porte atteinte à l'accès aux soins partout sur le territoire – , mais il doit l'être également concernant les délais d'attente – il faut aujourd'hui plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous chez un cardiologue ou chez un ophtalmologiste, sans parler des praticiens qui refusent de nouveaux patients. C'est en effet à cause de ces délais d'attente toujours plus longs que les personnes renoncent à se soigner ou vont aux urgences pour avoir une réponse immédiate à leurs problèmes de santé.

C'est pourquoi nous saluons la logique de gradation de soins sous-jacente à la proposition de loi. La stratégie gouvernementale « Ma santé 2022 » participe de cette logique, en faisant de la coordination des acteurs autour d'un projet territorial de santé le principe de base de notre système de soins. Nous y étions d'ailleurs favorables tout en estimant que nous pouvions décliner plus encore ce principe. Or c'est ce qui est proposé ici avec la labellisation de points d'accueil pour soins immédiats. La création de ces PASI permettrait, d'une part, la mise à disposition de plateaux techniques simples pour une prise en charge immédiate du patient et, d'autre part, l'identification plus aisée par les patients – alors que nous le savons, le choix des urgences peut être celui de la facilité face à l'organisation parfois complexe du système de santé dans les territoires.

La proposition de loi ouvre donc une piste intéressante, bien que nous ayons conscience qu'elle ne constitue qu'une infime partie de la réponse au problème de l'accès aux soins. C'est la raison pour laquelle le groupe Libertés et Territoires l'a soutenue dès le début de nos travaux, malgré quelques inquiétudes concernant le financement de ces structures et leur attractivité pour les médecins.

Malheureusement, la majorité a fait le choix en commission de modifier la proposition initiale en en limitant considérablement la portée. Nous le déplorons. L'amendement de réécriture défendu par le rapporteur allait pourtant dans le bon sens, et même dans le sens du Gouvernement et de la majorité puisqu'il l'inscrivait dans le cadre de l'exercice coordonné. Le dispositif de labellisation par le directeur de l'ARS introduisait en outre de la souplesse. Or, conditionner la labellisation des points d'accueil à la présence d'un projet territorial de santé et à une communauté professionnelle territoriale de santé revient à annihiler considérablement la portée de ce dispositif.

Nous ne sommes pas défavorables aux CPTS, bien au contraire, nous les encourageons, mais leur installation et leur montée en puissance prend du temps. On l'a dit, on compte 400 CPTS ou projets de CPTS sur le territoire, sur les 1 000 communautés attendues. Le rapporteur l'a très justement souligné : il faudra deux à trois ans pour une montée en puissance des CPTS et cinq années pour que les PTS voient le jour.

Si nous adoptons la proposition de loi telle que modifiée par la majorité en commission, nous nous priverons d'un outil souple, efficace et mobilisable immédiatement pour répondre à l'urgence de la désertification médicale. Notre groupe regrette vivement un tel affaiblissement de cette proposition. C'est pourquoi nous soutiendrons l'amendement du rapporteur, qui a pour objet la labellisation immédiate des points d'accueil tout en leur donnant pour objectif de s'organiser autour de CPTS, même a posteriori. C'est un bon équilibre et un nouveau pas pour améliorer l'accès aux soins partout sur le territoire.

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