Intervention de Joël Aviragnet

Séance en hémicycle du lundi 2 décembre 2019 à 18h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoël Aviragnet :

Le PLFSS pour 2020 est un renoncement, un texte sans ambition marqué par une idéologie néolibérale profondément dangereuse pour notre système de protection sociale. Le texte que vous nous demandez d'adopter est un projet de loi de sous-financement de la sécurité sociale, de l'hôpital public, de l'aide à domicile et des EHPAD – établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Un renoncement, disais-je, car vous créez un déficit de 6 milliards d'euros, faute de compenser les exonérations de cotisations que vous avez décidées. Alors qu'en 2017, nous vous avions confié un budget de la sécurité sociale quasiment à l'équilibre, ce déficit illustre le manque de sérieux budgétaire du Gouvernement. Plus grave encore, à mon sens, il met en évidence vos choix politiques désastreux : plutôt que de venir en aide à l'hôpital public, vous préférez accorder des baisses de cotisations aux entreprises et aux employeurs. Moins de services publics, moins de cohésion sociale, des cadeaux aux plus riches et une dette qui repart à la hausse : voilà la ligne politique du parti La République en marche et du Gouvernement !

Oui, ce texte est un renoncement car, face à la crise que connaissent l'hôpital public et les services d'urgence dans tout le pays, vous nous proposez un budget de l'assurance maladie qui demande encore à l'hôpital de réaliser 650 millions d'euros d'économies. C'est d'autant plus inadmissible que cette austérité budgétaire ne servira pas à désendetter la sécurité sociale, bien au contraire, mais à financer des baisses de cotisations sociales.

L'austérité budgétaire a été imposée aux hôpitaux après les crises de 2008 et de 2012 pour rétablir les comptes sociaux. Cette décision était motivée par la crainte d'une explosion de la sécurité sociale lors de la crise économique. Aujourd'hui, la crise économique est derrière nous, la France a renoué avec la croissance économique et l'inflation, elle attire des investissements étrangers et le chômage décroît lentement. La cure d'austérité que vous prescrivez à l'hôpital est donc complètement injustifiée et insupportable.

Ne croyez pas qu'elle est sans conséquences : elle produit des effets désastreux ! À Saint-Gaudens, dans ma circonscription, les urgences ont fermé faute d'infirmiers car leurs conditions de travail sont délétères et inhumaines ; la population se trouve ainsi à plus de deux heures de l'hôpital de Toulouse – imaginez le résultat. Partout, nous observons la détérioration des conditions de travail, le doublement de la charge de travail des infirmiers et la hausse des absences des personnels hospitaliers pour raisons de santé. Nous assistons à l'industrialisation des soins et à la déshumanisation des métiers de la santé.

Ce texte, madame la ministre, renforce l'austérité et atrophie l'hôpital public. Tous les syndicats y sont opposés ; les collectifs Inter-Urgences et Inter-Hôpitaux le sont également. Rien n'a changé avec la présentation de votre plan hôpital car il est empreint d'insincérité et d'inconséquence. En effet, vous annonciez 300 millions d'euros pour l'hôpital dès cette année ; or l'amendement que vous avez fait adopter ne prévoit que 200 millions. Disons-le, ce plan est une goutte d'eau pour l'hôpital public : rien sur les réouvertures de lits, rien sur les recrutements, rien sur les hausses de salaires, à l'exception d'une prime réservée aux Parisiens et quelques primes de saupoudrage à la disposition des managers hospitaliers. Est-ce ainsi que l'on répondra à la crise ? Certainement pas.

Enfin, pour compléter la critique, les retraites, les pensions et les prestations familiales sont sous-indexées sur l'inflation pour la seconde année consécutive. Cette décision se traduira par une nouvelle baisse de pouvoir d'achat pour les retraités et les familles alors même qu'une étude de l'INSEE, publiée au mois d'octobre 2019, a démontré que l'action du Gouvernement avait eu pour effet une explosion des inégalités et du nombre de personnes en situation de pauvreté.

Vos choix politiques emportent des conséquences épouvantables. Le nier relève de l'imposture. Vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas, vous ne pourrez plus dire que c'était la faute de ceux qui vous ont précédé, car vous êtes aux commandes depuis deux ans et demi maintenant. La situation désastreuse de l'hôpital public est désormais de votre responsabilité ; il serait temps que vous en répondiez !

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