Je vous remercie de participer à la discussion sur les violences faites aux femmes pour obtenir un rendez-vous pour le commissariat de Firminy, mais je vous ai répondu : le préfet qui a toute ma confiance aura pour mission de me présenter des propositions et un point précis sur la situation du commissariat de Firminy en lien avec le directeur départemental de la sécurité publique.
Madame Lazaar, je vous répondrai en reprenant votre formule : vous m'avez remercié de ma présence, que vous avez qualifiée d'essentielle. Très modestement, je vous dirai qu'elle n'est pas essentielle, elle est une évidence. Si le ministère de l'Intérieur, que je représente, n'était pas présent à cette discussion, ce serait un contresens absolu. Je peux vous dire également que ma présence se justifie plus encore à titre personnel.
Vous m'avez interrogé sur les enjeux de la formation – que j'ai abordés et sur lesquels je ne reviens donc pas – et sur la place des travailleurs psychosociaux qui jouent un rôle majeur. La difficulté tient au fait qu'ils font l'objet d'un triple financement entre l'État, les commues et les départemets. Le président de l'Association des maires de France était présent au Grenelle la semaine dernière, celui de l'Association des départements de France était représenté. Il est absolument nécessaire que nous profitions de notre discussion aujourd'hui pour sanctuariser les engagements des différents acteurs et que nous progressions. Vous savez comme moi que nous fonctionnons selon des principes de financements pluriannuels. Il ne s'agit donc pas de postes de fonctionnaires classiques et une incertitude pèse sur leur renouvellement. Passer des conventions triennales, qui sont toujours possibles, tripartites ou bipartites, permettrait de pérenniser ces dispositifs.
Vous avez enfin abordé la question des violences administratives. Au début de votre propos, je me demandais ce dont il s'agissait mais, au fond, votre question est d'évidence, la confiscation du passeport étant un fait auquel nous sommes trop souvent confrontés.
Il faut savoir que le fichier national des étrangers garde une trace de tous les titres qui sont délivrés. Il convient de diffuser cette information : obtenir un duplicata est toujours possible et une personne qui perdrait ses papiers peut en faire la déclaration. Une personne à laquelle on les aurait confisqués peut parfaitement le déclarer. Je souhaite, par conséquent, que, dans le cadre de la procédure d'accompagnement assurées par des policiers et des gendarmes, on fasse en sorte que la personne concernée puisse obtenir ce duplicata pour se rendre notamment au consulat et être protégée. Le problème est que cette personne est déjà fragilisée par la violence qu'elle subit, à laquelle s'ajoute une fragilité supplémentaire, celle de ne pas avoir ses papiers et d'être confrontée à l'absence de titre de séjour. De telles situations méritent une attention supplémentaire.
Votre question doit nous conduire à sensibiliser à cette question. Peut-être que les cellules départementales que j'appelais de mes voeux la semaine dernière dans le cadre du Grenelle des violences conjugales, sur lesquelles nous allons travailler avec Mme la Garde des sceaux, premettront de traiter les cas que vous avez décrits et dont la réponse administrative ne va pas de soi. Peut-être pourrez-vous m'aider à relayer cette idée non encore entièrement validée. Le préfet et le procureur peuvent s'interroger, s'en occuper, décrocher le téléphone et faire passer le message. Au surplus, la présence de représentants des services serait susceptible de faciliter la démarche.
Monsieur Dunoyer, la ministre des outre-mer a répondu, en présence de Marlène Schiappa, sur les spécificités de la dimension ultramarine. Elle a souhaité, en effet, qu'un Grenelle dédié soit organisé dans les territoires ultramarins. Il existe des spécificités, des anomalies quantitatives, mais aussi des particularités techniques. Des réponses plus adaptées et plus concrètes seront apportées mais, quels que soient les départements d'outre-mer, il est essentiel que les dispositifs soient aménagés et que les mesures que nous mettons en place en France s'appliquent et protègent les femmes d'outre-mer.
En l'occurrence, nous sommes confrontés à une anomalie, mais le chiffre statistique est faible. Globalement, s'agissant des violences faites aux femmes, l'outre-mer, Mayotte excepté, n'est entachée d'aucune spécificité et ne connaît pas d'aggravation des violences faites aux femmes. Tel n'était pas le sens de votre question, mais je ne voudrais pas que l'on croie à une anomalie statistique à Mayotte, qui connaît une violence généralisée plus forte et une pratique de la violence plus débridée que dans d'autres territoires. C'est un problème pour nos services ;je tenais à apporter cette précision.
Il convient ensuite d'étudier au cas par cas, territoire par territoire, la difficulté d'accès au numéro 3919 et de trouver des solutions.
Vous m'avez interrogé sur l'audit en outre-mer, la réponse est affirmative. Je ne vous communiquerai pas le calendrier, car je ne voudrais pas indiquer à quelle période viendra le visiteur ou la visiteuse témoin ! Je dispose de quelques éléments, notamment pour la Nouvelle-Calédonie, dont je pourrai vous faire part personnellement.
Vous avez posé la question sur le comité local d'aide aux victimes. Je vais être brutal dans ma formulation mais vous la comprendrez : nous connaissons une difficulté avec les parlementaires. Je vous le dis parce que je l'ai été et que je le suis virtuellement pour avoir été réélu en même temps que vous avez été élus ou réélus. Les membres de certaines instances sont tenus au secret ; or, les parlementaires ne le sont pas. C'est la raison pour laquelle les parlementaires ne peuvent y siéger. J'ignore si c'est le régime qui s'applique aux comités locaux d'aide aux victimes, mais ce peut être une explication. Au-delà de la qualité et de la respectabilité de tous les parlementaires présents, vous n'êtes pas, en qualité de parlementaires, tenus au secret. Lorsque l'on nomme des personnes individuellement, la question se pose. J'ai été confronté à cette difficulté lors de la constitution, sous l'autorité des préfets et des procureurs, des groupes d'évaluation sur les phénomènes de radicalisation ou de lutte contre le terrorisme. Des parlementaires m'avaient demandé à y assister, mais je n'ai pas pu répondre positivement en raison de la dimension que je viens d'évoquer. La remarque ne porte pas sur la qualité des parlementaires intuitu personae, il s'agit d'une remarque de droit.
Je ne veux surtout pas polémiquer sur les chiffres des féminicides annoncés sur des tweets qui circulent. De toute façon, ils ont une utilité : celle de l'alerte et de la prise de conscience. Par contre, le ministère de l'Intérieur connaît un décalage dans le temps dans l'analyse des chiffres. Ce qui peut paraître un féminicide selon une information de la presse peut ne pas l'être. Hier, s'est déroulé un fait horrible dans les Bouches-du-Rhône, à Maussane-les-Alpilles. Un homme de 70 ans a tué sa belle-mère de 95 ans, son fils, puis son épouse. S'agit-il d'un féminicide au sens où nous en parlons, ou s'agit-il de la dérive d'un homme qui a tué toute sa famille ?
Je ne commente pas, ni ne critique les données telles qu'elles sont livrées, mais je pense qu'en matière d'incrimination pénale et de décès de femmes et d'hommes, il est préférable de s'en tenir aux chiffres qui permettent de caractériser d'un point de vue judiciaire ce qui relève de l'assassinat d'une femme par son conjoint plutôt qu'à une information qui circule dans la presse. J'entoure mon propos de toutes les précautions possibles. De toute façon, le débat ne porte pas sur les chiffres, mais sur une évolution qui est mauvaise cette année même si je ne dispose pas des chiffres définitifs,ceux des six derniers mois nous faisant défaut. L'objectif vise à réduire ce décalage qui est trop important.
Je vous ai livré les chiffres de 2017 et 2018. J'en profite pour en corriger un point sur la tendance indiquée par une parlementaire, qui serait une tendance à la baisse. Pour cette année, on peut penser que la tendance sera mauvaise. Je vous livre cet élément de réflexion, qui ne change rien aux chiffres qui circulent, nous attendons d'avoir le recul nécessaire. Quand on est ministre de l'Intérieur, on doit s'appuyer sur des faits établis. La tragédie qui s'est produite hier peut nous pousser à nous interroger sur cette qualification. Mais Mme la Garde des sceaux sera plus experte que moi pour vous éclairer. Nous n'utilisons pas le terme de parricide ou d'infanticide, et pourtant cela correspond à une réalité.