Rien ne résiste à la continuité dans les rapports humains. Il est souvent question des relations entre les magistrats et les préfets : quand vous coprésidez régulièrement un conseil départemental de sécurité avec un procureur de la République, et que vous l'invitez systématiquement à déjeuner à votre table, pour échanger, les relations changent très rapidement – sans doute parce que nous sommes français et que la table a une importance chez nous. Quand vous passiez, autrefois, une note des Renseignements généraux au procureur de la République, au nom de l'ordre public – une notion globale et non corporatiste –, vous changiez aussi le rapport de confiance.
Les êtres humains sont comme ils sont – certains sont plus ouverts que d'autres – mais il faut aimer les gens quand on est dans la vie publique, qu'on ait été nommé ou élu. Cela veut dire aimer les élus quand on est un préfet, et aimer les préfets quand on est un élu. Cela vaut aussi pour les relations entre les députés et les présidents des départements, même s'il y a naturellement des rivalités politiques – c'est une autre question. Vous allez peut-être me trouver un peu naïf, mais je crois très profondément à cette idée. Je pense qu'il faut avoir ce type de convictions.
En ce qui concerne le nombre des troupes, je ne suis pas d'accord vous, monsieur le rapporteur. Je pense qu'il y a un seuil en dessous duquel les capacités d'action sont gravement atteintes, même si je ne peux pas donner un chiffre précis. Lorsque nous allons à des réunions à Bercy, je suis très frappé de voir que nous sommes deux ou trois, de l'ADF, face à une quarantaine de fonctionnaires de l'État. Quand on travaille dans une administration déconcentrée, on s'arrache les cheveux pour savoir qui on peut envoyer à une réunion à la préfecture de région, à Paris ou sur le terrain pour telle ou telle mission. Il y a un vrai problème d'effectifs. À force de faire peser toujours sur le même échelon la révision générale des politiques publiques (RGPP), hier, et l'évolution des effectifs de la fonction publique, aujourd'hui, on finit par se trouver « à l'os », si je peux employer une expression un peu vulgaire. Il y a vraiment un problème de taille critique.
Pour ce qui est du CNEN, je vais laisser s'exprimer Anne Bouillot-Gourinat, si vous le permettez, car elle a une expérience directe de cette institution.