La politique du logement menée depuis des dizaines d'années n'a pas permis d'obtenir les résultats espérés, malgré son coût important. En zones tendues, l'offre ne parvient pas à satisfaire la demande, de nombreux ménages ne trouvent pas à se loger. En conséquence, le mal-logement et le nombre de sans-domicile-fixe se maintiennent ou augmentent. Les ménages doivent consentir des taux d'effort importants pour se loger ou habitent de plus en plus loin.
Par ailleurs, le logement social souffre de déficiences : il ne parvient pas à répondre à la demande. En conséquence, la durée d'attente d'un logement social est beaucoup trop importante. Par ailleurs, la rotation du parc social est faible, ce qui se traduit généralement par un avantage à vie pour ceux qui ont la chance de bénéficier d'un logement social et par un blocage pour les autres. Enfin, malgré les efforts, la mixité sociale tarde à se concrétiser. De plus, les ménages les plus défavorisés ne sont pas représentés de manière satisfaisante au sein du parc social, alors que sa vocation première est justement sociale.
Partant de ce constat, le Gouvernement a voulu initier une réforme profonde de la politique du logement. C'est pourquoi il a décidé de créer un « choc d'offre » en construisant plus vite et moins cher dans les zones de tension, afin de répondre aux besoins de chacun, de protéger les plus fragiles et d'améliorer le cadre de vie, notamment dans les quartiers, les centres-villes de villes moyennes et les centres-bourgs.
En effet, c'est en favorisant l'offre que l'on peut augmenter la construction et faire baisser les prix. La baisse des loyers qui est demandée dès l'année prochaine aux bailleurs sociaux en faveur des ménages les plus modestes doit être comprise sous cet angle. Parallèlement au choc d'offre, il est nécessaire d'entraîner une dynamique de baisse des loyers. À ce sujet, les bailleurs sociaux ont fait part de leur inquiétude concernant l'impact de cette mesure sur leurs capacités d'investissement. Par ailleurs, ils mettent en doute la possibilité d'augmenter les ventes actuelles de logement. Ils soulignent également l'injustice d'un mécanisme qui pénaliserait ceux qui remplissent le mieux leur mission sociale.
Pour répondre à cette inquiétude, je rappelle qu'un important dispositif d'accompagnement est prévu via un fort soutien public à l'exploitation et à l'investissement en faveur des organismes de logement social, afin que la baisse des loyers soit soutenable pour leurs budgets et préserve en particulier leur capacité à investir.
La facilitation des ventes de HLM pour mieux mobiliser les actifs du secteur est une voie très intéressante. Cela permettra de donner davantage de liberté à la politique patrimoniale des bailleurs sociaux, avec de nouvelles ressources destinées à la construction de logements sociaux : deux logements peuvent être construits pour un logement vendu.
Je soutiens l'ensemble du dispositif. Cependant, il me semble nécessaire de prendre en compte de possibles décalages temporels entre la diminution des loyers et les effets des compensations. Les bailleurs sociaux et le Gouvernement sont actuellement en discussion pour régler ces modalités. Si ce décalage temporel s'avérait trop difficile à combler, il pourrait être judicieux de discuter d'une application progressive de la baisse des loyers. La porte reste, me semble-t-il, ouverte à la discussion.
Ce projet sera l'occasion d'une réorganisation importante de l'ensemble des bailleurs sociaux, que tous les acteurs – y compris les intéressés eux-mêmes – jugent souhaitable.
Par ailleurs, le Gouvernement a décidé de proroger et de recentrer le dispositif d'investissement locatif défiscalisé dit « Pinel ». Il a également décidé de proroger le prêt à taux zéro (PTZ), tout en maintenant à un niveau élevé les aides à la pierre destinées au financement des logements sociaux et très sociaux – les dotations du Fonds national des aides à la pierre (FNAP) sont en hausse. Il est important de cibler les aides en fonction des caractéristiques des différents territoires. Comme les personnes que j'ai auditionnées l'ont souvent souligné, il ne faut pas délaisser les zones détendues, notamment en matière de réhabilitation, revitalisation et rénovation. Je suis satisfaite de la dotation supplémentaire de 110 millions d'euros pour l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), qui permettra d'augmenter de cinquante pour cent le nombre de logements rénovés au titre du programme « Habiter mieux ». Je me réjouis également de l'accord à venir sur l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).
De plus, le Gouvernement s'est engagé – je m'en félicite – à généraliser le programme « Logement d'abord ». C'est une excellente initiative, plébiscitée par l'ensemble du secteur associatif, qui permettra de venir en aide aux personnes les plus fragiles, avec un objectif de 40 000 logements très sociaux par an.
Enfin, le Gouvernement a également décidé d'agir sur plusieurs volets, dont la simplification de la réglementation, la simplification et la numérisation des procédures, la lutte contre les recours abusifs et la libération du foncier.
Ce projet de loi de finances est une étape dans le cadre d'une réforme plus générale de la politique du logement. Plusieurs pistes de réflexion doivent être envisagées, notamment l'indispensable chantier de modernisation et d'unification des systèmes d'information des acteurs du logement social. Il faut par ailleurs qu'une réflexion soit menée sans tarder sur les propositions de la Cour des comptes et de l'institut des politiques publiques (IPP) visant à unifier plusieurs minima sociaux afin d'en renforcer l'efficacité.