Monsieur le président, madame la ministre des solidarités et de la santé, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, notre système de soins est reconnu comme l'un des plus efficaces du monde. Pourtant, il subit depuis trente ans les effets des politiques de privatisation et de libéralisation, qui ont eu des conséquences sanitaires néfastes.
La France est caractérisée par des inégalités sociales de santé parmi les plus grandes en Europe : il y a six années d'espérance de vie d'écart entre un ouvrier et un cadre ; notre taux de mortalité prématurée est très élevé ; l'espérance de vie en bonne santé diminue depuis 2006 ; les cancers environnementaux se multiplient ; un Français sur deux renonce à se soigner pour des raisons financières.
La France n'a pas de politique de santé au sens fort, c'est-à-dire de politique affichant des valeurs et des priorités démocratiquement débattues. Tout a été réduit à la seule dimension budgétaire. On ne parle de la Sécurité sociale qu'en agitant l'épouvantail du « trou de la Sécu », dans le seul but d'acclimater les esprits à des réformes dites « impératives », qui visent évidemment à réduire les dépenses publiques de santé et leur transfert vers le secteur privé.
Cette privatisation rampante profite d'abord aux intérêts privés, comme ceux des assureurs et de l'industrie pharmaceutique. Notons à cet égard que les cinq principales industries pharmaceutiques ont dépassé les 200 milliards d'euros de revenus en 2015, pour des bénéfices de 47 milliards. Notre système de santé souffre de son caractère bien peu démocratique, alors que les Français y sont profondément attachés, comme à l'hôpital public, et qu'ils s'opposent à l'option de la privatisation.
La Sécurité sociale résulte du long combat du mouvement ouvrier pour instaurer une protection mutuelle contre les risques de la vie et du travail, selon le principe qui veut que chacun cotise selon ses moyens et reçoive selon ses besoins. À partir de 1945, avec ce système inédit et révolutionnaire, on a su mettre en place des caisses de retraite, d'allocations familiales et de maladie couvrant l'ensemble de la population française. Pourtant, depuis près de trente ans, cet esprit initial est dévoyé.
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale sur lequel nous avons à nous prononcer aujourd'hui est l'occasion, pour votre gouvernement, de poursuivre une entreprise de déconstruction méthodique au bénéfice des intérêts privés. Sous le couvert de réformes techniques, vous procédez en réalité, avec ce PLFSS, à un bouleversement de la Sécurité sociale. Vous accélérez le basculement des cotisations sociales, auxquelles contribuent travailleurs et entreprises, vers la CSG – la contribution sociale généralisée – , un impôt non progressif et injuste.
Contrairement à un discours mille fois répété dans cet hémicycle, les cotisations ne constituent pas des charges.