Pour la première fois, la dotation pour aléas est provisionnée en loi de finances initiale dans le budget de l'agriculture alors qu'elle se retrouvait jusqu'alors dans le budget général. Nous avons choisi de nous appuyer sur le travail des états généraux de l'alimentation pour la réformer en profondeur. Dans cette perspective, les ateliers qui travaillent sur cette question doivent nous faire remonter les expérimentations de terrain, afin que nous puissions insérer de manière cohérente cette dotation pour aléas dans un cadre fiscal global.
Je tiens au préalable à remercier vos rapporteurs pour le travail qu'ils ont réalisé et les auditions qu'ils ont patiemment menées sur des sujets parfois très techniques. Vous pouvez en tout cas compter sur notre mobilisation.
Le grand plan d'investissement annoncé par le Premier ministre le 25 septembre 2017 a vocation à être un des instruments de facilitation et d'accompagnement de la transformation de l'ensemble des secteurs de notre agriculture. Cinq milliards d'euros sont prévus pour le volet agricole sur la durée du quinquennat, pour accélérer l'adaptation des outils et des pratiques agricoles, mieux intégrer les réponses au défi climatique, renforcer la compétitivité, le soutien à la recherche et à l'innovation.
Dans le cadre des états généraux de l'alimentation, nous avons mis en place un atelier transverse, l'atelier 14, chargé de réfléchir aux pistes d'avenir. Nous pourrons ainsi proposer, à l'issue des travaux, un plan qui mobilisera à la fois des crédits budgétaires, des cofinancements européens, des aides à l'investissement, des dispositifs de soutien aux changements de pratiques ou encore les crédits du fonds stratégique de la forêt et du bois ; un effort tout particulier étant fait sur le bon ciblage des interventions.
Nous pourrons également compter sur du financement non budgétaire avec effet de levier, qu'il s'agisse de fonds innovants, d'investissements en fonds propres, de fonds de prêt à l'économie, de fonds de garantie ou encore des crédits du PIA3 pour soutenir la recherche et l'innovation.
Vous m'avez interrogé sur le soutien à l'export. Dans ce contexte de crise où l'exportation apparaît aujourd'hui comme l'un des principaux relais de croissance, en particulier pour les filières agroalimentaires, nous devons, plus que jamais, accompagner nos entreprises. Nous travaillons beaucoup avec la trentaine de conseillers agricoles dont nous disposons dans les ambassades, ainsi qu'avec Business France qui, depuis le 1er janvier 2017, est désormais en charge des activités business to business auparavant gérées par Sopexa. Nos différents dispositifs, nationaux ou régionaux, de soutien à l'export et de promotion doivent faire preuve de davantage de souplesse et de complémentarité afin que se créent des synergies. Je mentionnerai également l'atelier 4 des états généraux de l'agriculture, qui doit nous aider à décliner de façon opérationnelle les axes stratégiques du plan export afin d'aider à l'internationalisation de nos filières agroalimentaires. Le Président de la République a enfin souhaité que nous travaillions sur le label France pour mieux mettre en valeur, sous la bannière tricolore, nos entreprises et la qualité de leurs produits.
Pour ce qui concerne la provision pour aléas, elle restera disponible pendant toute l'année pour faire face à d'éventuelles situations de crise, puisque le règlement des pénalités financières communautaires n'intervient, lui, qu'en fin d'année. Si le montant de provisions se révélait insuffisant pour couvrir l'ensemble des besoins, nous pourrions alors rouvrir des crédits dans le cadre de la loi de finances rectificative de fin d'année.
La conversion à l'agriculture biologique est évidemment une forte priorité pour que nous soyons au rendez-vous de la très forte demande des consommateurs. L'aide au maintien ne sera plus à l'avenir financée par l'État, mais pourra l'être par d'autres partenaires, sachant que l'État continuera de payer jusqu'à leur terme les engagements pris par le passé. J'ai proposé en contrepartie que le crédit d'impôt bio soit protégé et revalorisé pour assurer un soutien tout à la fois simple, pérenne et uniforme sur l'ensemble du territoire. Je ne sous-estime pas la dynamique de développement de l'agriculture biologique, que nous suivons avec attention. Notre objectif est de passer de 6 à 8 % de terres cultivables. Certains lui reprochent de n'être pas assez ambitieux, mais atteignons déjà les 8 %, puis nous verrons si nous pouvons faire mieux.
La PAC post-2020, je l'ai dit, doit être simplifiée et modernisée, en continuant d'évoluer comme elle a su le faire au fil des réformes successives. Les orientations du Président de la République en la matière sont claires : une PAC protectrice, facilitatrice, plus agile et qui offre aux agriculteurs des filets de sécurité. C'est sur ces bases que nous travaillons en lien avec d'autres ministères.
Je suis pleinement conscient du contexte incertain dans lequel sera négocié le cadre financier pluriannuel post-2020 ; toutefois, je suis convaincu que la PAC demeure une politique moderne et que l'ampleur des défis nécessite une réponse coordonnée au niveau européen. Dans cette perspective, la France sera force de propositions. Nous organisons d'ailleurs, le 19 décembre prochain, une grande conférence nationale sur la PAC, à laquelle les parlementaires seront pleinement associés.
Concernant le droit à l'erreur, tel que le prévoit le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, il ne pourra, compte tenu du cadre européen actuel, être étendu à l'ensemble des dispositifs de soutien qui sont financés sur les crédits européens, mais le Président de la République souhaite intégrer ces questions dans les négociations sur le cadre de la future PAC.
Monsieur Lauzzana, l'ANSES bénéficiera de 32 millions de recettes fiscales affectées. En ce qui concerne les moyens humains, l'agence contribue à l'effort global du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, avec une réduction de son personnel de sept ETP. Nous restons néanmoins vigilants sur cette question des moyens, car le Brexit, que vous avez évoqué, peut aussi être pour l'ANSES une formidable chance d'occuper une place laissée vacante par le départ du Royaume-Uni et de renforcer son rôle au niveau européen, en matière d'évaluation scientifique des risques, des médicaments vétérinaires, des pesticides ou des biocides. Dans cette optique, le relèvement du plafond de la taxe pourra être examiné dans le cadre du PLF pour 2019.
Pour ce qui est des perturbateurs endocriniens, la réglementation européenne prévoit de définir ces substances et de les retirer du marché, à l'instar des molécules cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques. Une définition provisoire a été établie par le règlement, mais elle n'est pas satisfaisante : seule cinq molécules sur 45 sont concernées. Le compromis trouvé en juillet dernier par les États membres constituait un réel progrès ; toutefois, la question des dérogations possibles a conduit le Parlement européen à émettre des objections pour des motifs strictement juridiques. Il faut donc que la Commission mette sur la table une nouvelle proposition conforme à nos objectifs de santé publique et de protection de l'environnement ; il est également indispensable que, sur toutes ces questions, les consommateurs européens et français aient confiance dans les instances d'évaluation scientifique. Cette nécessaire confiance est pour nous un sujet de vigilance permanent.
En ce qui concerne la filière avicole et l'indemnisation de l'influenza aviaire, nous sommes mobilisés pour accompagner les professionnels. Pour 2016, l'indemnisation des entreprises de l'amont est achevée ; pour l'aval, un dispositif d'avances remboursables a été rapidement déployé. L'avance a été versée et le complément le sera bientôt. L'indemnisation des pertes directes pour 2017 est en bonne voie ; pour ce qui est des pertes indirectes, nous explorons actuellement l'ensemble des pistes. Je vous ai entendus sur la filière foie gras et les problèmes posés par la pénurie de canetons et de poussins. Nous nous sommes saisis du problème, conscients qu'il est essentiel de trouver des solutions à l'approche des fêtes de fin d'année.
Vous avez également évoqué la réforme de la fiscalité agricole. Elle doit tenir compte de deux spécificités du secteur : d'une part, l'importante intensité capitalistique de l'activité agricole et, d'autre part, la grande variabilité des revenus tirés de l'exploitation de biens ruraux, du fait des aléas climatiques, sanitaires ou économiques. Par ailleurs, la pluriactivité a tendance à se développer pour pallier la baisse des revenus strictement agricoles, et les exploitations traditionnellement familiales ont de plus en plus tendance à se structurer selon d'autres modèles juridiques.
La fiscalité est une matière vivante qui a connu ces dernières années beaucoup d'évolutions, dont toutes n'ont malheureusement pas produit les résultats escomptés – il me suffira d'évoquer la déduction pour investissement ou la déduction pour aléas. Ainsi que l'a indiqué Bruno Le Maire il y a quelques jours, nous allons donc rouvrir le chantier de la fiscalité agricole pour formuler des propositions qui, je l'espère, sauront être innovantes.
S'agissant du glyphosate, la Commission européenne a proposé de prolonger de dix ans l'autorisation, tandis que la France, l'Italie et l'Allemagne ont oeuvré en faveur d'un compromis limitant cette prolongation à quatre ans. La France s'est déclarée contre des durées de dix ans et cinq ans. Il est essentiel pour nous que les mêmes règles s'appliquent dans tous les États membres. Il faut par ailleurs que d'ici l'échéance retenue, nous puissions proposer aux agriculteurs une alternative crédible.
Les discussions d'hier à Bruxelles n'ont pas permis d'aboutir, mais le Gouvernement continue de chercher avec ses partenaires, un compromis satisfaisant, sachant, je le rappelle, que l'usage non agricole du glyphosate par les collectivités est déjà interdit en France depuis cette année et que son utilisation par les particuliers le sera à compter du 1er janvier 2019.
Enfin, en ce qui concerne les organisations interprofessionnelles, les responsables des plans de filière sont engagés dans une démarche très ambitieuse. Nous leur avons demandé de rendre leur copie pour le 10 décembre. D'ici là, les experts publics, l'INRA l'Agence Bio, l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), FranceAgriMer (FAM) à leur disposition pour les accompagner.