La proposition de loi que nous soumet le groupe Socialistes et apparentés a pour objet la mise en place d'un dispositif ambitieux – j'insiste sur ce terme – pour le financement de la transition énergétique des logements d'habitation.
La question de la lutte contre les passoires thermiques a été abordée dans le cadre de l'examen en première lecture du projet de loi relatif à l'énergie et au climat à l'Assemblée en juin dernier. Le Gouvernement avait alors fait adopter un dispositif d'encadrement des performances énergétiques posant les premiers jalons d'une transition énergétique de l'habitat, sans toutefois proposer de mécanisme de financement correspondant. En outre, l'examen du projet de loi de finances pour 2020 n'a pas permis de dégager une vision claire de la transition énergétique prévue pour le parc français de logements puisque, en particulier, les 20 % des ménages les plus aisés sont désormais exclus de la nouvelle prime à la rénovation énergétique.
La proposition de loi cherche à combler cette lacune grâce à un plan sur trente ans doté d'une enveloppe de 150 milliards d'euros, soit 5 milliards par an, financés en grande partie par des emprunts de l'ANAH, garantis par l'État, et par la mobilisation de crédits existants.
La prime pour le climat doit permettre de financer les travaux de transition énergétique, le taux de prise en charge étant déterminé par le gain de performance énergétique. Une grande partie de la prime serait remboursée, soit par une augmentation des droits de mutation, soit de manière mensualisée, sur la base des économies d'énergie attendues.
Le dispositif ne manque pas d'intérêt. II nous semble à la fois pertinent et bien calibré du point de vue du financement. Il fait peser sur la puissance publique la trésorerie d'un investissement trop lourd pour de nombreux propriétaires, mais rentable économiquement et écologiquement à très long terme.
Je note, en tout cas, que la prime pour le climat suscite l'intérêt de toutes les parties prenantes : le secteur du bâtiment, les associations de propriétaires et les associations caritatives.
La mise sous perfusion dopante d'un pan entier de l'économie pose évidemment des questions. Un tel investissement est susceptible d'avoir des effets de bord qui nécessiteront des mesures de régulation en cascade. La proposition de loi prévoit d'ailleurs un encadrement des loyers des biens ayant bénéficié de la prime. Nous craignons par ailleurs de fortes tensions sur le marché des travaux en raison d'une éventuelle incapacité du secteur à répondre à cette demande stimulée artificiellement.
Au-delà des enjeux conceptuels d'une nouvelle forme de planification économique mi-administrée mi-incitative, la proposition de loi répond néanmoins à un enjeu écologique majeur, la réduction de la consommation d'énergie des logements, en levant les difficultés de financement de cette transition du parc de logements, aujourd'hui insoutenable pour un grand nombre de propriétaires.
Nous regrettons dès lors que la majorité ait balayé ce texte en commission sans autre forme de procès. Souhaitons que son examen dans l'hémicycle lui réserve un sort différent. Le Gouvernement et sa majorité doivent considérer ces propositions à leur juste valeur, au-delà de toute tactique politicienne. Pour nombre de Français, la précarité énergétique est en effet un piège duquel la politique actuelle ne leur permet pas aujourd'hui – je dis bien aujourd'hui – de s'extirper.