D'abord, notre système pèche en matière d'identification des biens à saisir et confisquer. Quand un réseau est découvert, les forces de police sont mobilisées pour arrêter ses membres très rapidement, sans qu'il ait été procédé, au préalable, à l'identification de leurs biens. Voilà pourquoi nous proposons la présence d'assistants spécialisés dans les tribunaux.
Le deuxième manque de notre système concerne les outils susceptibles de faciliter l'identification, la saisie et la confiscation des biens. Ainsi, il n'est pas rare que les fonctionnaires provenant d'autres ministères voient leur accès aux fichiers interrompu par leur administration d'origine alors même que cet accès serait très précieux dans l'exercice de leurs nouvelles missions. Nous proposons donc que les assistants conservent l'accès aux fichiers du ministère dont ils relèvent. Nous avons aussi observé une grande pauvreté dans la mise en oeuvre de ces fichiers. On nous a par exemple cité le cas d'un département où seules deux ou trois personnes avaient accès au fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA), parce que c'est un vieux fichier dont les accès ne peuvent être démultipliés.
Pour aller jusqu'au bout du raisonnement, demain, des saisies doivent pouvoir être prononcées à l'encontre de quelqu'un qui est jugé en comparution immédiate. Il suffit de faire une recherche dans le fichier des comptes bancaires et de vérifier dans celui des cartes grises si cette personne possède un véhicule. Dans certains cas celui qui ressort avec une peine de sursis prétend qu'il n'a rien eu alors que lorsque les comptes bancaires sont bloqués et la voiture saisie, la sanction est plus durement ressentie.
S'agissant du modèle irlandais qui a été évoqué, nous n'avons pas tiré le fil jusqu'au délit de non-justification de ressources. Ce délit est inscrit dans notre droit mais les biens sont de plus en plus camouflés, comme dans le cas d'une société civile immobilière enregistrée sous le nom d'une compagne à qui un commerce a été offert. La non-justification de ressources pourrait être mobilisée, mais il faut du temps pour la caractériser.
Enfin, au niveau international, de plus en plus de biens franchissent les frontières. La PIAC dispose d'une brochure qui montre comment cela fonctionne pays par pays. Au-delà, c'est le système D. Il existe un pays – que je ne citerai pas – dont les services ont indiqué qu'ils ne voulaient pas coopérer parce qu'ils ne disposaient pas des outils idoines, jusqu'au moment où une magistrate a constaté être parfaitement en mesure d'y arriver. Lorsque nous disons que l'AGRASC doit avoir un rôle d'animation, c'est notamment vrai en matière de partage de l'information. Par exemple, à Marseille, dont un juge a été nommé magistrat de liaison en Espagne, tous les acteurs compétents savent comment procéder lorsqu'un problème se pose avec ce pays grâce aux contacts dont il dispose.